Imam Assane Seck : « Le carnet d’un séjour agréable et instructif au Nigeria, pays du Cheikh Ousmane Dan Fodio, un réformateur exceptionnel »

Mercredi 15 Janvier 2020

 
 
Du 29 décembre 2019 au 06 janvier 2020, j'étais au nord du Nigéria, précisément à Sokoto, capitale historique de très vastes empires islamiques fondée par Cheikh Ousmane Dan Fodio au 18e siècle.
 
D'Abuja à Sokoto, une distance de 500 kilomètres, j'ai préféré voyager par la route pour mieux explorer, de visu, les traces de l'action de ce réformateur africain exceptionnel sur la vie duquel j'ai écrit un livre en arabe.
 
Au cours de cette pérégrination, comme lors de mes autres déplacements dans cette partie du Nigeria, j'ai vu un territoire profondément marqué par l'Islam. Par exemple, il est impossible de voir une femme non voilée. Elles portent toutes un large Jilbab rabattu sur leur corps. Cela est en parfaite adéquation avec l'action réformatrice du Cheikh Ousmane Dan Fodio qui s'occupait de la valorisation de la femme, surtout dans le domaine de l’habillement et de la recherche du savoir. Une orientation qui le mit en opposition d'ailleurs avec les courants religieux qui voulaient cloîtrer les femmes dans une perpétuelle ignorance. Son petit frère, Abdoulah, a même écrit un poème en arabe très judicieux allant dans la direction lucide et sensée qui était la sienne. Ses filles, notamment et surtout Asma, écrivaine en arabe, haoussa et pular, sont une illustration pertinente de son action dans ce domaine stratégique pour l’islam.
 
Dans cette localité du Nigeria, une histoire montre le caractère prédominant de l'Islam. A notre arrivée à l'entrée de la ville de Sokoto, il y avait dans notre voiture un jeune homme dont la coiffure est appelée ici «zoulou», portant des bracelets en plastique aux poignets. Alors, la police l'a immédiatement interpellé car cette coiffure et le port de bracelets sont contraires aux enseignements de l'Islam tels qu'écrits par Ousmane Dan Fodio dans un ouvrage intitulé «La revivification de la sunna et l'extinction des biddas». Avant d’avoir repris place dans la voiture, le jeune homme a dû se couvrir la tête par un bonnet et enlever ses bracelets…
 
D'un autre côté, ce voyage a été très agréable car j'ai été choyé, comme un prince, chez le ministre de Sokoto qui est la deuxième personnalité de l'Etat, l'éminent Professeur Sambou Walliyou Jounaïd, petit-fils du Cheikh Ousmane Dan Fodio et qui m'avait mis en contact avec d'autres petits-fils, émirs, savants et dignitaires de Sokoto. Il m'a fait visiter les sites et les mausolées les plus remarquables de la localité.
 
Par ailleurs, cette visite a été particulièrement fructueuse sur le plan intellectuel car elle m'a permis d'échanger directement avec les membres de la famille du Cheikh Ousmane Dan Fodio sur ce que j'ai écrit concernant la vie de leur grand-père. Et à la suite de ces échanges, ils m'ont fourni beaucoup d'écrits sur la biographie de ce cheikh, ses propres livres ainsi que ceux de son frère Abdalah, de son fils Mouhamad Bélo, de sa fille Asma et d'autres de ses fils, petits-fils et disciples vivants ou morts.
 
En effet, j'ai ramené de ce voyage plus de cent livres rares et de très haute facture. Dans le lot, il y a deux exégèses du Coran écrits par son petit-frère Abdalah : l'une est composée de quatre grands volumes et l'autre de deux volumes. En plus de trois autres collections dont l'une est composée de trois grands volumes écrits par ce même Abdalah contenant 34 sur plus de deux cent livres qu'il a écrits. Quant à la deuxième collection écrite par Ousmane Dan Fodio, elle est aussi composée de trois grands volumes et contient 42 livres sur les 115 livres qu'il a écrits. La troisième collection comprend deux grands volumes écrites par Mouhamad Bello, elle contient 14 sur les cent vingt qu'il a écrits portant sur de très différentes spécialités.
 
Il faut ajouter à cela un livre écrit par sa fille Asma en prose et en poème dans trois langues que sont l'arabe, le haoussa et le pular.
 
Il faut rappeler enfin que cette personnalité multidimensionnelle a des origines sénégalaises car c'est son dixième grand-père qui aurait émigré du Fouta Toro du Sénégal vers les pays arabes, dans son plan initial, avant de finir par s'installer au pays des haoussas au nord de l'actuel Nigéria.
 
Imam Assane SECK
Directeur du Centre de l’initiative intellectuelle
Pour la traduction et la sensibilisation islamique
Email : seck93@yahoo.fr
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