L’information judiciaire au sujet de l’affaire de Pétro-Tim est désormais ouverte par le Procureur de la République. La Direction des Investigations sera au cœur des enquêtes. Telle est la procédure gouvernementale.
Entre les lignes de cette procédure et les attentes légitimes à l’éclatement de la vérité et des enjeux des responsabilités étatiques, personnelles et des protagonistes de la gouvernance du pétrole et du gaz à fixer, il existe apparemment un mal entendu national. L’appel à témoin n’est guère étranger à ce malaise se dessinant à l’horizon d’un scandale réel ou imaginaire que l’on voudrait étouffer à tout prix.
Assurément, les affaires judiciaires se suivent au Sénégal et ne se ressemblent pas. L’affaire Aliou Sall et Franck Timis fait l’objet d’un appel à témoins. Une première peut-être dans le pays. Le Procureur de la République a invité tous les témoins à se rendre volontairement auprès des enquêteurs de la Direction des Investigations Criminelles.
Quel est le sens de cet appel ? Une question que les observateurs se posent certainement et de manière légitime. La réponse immédiate résulterait a priori d’une volonté de la justice de vouloir élargir l’éventail des sources de l’information judiciaire et des investigations. La diversification des sources est toujours un plus pour des enquêteurs indépendants et critiques.
Au-delà de cette dimension méthodologique de l’investigation du reste acceptable dans son principe organisationnel, des interrogations sérieuses surgissent dès l’entame de la procédure.
Quelle est la pertinence d’un appel à témoin dans ce dossier de plusieurs années d’autant que l’Etat central est l’acteur principal de cette affaire ? Les enjeux de l’affaire remontent à 2011, alors que l’actuel Président de la République, était au sommet de l’Etat.
Quels sont ces citoyens témoins en mesure de fournir des informations orales et /ou écrites susceptibles de servir à percer les secrets enveloppant tout le processus de négociation entre l’Etat du Sénégal et la société Pétro-Tim, d’informer au sujet du contrat pétrolier et gazier ?
Ces témoins pourront-ils éclairer la lanterne des enquêteurs à propos des accusations contre le Directeur Général de la Caisse des Dépôts et Consignations et son ancien employeur ?
Ces interrogations laissent penser que ces témoins soumis volontairement au feu des enquêteurs acceptent non seulement de témoigner, mais également, s’engagent d’une manière ou d’une manière à se transformer en des acteurs actifs de la procédure judiciaire plus ou moins longue.
Ils devront ainsi se mettre au service des suites judiciaires probables de l’affaire. Au-delà du témoignage citoyen volontaire, c’est un engagement personnel des témoins à être des acteurs d’un potentiel procès avec tous ses rebondissements, ses passions humaines, ses conflits d’intérêts politiques et économiques.
Les témoins n’ont pas cette culture du témoignage devant les enquêteurs et la justice sénégalaise. Ce déficit de culture judiciaire démocratique laisse croire que l’appel à témoins risque de tomber dans l’oreille de sourds et muets refusant tout témoignage avec ses effets inattendus. L’appel à témoins suscite d’autres questions majeures aussi importantes que la pertinence de l’invite et ses risques d’être sans suite. L’affaire Pétro-Tim en question date des années 2011. Elle a fait l’objet d’un rapport de l’Inspection générale d’Etat.
Ce rapport mettrait en épingle des manquements de la procédure et des incohérences. L’affaire interroge ainsi des négociations et des contrats liant le Sénégal à un privé international. L’Etat du Sénégal est le premier témoin et le principal responsable de cette histoire mouvementée de l’affaire Pétro-Tim. L’appel à témoins souffre de ce côté de pertinence. Les documents officiels existent. La traçabilité est possible.
Dans ces conditions où l’enquête a déjà de la matière officielle et des sources étatiques d’informations, on peut réellement questionner la volonté du Président de la République, du Ministère de la Justice de vouloir mener des investigations et de faire éclater la vérité. L’appel à témoins masque mal le stock informatif de l’Etat et sa connaissance des tenants et des aboutissants de l’affaire. Les affaires de Karim Wade et de Khalifa Ababacar Sall laissent encore plus perplexe l’appel à témoins. Ces deux affaires précédentes n’ont l’objet d’aucun appel à témoins. L’Etat et la justice ont agi sans faire recours à un appel à témoins.
Ces affaires Wade et Sall ont été traitées par les services compétents de la justice, de la police et de l’Etat. Pourquoi alors, l’Etat du Sénégal suffisamment informé, ne met pas en place des mécanismes de traitement équitables et identiques dans l’affaire de Pétro-Tim ?
Le ressentiment d’une fuite en avant et d’une volonté de vouloir tuer l’affaire dans l’œuf, est du domaine des possibles. On comprend aisément la déception de franges importantes de l’opinion publique nationale après l’invite à témoins du Procureur de la République.
La République sénégalaise entre dans un nouveau cycle de défiance ouverte à sa justice et à ses gouvernants politiques. Le risque de discréditer les institutions républiques est réel et ne devrait pas être sous-estimé. Face à ce danger de fragilisation de la justice au regard des aspirations profondes de la rue publique à la justice sociale et à la vérité, il faut peut-être un appel à la République.
