Installation chaotique du nouveau président de l’Assemblée nationale, la gendarmerie au cœur de l’hémicycle

Mardi 13 Septembre 2022

Sur les 165 députés élus aux législatives du 31 juillet 2022, seuls 83 d'entre eux ont participé à l'élection du nouveau président de l'Assemblée nationale. Les 80 députés de l'opposition Yewwi-Wallu ont boycotté le vote pour dénoncer la présence de députés qui sont en même temps ministres non démissionnaires.


C’est dans une ambiance totalement chaotique que s’est déroulé l’élection du nouveau président de l’Assemblée nationale du Sénégal. Assis sur son pupitre alors que le milieu de l’hémicycle est quadrillé par une forte colonie de gendarmes, Amadou Mame Diop a délivré ses premiers mots à l’endroit de ses collègues.
 
Directeur général de la SAPCO, la société en charge de la mise en valeur de la Petite côte, et maire de la cité industrielle de Richard-Toll dans le nord du pays, Diop est devenu député lors des législatives du 31 juillet dernier. C’est la botte secrète que le président Macky Sall a sorti au dernier moment pour en faire la deuxième personnalité de l’Etat et de la République. Mais avec des dégâts dont la coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY) pourrait pâtir suite au clash d’Aminata Touré (voir par ailleurs).
 
Avant l’élection du président de l’Assemblée nationale, des heurts, scènes de violences et autres altercations ont longtemps occupé les députés de l’inter-coalition d’opposition Yewwi-Wallu à ceux de Benno Bokk Yaakaar. Ces divergences ont notamment porté sur la présence dans le groupe BBY de plusieurs députés élus en juillet dernier mais qui sont en même temps ministres non démissionnaires. L’opposition a alors exigé qu’ils ne puissent pas prendre part au vote alors que, en face, on brandissait la loi qui leur donne huit jours pour acter leur démission.
 
Sur la base de l’article 54 de la Constitution (alinéa 2), l’opposition a peut-être raison car ledit texte stipule : « le député membre du gouvernement ne peut siéger à l’assemblée nationale pendant la durée de ses fonctions ministérielles. » Ils peuvent être confortés également par le Règlement intérieur de l’Assemblée nationale dont l’article 109 indique : « le mandat de député est incompatible avec la qualité de membre du gouvernement. »
 
Cependant, cette même opposition peut avoir tort si l’on prend en compte le Code électoral avec son article 172 qui semble donner sens aux deux dispositions mentionnées ci-dessus.
 
« Le député qui, lors de son élection, se trouve dans l'un des cas d'incompatibilité visés au présent chapitre, est tenu d'établir dans les huit (8) jours qui suivent son entrée en fonction qu'il s'est démis de ces fonctions incompatibles avec son mandat, ou qu'il ne se trouve plus dans la situation d'actionnaire majoritaire déclarée incompatible en vertu des articles LO.166 et LO.168 ou, s'il est titulaire d'un emploi public, qu'il a demandé à être placé dans la position spéciale prévue par son statut. »

C’est ce point de crispation qui a fait dégénérer la situation, entraînant ensuite le recours aux gendarmes venus en masse pour encadrer le vote au terme duquel Amadou Mame Diop a été élu au perchoir pour succéder à Moustapha Niasse.
 
Dans leur logique, les députés de l’opposition ont boycotté le scrutin dirigé par Aïda Sow Diawara (BBY) en sa qualité de doyenne de la nouvelle assemblée nationale.
 
Nombre de lectures : 316 fois