Hong Kong: la contestation continue, une ministre en visite à Londres agressée

Vendredi 15 Novembre 2019

Des milliers de manifestants pro-démocratie ont défilé vendredi à Hong Kong malgré une mise en garde du président chinois Xi Jinping, alors que la crise s'est propagée jusqu'à Londres où une ministre hongkongaise a été prise à partie.
 
Pékin a vivement réagi vendredi à cette agression commise la veille au soir par des manifestants masqués, accusant de nouveau l'ex-puissance coloniale britannique de "jeter de l'huile sur le feu" à Hong Kong.
 
A Hong Kong, des protestataires en noir occupaient toujours vendredi plusieurs campus. Pour le cinquième jour d'affilée, le casse-tête des employés se rendant au travail s'est répété, mission quasi impossible dans cette ville si les routes sont bloquées et les transports en commun à l'arrêt.
 
La région semi-autonome vit depuis cinq mois sa pire crise politique depuis sa rétrocession en 1997. La mobilisation est montée d'un cran lundi, avec le début d'une opération continue de blocage de très grande ampleur.
 
Les organisateurs de Clockenflap, principal festival de musique local, ont annoncé vendredi l'annulation de l'édition 2019, prévue du 22 au 24 novembre, "en raison de l'escalade de la crise cette semaine et de l'incertitude créée pour les semaines à venir".
 
Des dizaines de milliers de fans participent chaque année à ce festival, dernier en date des événements annulés ou reportés dans le territoire avec la crise.
 
- "Agression barbare" -
 
Jeudi soir, la contestation s'est déportée à des milliers de kilomètres, lorsque des manifestants ont violemment pris à partie à Londres la ministre hongkongaise de la Justice Teresa Cheng, qui est même tombée à terre.
 
La cheffe de l'exécutif hongkongais, Carrie Lam, a condamné vendredi une "agression barbare". Le porte-parole de la diplomatie chinoise Geng Shuang est aussi monté au créneau.
 
"Nous exigeons du Royaume-Uni qu'il enquête immédiatement sur les faits, fasse le maximum pour en arrêter les auteurs, les défère à la justice et garantisse la sécurité et la dignité de tous les fonctionnaires chinois", a-t-il dit devant la presse.
 
Réitérant des accusations déjà lancées, il a poursuivi: "si la Grande-Bretagne ne change pas de comportement, si elle continue à jeter de l'huile sur le feu, à semer la discorde et à inciter (au désordre), elle attirera la foudre sur elle-même".
 
A Londres, la police britannique a indiqué avoir ouvert une enquête sur l'agression d'"une femme", conduite à l'hôpital "pour une blessure au bras", sans confirmer l'identité de Mme Cheng. Le Chartered Institute of Arbitrators, devant lequel elle devait donner une conférence, a annulé l'événement, déclarant que "Mme Cheng a été agressée par la foule alors qu'elle s'apprêtait à entrer dans notre immeuble" et "souffre d'une blessure au bras".
 
- Nouvelle stratégie -
 
Pendant des mois, les actions des manifestants à Hong Kong avaient été principalement menées les soirs et week-ends, ce qui permettait au territoire de 7,5 millions d'habitants de fonctionner relativement normalement en journée.
 
En l'absence de concessions de l'exécutif pro-Pékin, les manifestants ont opté pour une nouvelle stratégie, "Eclore partout" ("Blossom Everywhere"), consistant à multiplier les blocages simultanés pour éprouver au maximum les capacités de la police.
 
L'impact a été immédiat, entravant les déplacements des habitants. La violence est également montée, avec deux décès en une semaine liés aux manifestations.
 
La mobilisation, caractérisée jusqu'alors par sa fluidité, s'est ainsi "sédentarisée" et cristallisée notamment sur des campus universitaires.
 
Vendredi, des milliers d'employés ont à nouveau profité de leur pause déjeuner pour défiler dans le quartier de Central en soutien aux manifestants.
 
- "Restaurer l'ordre" -
 
La mobilisation était née du rejet d'un projet de loi visant à autoriser les extraditions vers la Chine. Il a été retiré en septembre mais la contestation avait entretemps considérablement élargi ses revendications.
 
Jeudi, Xi Jinping a prévenu que les "activités illégales violentes (...) remettent gravement en cause le principe +Un pays, deux systèmes+".
 
"Mettre fin aux violences et au chaos et restaurer l'ordre est la tâche la plus urgente à accomplir", a-t-il ajouté selon des propos tenus au cours d'un sommet à Brasilia et reproduits par le Quotidien du Peuple, l'organe de presse officiel du Parti communiste chinois.
 
L'aggravation de la crise a fait craindre à certains que Pékin perde patience et soit tenté d'envoyer ses troupes à Hong Kong.
 
Le tabloïd en langue anglaise Global Times, proche du pouvoir chinois, a alimenté jeudi ces inquiétudes en annonçant que l'exécutif hongkongais allait "annoncer" un couvre-feu pour le week-end. Mais le journal a supprimé son tweet une demi-heure plus tard.
 
Le gouvernement de Hong Kong a affirmé que cette rumeur était "totalement sans fondement". Mais d'autres médias chinois y sont allés vendredi de leurs pressions en exhortant le gouvernement à agir et en avançant que le couvre-feu restait une possibilité.
 
"On attend de voir si le couvre-feu sera imposé, mais la fermeté est indéniablement de mise", peut-on lire dans le China Daily alors que plusieurs médias dénoncent l'aggravation des violences.
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