Mamadou Sy Albert
Entre les lignes de cette procédure et les attentes légitimes à l’éclatement de la vérité et des enjeux des responsabilités étatiques, personnelles et des protagonistes de la gouvernance du pétrole et du gaz à fixer, il existe apparemment un mal entendu national. L’appel à témoin n’est guère étranger à ce malaise se dessinant à l’horizon d’un scandale réel ou imaginaire que l’on voudrait étouffer à tout prix.
Assurément, les affaires judiciaires se suivent au Sénégal et ne se ressemblent pas. L’affaire Aliou Sall et Franck Timis fait l’objet d’un appel à témoins. Une première peut-être dans le pays. Le Procureur de la République a invité tous les témoins à se rendre volontairement auprès des enquêteurs de la Direction des Investigations Criminelles.
Quel est le sens de cet appel ? Une question que les observateurs se posent certainement et de manière légitime. La réponse immédiate résulterait a priori d’une volonté de la justice de vouloir élargir l’éventail des sources de l’information judiciaire et des investigations. La diversification des sources est toujours un plus pour des enquêteurs indépendants et critiques.
Au-delà de cette dimension méthodologique de l’investigation du reste acceptable dans son principe organisationnel, des interrogations sérieuses surgissent dès l’entame de la procédure.
Quelle est la pertinence d’un appel à témoin dans ce dossier de plusieurs années d’autant que l’Etat central est l’acteur principal de cette affaire ? Les enjeux de l’affaire remontent à 2011, alors que l’actuel Président de la République, était au sommet de l’Etat.
Quels sont ces citoyens témoins en mesure de fournir des informations orales et /ou écrites susceptibles de servir à percer les secrets enveloppant tout le processus de négociation entre l’Etat du Sénégal et la société Pétro-Tim, d’informer au sujet du contrat pétrolier et gazier ?
Ces témoins pourront-ils éclairer la lanterne des enquêteurs à propos des accusations contre le Directeur Général de la Caisse des Dépôts et Consignations et son ancien employeur ?
Ces interrogations laissent penser que ces témoins soumis volontairement au feu des enquêteurs acceptent non seulement de témoigner, mais également, s’engagent d’une manière ou d’une manière à se transformer en des acteurs actifs de la procédure judiciaire plus ou moins longue.
Ils devront ainsi se mettre au service des suites judiciaires probables de l’affaire. Au-delà du témoignage citoyen volontaire, c’est un engagement personnel des témoins à être des acteurs d’un potentiel procès avec tous ses rebondissements, ses passions humaines, ses conflits d’intérêts politiques et économiques.
Les témoins n’ont pas cette culture du témoignage devant les enquêteurs et la justice sénégalaise. Ce déficit de culture judiciaire démocratique laisse croire que l’appel à témoins risque de tomber dans l’oreille de sourds et muets refusant tout témoignage avec ses effets inattendus. L’appel à témoins suscite d’autres questions majeures aussi importantes que la pertinence de l’invite et ses risques d’être sans suite. L’affaire Pétro-Tim en question date des années 2011. Elle a fait l’objet d’un rapport de l’Inspection générale d’Etat.
Ce rapport mettrait en épingle des manquements de la procédure et des incohérences. L’affaire interroge ainsi des négociations et des contrats liant le Sénégal à un privé international. L’Etat du Sénégal est le premier témoin et le principal responsable de cette histoire mouvementée de l’affaire Pétro-Tim. L’appel à témoins souffre de ce côté de pertinence. Les documents officiels existent. La traçabilité est possible.
Dans ces conditions où l’enquête a déjà de la matière officielle et des sources étatiques d’informations, on peut réellement questionner la volonté du Président de la République, du Ministère de la Justice de vouloir mener des investigations et de faire éclater la vérité. L’appel à témoins masque mal le stock informatif de l’Etat et sa connaissance des tenants et des aboutissants de l’affaire. Les affaires de Karim Wade et de Khalifa Ababacar Sall laissent encore plus perplexe l’appel à témoins. Ces deux affaires précédentes n’ont l’objet d’aucun appel à témoins. L’Etat et la justice ont agi sans faire recours à un appel à témoins.
Ces affaires Wade et Sall ont été traitées par les services compétents de la justice, de la police et de l’Etat. Pourquoi alors, l’Etat du Sénégal suffisamment informé, ne met pas en place des mécanismes de traitement équitables et identiques dans l’affaire de Pétro-Tim ?
Le ressentiment d’une fuite en avant et d’une volonté de vouloir tuer l’affaire dans l’œuf, est du domaine des possibles. On comprend aisément la déception de franges importantes de l’opinion publique nationale après l’invite à témoins du Procureur de la République.
La République sénégalaise entre dans un nouveau cycle de défiance ouverte à sa justice et à ses gouvernants politiques. Le risque de discréditer les institutions républiques est réel et ne devrait pas être sous-estimé. Face à ce danger de fragilisation de la justice au regard des aspirations profondes de la rue publique à la justice sociale et à la vérité, il faut peut-être un appel à la République.
Mamadou Sy Albert