De quoi le gouverneur de la région de Dakar accuse-t-il les motocyclistes ?

Lundi 8 Mai 2023

En médaillon, le gouverneur de la région de Dakar Al Hassan Sall
 
Ça commence à devenir un mauvais réflexe chez le gouverneur de Dakar. A chaque fois qu’il y a procès opposant Ousmane Sonko à Mame Mbaye Niang (et demain à Adji Sarr), Al Hassan Sall sort un arrêté pour interdire la circulation des motos. Et vu la répétition de cette décision ces derniers temps, tout porte à croire que ce sera désormais le cas chaque jour de procès. De quoi se demander ce que le  gouverneur reproche aux motocyclistes. De quoi les accuse-t-il en fin de compte ? 
 
En voilà une bonne manière de présenter tous les conducteurs de moto comme des délinquants réels ou potentiels.  Il y a certes des vols à l’arraché avec l’aide d’une moto, c’est indéniable ! Il y a sans doute d’autres actes ou activités illicites facilités par la moto. Mais ce gouverneur vit-il sur une autre planète pour ne pas savoir que l’écrasante majorité de ceux qui circulent à bord de moto sont d’honnêtes citoyens qui cherchent à vaquer tranquillement à leurs occupations.
 
Il s’agit de pères de famille qui se réveillent tôt le matin pour se livrer à des activités légales et connues afin de gagner dignement leur vie. C’est cette quoi cette stigmatisation alors ? Combien de vols sont commis avec l’aide de voiture ? On a connu des agresseurs à bord d’une 4X4 noire. Est-ce pour autant il a été interdit la circulation de toutes les 4X4 de couleur noire ?
 
Le gouverneur mesure-t-il les conséquences économiques de cette fâcheuse décision ? Si les gens prennent les motos, c’est parce que circuler à Dakar est un exercice des plus aléatoires à cause des embouteillages qui ne connaissent finalement ni jour, ni heure, ni lieu. Ce sont donc des gens qui cherchent à gagner du précieux temps pour plus d’efficacité et de productivité.
 
A côté de ceux qui se rendent au travail avec leur moto, il y a ceux-là dont la moto est l’outil même de travail. Si les premiers peuvent se rabattre sur le véhicule, les seconds n’ont pas d’alternative : c’est une journée morte. Or, combien de sociétés de livraison a-t-on actuellement à Dakar. Combien de jeunes sont employés ou s’emploient avec les fameux thiak-thiak (le transport irrégulier n’est pas à l’ordre du jour) ?
 
Si la police, la gendarmerie, les sapeurs pompiers, l’administration, les établissements publics, les entreprises, privées, les organisations… se dotent de plus en plus de motos, c’est parce que l’utilité et l’efficacité de ce moyen de transport sont largement prouvées à Dakar. Il est donc temps que le gouverneur arrête cette mauvaise habitude qui impacte des milliers de personnes. Ou alors qu’il sorte les chiffres ou arguments en sa possession et qui peuvent justifier cette mesure qui ressemble plus à un abus.
 
De toute façon, si les manifestants veulent utiliser la moto, ce n’est pas un arrêté qui les arrêtera. S’ils veulent s’approvisionner en carburant, ils n’attendront pas la veille des manifestations pour le faire, puisqu’ils savent désormais qu’il y aura interdiction. Il reste juste à regretter qu’il n’ait aucune organisation pour attaquer ce décret en justice, si tant est que la justice s’en occupera au moment opportun.
Babacar Willane
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