Une équipe de l'ONU a dit avoir constaté "un grand nombre" de blessures par balles dans un hôpital de Gaza après que des soldats israéliens ont tiré sur la foule près d'un convoi d'aide humanitaire, un drame qui met en évidence une situation désespérée dans le territoire palestinien.
Samedi, l'armée israélienne a poursuivi ses frappes meurtrières contre la bande de Gaza qui ont fait au moins 92 morts ces dernières 24 heures, d'après le ministère de la Santé du mouvement islamiste palestinien Hamas.
Et les Etats-Unis ont annoncé leur intention de se joindre aux largages d'aide sur le territoire palestinien assiégé, menacé de famine et bombardé sans répit par Israël depuis le début de la guerre il y a près de cinq mois contre le Hamas, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007.
Jeudi, une distribution d'aide à Gaza a tourné au drame après des tirs israéliens sur une foule affamée qui s'est ruée sur les camions d'aide humanitaire et une bousculade qui ont fait 115 morts, selon le Hamas.
Une équipe de l'ONU s'est rendue le lendemain à l'hôpital al-Chifa de Gaza, qui a accueilli des dizaines de blessés après la tragédie. Ils ont vu "un grand nombre de blessures par balles", a indiqué un porte-parole de l'ONU, Stéphane Dujarric.
La communauté internationale a réclamé une enquête sur ce drame et un cessez-le-feu immédiat dans la guerre déclenchée par une attaque sanglante menée le 7 octobre dans le sud d'Israël par des commandos du Hamas infiltrés depuis la bande de Gaza voisine.
Israël, qui a juré d'anéantir le Hamas qu'il considère comme une organisation terroriste, de même que les Etats-Unis et l'Union européenne, a poursuivi ses bombardements, surtout à Khan Younès et Rafah dans le sud, selon des correspondants de l'AFP.
Parmi les morts samedi dans les bombardements israéliens figurent des femmes et des enfants, a précisé le ministère de la Santé du Hamas, alors que le bilan de la guerre à Gaza ne cesse de s'alourdir avec un total de 30.320 morts, selon la même source.
- "Tout le monde a faim" -
Depuis le 7 octobre, l'armée israélienne pilonne sans répit cette bande de terre d'environ 40 km de long et 10 de large. Le 27 octobre, ses soldats y ont lancé une opération terrestre dans le nord, qui s'est progressivement étendue jusque dans le sud.
Durant l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre, au moins 1.160 personnes, en majorité des civils, ont été tuées, selon un décompte de l'AFP à partir de données officielles israéliennes.
Environ 250 personnes ont été enlevées. Selon Israël, 130 otages sont encore retenus à Gaza dont 31 seraient morts, après la libération de 105 otages en échange de 240 détenus palestiniens lors d'une trêve fin novembre.
Cette guerre a provoqué une catastrophe humanitaire dans le territoire palestinien où 2,2 millions des 2,4 millions d'habitants sont menacés de famine, d'après l'ONU.
Près de 1,5 million de Palestiniens s'entassent à Rafah, en grande majorité des déplacés piégés contre la frontière fermée avec l'Egypte, qui craignent une offensive terrestre israélienne.
"Nous avons reçu deux sacs de farine de l'aide arrivée le jour du massacre à Gaza jeudi", a déclaré Hicham Abou Eïd, un habitant de 28 ans du quartier de Zeitoun: "Cela ne suffit pas. Tout le monde a faim. L'aide est rare et insuffisante."
- "Insister auprès d'Israël" -
Vendredi, le président américain, Joe Biden, a annoncé que son pays participerait "dans les prochains jours" aux largages d'aide humanitaire sur Gaza.
Plusieurs pays y ont parachuté des cargaisons ces derniers jours, notamment la Jordanie avec le soutien de la France, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, ainsi que l'Egypte en coopération avec les Emirats arabes unis.
"Les largages aériens ne peuvent pas et ne doivent pas se substituer à l'accès humanitaire", a néanmoins averti l'ONG International Rescue Committee (IRC).
Mais les cargaisons par voie terrestre, soumises au feu vert d'Israël qui impose un blocus à Gaza depuis 2007, n'arrivent qu'en quantité très limitée via Rafah depuis l'Egypte.
Et leur acheminement notamment dans le nord du territoire est périlleux en raison des combats, des bombardements israéliens, des décombres bloquant des routes et parfois de pillages.
"Nous allons insister auprès d'Israël pour qu'il facilite l'entrée de davantage de camions (...) Il n'y a vraiment pas assez d'aide qui arrive à Gaza", a dit Joe Biden.
- Biden prudent -
"Les responsabilités sur le blocage de l'aide sont clairement israéliennes", a affirmé le chef de la diplomatie française, Stéphane Séjourné, en parlant "de situations indéfendables et injustifiables dont les Israéliens sont comptables".
"La famine ajoute à l'horreur", a-t-il dit dans un entretien publié samedi.
Le même jour, le chef de l'Union africaine, Moussa Faki Mahamat, a accusé Israël d'un "massacre massif de Palestiniens" lors du drame de jeudi et appelé à une enquête internationale.
Les opérations militaires israéliennes et les pénuries ont mis à genoux le système de santé palestinien. Dix enfants sont morts de "malnutrition et de déshydratation" ces derniers jours, a affirmé vendredi le ministère de la Santé du Hamas.
La tragédie de Gaza a aussi porté un coup aux efforts des médiateurs -- Qatar, Etats-Unis, Egypte -- qui tentent d'arracher un compromis sur une trêve associée à de nouvelles libérations d'otages.
M. Biden s'est voulu prudent en répétant vendredi "espérer" une trêve d'ici au ramadan, mois sacré du jeûne pour les musulmans qui commence cette année le soir du 10 mars ou le 11.
"Nous allons y arriver, mais on n'y est pas encore, et on pourrait ne pas y parvenir", a-t-il dit. [AFP]