Carles Puigdemont, en Belgique depuis sa destitution, dit s'être «exilé» pour attirer l'attention de l'Europe sur la «politisation» de la justice en Espagne. Huit des membres de son gouvernement ont été placés en détention provisoire après leur inculpation pour sédition et rébellion. Mais si des magistrats ont critiqué certains aspects du travail de la justice dans la crise catalane, ils nient qu'elle soit au service du pouvoir.
«La classe politique joue avec la justice en fonction de ses intérêts. 'Si la décision me va, je dis qu'elle est indépendante, et sinon, elle est politisée'. Et bien non», affirme Manuel Ruiz de Lara, porte-parole d'une association pour l'indépendance de la justice.
La crise en Catalogne a profondément divisé l'opinion. L'Espagne, dépeinte comme un régime autoritaire par les sécessionnistes, a été accusée de faire des «prisonniers politiques» quand une juge à Madrid a écroué deux dirigeants d'associations indépendantistes accusés de sédition.
«Pas sensés, c'est autre chose»
La semaine dernière, la même juge, Carmen Lamela, réputée dure, a envoyé en prison huit membres du gouvernement catalan destitué, motivant sa décision par le fait qu'ils risquaient de fuir comme l'ont fait M. Puigdemont et quatre de ses «ministres». «La justice espagnole a été mise au service de l'agenda politique du gouvernement», a estimé M. Puigdemont.
Mais les juges réfutent cette affirmation. «Les juges sont indépendants. Qu'ils ne soient parfois pas raisonnables ou sensés, c'est autre chose», pense Xavier Arbos, professeur de droit à l'université de Barcelone.
«Disproportionnée»
L'accusation de rébellion, qui pourrait valoir aux dirigeants séparatistes jusqu'à 25 ans de prison, est cependant contestée. Défini dans le Code pénal comme le fait de se «soulever violemment et publiquement», ce chef d'accusation est «disproportionné» selon José Maria Mena, ancien procureur général de Catalogne, dans la mesure où les indépendantistes ont toujours été pacifiques.
Le procureur général espagnol Jose Manuel Maza (photo), jugé proche du pouvoir, estime lui que les séparatistes ont intimidé et résisté aux forces de police, et que cela constitue une forme de violence. Pour M. Mena, cela revient à «convertir la pression sociale propre à toute manifestation dans un pays démocratique en intimidation, violence morale et donc rébellion».
«Le procureur général a voulu démontrer qu'il était plus dur que quiconque (...) et pensé que s'il faisait preuve d'une très grande sévérité, l'indépendantisme allait décroître, ce qui est un calcul extra judiciaire», affirme-t-il.
Mauvaise image
Au-delà de la crise catalane, la justice espagnole a depuis longtemps une mauvaise image. Dans une étude de 2017 de la Commission européenne, l'Espagne était classée 26e sur les 28 Etats membres de l'UE sur la perception d'indépendance des tribunaux et des juges par le grand public. Seules la Bulgarie et la Slovaquie ont fait pire.
«Ca me fait très mal», affirme Celso Rodriguez Padron, juge à Madrid et porte-parole de l'Association professionnelle de magistrats. «Je peux vous garantir qu'un politicien est jugé avec exactement les mêmes critères que n'importe qui», dit-il.
Si la juge Lamela a décidé d'emprisonner des séparatistes catalans, d'autres magistrats n'ont pas hésité à placer en détention des membres du Parti populaire (PP) au pouvoir dans des affaires de corruption.
Pour Celso Rodriguez, la mauvaise perception du grand public vient du Conseil général du pouvoir judiciaire (CGPJ), puissant organe chargé de nommer les juges de la Cour suprême et les présidents des hauts tribunaux et des cours régionales. De 1980 à 1985, 12 des 20 magistrats du CGPJ étaient choisis par leurs pairs, mais ils sont dorénavant tous choisis par le parlement. (ats/nxp)
«La classe politique joue avec la justice en fonction de ses intérêts. 'Si la décision me va, je dis qu'elle est indépendante, et sinon, elle est politisée'. Et bien non», affirme Manuel Ruiz de Lara, porte-parole d'une association pour l'indépendance de la justice.
La crise en Catalogne a profondément divisé l'opinion. L'Espagne, dépeinte comme un régime autoritaire par les sécessionnistes, a été accusée de faire des «prisonniers politiques» quand une juge à Madrid a écroué deux dirigeants d'associations indépendantistes accusés de sédition.
«Pas sensés, c'est autre chose»
La semaine dernière, la même juge, Carmen Lamela, réputée dure, a envoyé en prison huit membres du gouvernement catalan destitué, motivant sa décision par le fait qu'ils risquaient de fuir comme l'ont fait M. Puigdemont et quatre de ses «ministres». «La justice espagnole a été mise au service de l'agenda politique du gouvernement», a estimé M. Puigdemont.
Mais les juges réfutent cette affirmation. «Les juges sont indépendants. Qu'ils ne soient parfois pas raisonnables ou sensés, c'est autre chose», pense Xavier Arbos, professeur de droit à l'université de Barcelone.
«Disproportionnée»
L'accusation de rébellion, qui pourrait valoir aux dirigeants séparatistes jusqu'à 25 ans de prison, est cependant contestée. Défini dans le Code pénal comme le fait de se «soulever violemment et publiquement», ce chef d'accusation est «disproportionné» selon José Maria Mena, ancien procureur général de Catalogne, dans la mesure où les indépendantistes ont toujours été pacifiques.
Le procureur général espagnol Jose Manuel Maza (photo), jugé proche du pouvoir, estime lui que les séparatistes ont intimidé et résisté aux forces de police, et que cela constitue une forme de violence. Pour M. Mena, cela revient à «convertir la pression sociale propre à toute manifestation dans un pays démocratique en intimidation, violence morale et donc rébellion».
«Le procureur général a voulu démontrer qu'il était plus dur que quiconque (...) et pensé que s'il faisait preuve d'une très grande sévérité, l'indépendantisme allait décroître, ce qui est un calcul extra judiciaire», affirme-t-il.
Mauvaise image
Au-delà de la crise catalane, la justice espagnole a depuis longtemps une mauvaise image. Dans une étude de 2017 de la Commission européenne, l'Espagne était classée 26e sur les 28 Etats membres de l'UE sur la perception d'indépendance des tribunaux et des juges par le grand public. Seules la Bulgarie et la Slovaquie ont fait pire.
«Ca me fait très mal», affirme Celso Rodriguez Padron, juge à Madrid et porte-parole de l'Association professionnelle de magistrats. «Je peux vous garantir qu'un politicien est jugé avec exactement les mêmes critères que n'importe qui», dit-il.
Si la juge Lamela a décidé d'emprisonner des séparatistes catalans, d'autres magistrats n'ont pas hésité à placer en détention des membres du Parti populaire (PP) au pouvoir dans des affaires de corruption.
Pour Celso Rodriguez, la mauvaise perception du grand public vient du Conseil général du pouvoir judiciaire (CGPJ), puissant organe chargé de nommer les juges de la Cour suprême et les présidents des hauts tribunaux et des cours régionales. De 1980 à 1985, 12 des 20 magistrats du CGPJ étaient choisis par leurs pairs, mais ils sont dorénavant tous choisis par le parlement. (ats/nxp)