Des élus sur les nerfs finalisent l'acte d'accusation de Trump

Vendredi 13 Décembre 2019

 
Dans un climat acrimonieux, une commission parlementaire américaine mettait jeudi la touche finale à l'acte d'accusation de Donald Trump, avant un vote historique sur son probable renvoi en procès pour destitution.
 
Les élus de la commission judiciaire de la Chambre des représentants se sont violemment affrontés autour des deux chefs d'inculpation retenus par les démocrates contre le président: "abus de pouvoir" et "entrave à la bonne marche du Congrès".
 
Les républicains ont dénoncé d'une seule voix une "farce", une "mascarade" ou encore un "coup monté". "C'est prémédité, vous essayez de mettre le président en accusation depuis son élection!", a notamment lancé l'élue Debbie Lesko.
 
Face à ce feu nourri, le chef démocrate de la commission, Jerry Nadler, a imploré ses collègues républicains de "ne pas justifier un comportement" dont ils savent "au fond de leur coeur qu'il est mauvais".
 
Comme chaque camp reste soudé, Donald Trump est quasi assuré d'être mis en accusation à la chambre basse, où les démocrates disposent d'une majorité confortable, puis acquitté au Sénat, contrôlé par les républicains.
 
Même s'il a de grandes chances d'échapper in fine à une destitution, sans doute dès janvier, sa mise en accusation au Congrès laissera une marque sur son bilan et ternira sa campagne de réélection.
 
Avant lui, seuls deux présidents américains, Andrew Johnson en 1868 et Bill Clinton en 1998, ont vécu une telle épreuve. Mis en cause dans le scandale d'espionnage politique du "Watergate", le républicain Richard Nixon avait démissionné en 1974 pour éviter cet "impeachment".
 
- "Dictateur" -
 
Donald Trump est dans la tourmente pour avoir demandé à l'Ukraine d'enquêter sur le démocrate Joe Biden, bien placé pour l'affronter lors de la présidentielle de 2020, et sur les affaires de son fils Hunter dans ce pays.
 
Or, une aide militaire cruciale pour Kiev, en conflit armé avec la Russie, avait été bloquée quelques jours avant cet appel, sans explication.
 
De ces faits incontestés, démocrates et républicains tirent des conclusions aux antipodes.
Pour les premiers, Donald Trump a commis un "abus de pouvoir" à des fins personnelles, mettant en jeu l'intégrité des élections et la sécurité des Etats-Unis.
 
Les démocrates lui reprochent aussi d'avoir "entravé" le travail du Congrès en refusant de participer à leur enquête.
 
Jugeant la procédure "inconstitutionnelle", la Maison Blanche a en effet interdit à des conseillers du président de témoigner ou de fournir des documents réclamés par la Chambre.
 
"Personne n'est au-dessus des lois", a martelé jeudi la chef des démocrates au Congrès, Nancy Pelosi, en assurant que les pères fondateurs des Etats-Unis ne voulaient pas d'un "président-roi".
 
"Aucun président n'est censé être un dictateur aux Etats-Unis", a renchéri Jerry Nadler.
 
- "Infamie" -
 
Donald Trump et ses partisans jurent de leur côté qu'il n'y a eu "aucune pression" exercée sur l'Ukraine et que les demandes d'enquête étaient légitimes pour lutter contre des soupçons de "corruption".
 
Selon eux, Hunter Biden a été employé par le groupe gazier ukrainien Burisma uniquement parce que son père était à l'époque vice-président des Etats-Unis.
 
Fidèle à cette ligne de défense, l'élu républicain Matt Gaetz a proposé jeudi d'amender l'acte d'accusation pour introduire une référence à "l'embauche corrompue d'Hunter Biden" par Burisma, avant de disserter sur les problèmes d'addiction de ce dernier.
Son texte, comme d'autres amendements républicains, a été rejeté dans l'après-midi.
 
Ces manoeuvres procédurales se sont accompagnées de déclarations grandiloquentes. Ce jour restera marqué du sceau de "l'infamie", a ainsi tonné le républicain Louie Gohmert, tandis que le démocrate Hank Johnson en appelait à "la conscience" de ses rivaux.
 
Ces échanges n'ont pas échappé à Donald Trump, qui a tweeté ou retweeté environ 80 messages sur la procédure de destitution, rien que dans la matinée.
 
Une fois le texte finalisé, la commission judiciaire passera au vote. L'acte d'accusation sera ensuite transmis en vue de son adoption en séance plénière à la Chambre, sans doute la semaine prochaine.
 
L'impact de cette procédure sur l'opinion est incertain: selon la moyenne des sondages établie par le site FiveThirtyEight, 47,3% des Américains soutiennent une destitution de Donald Trump et 45,9% sont contre.

 
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