L’armée israélienne a dit mercredi préparer « une possible entrée » au Liban pour y frapper le Hezbollah, contre lequel son aviation mène de nouvelles frappes meurtrières, après l’interception d’un missile tiré sur Tel-Aviv, au moment où la communauté internationale redoute un embrasement du Moyen-Orient. Une invasion terrestre en quelque sorte.
« Nous attaquons toute la journée, à la fois pour préparer la zone à la possibilité de votre entrée, mais aussi pour continuer à frapper le Hezbollah », a déclaré à des soldats le chef d’état-major de l’armée israélienne, le général Herzi Halevia, lors d’un exercice à la frontière avec le Liban.
Dans l’immédiat, l’armée a annoncé poursuivre ses bombardements « de grande envergure » dans le sud et l’est du Liban, deux bastions du mouvement islamiste soutenu par l’Iran, au troisième jour de frappes massives qui ont jeté plus de 90 000 Libanais sur les routes, dont beaucoup déjà déplacées une première fois depuis octobre, selon l’ONU.
À travers le pays, 51 personnes ont été tuées et plus de 220 blessées, selon les autorités libanaises, lors de ces frappes qui ont aussi visé des villages situés hors des fiefs du Hezbollah, dont celui de Maaysara, dans une région montagneuse au nord de Beyrouth.
L’armée israélienne a affirmé avoir frappé plus de 280 cibles du Hezbollah, dont 60 de ses services de renseignement.
Lundi, ses frappes avaient fait 558 morts, dont des femmes et enfants, et plus de 1800 blessés, selon les autorités libanaises, le bilan le plus lourd en une journée depuis la fin de la guerre civile dans ce pays (1975-1990).
« Climat de terreur »
Nour Hamad, 22 ans, une étudiante de Baalbeck, dans l’est, décrit « un climat de terreur » depuis le début des frappes qui ont visé les environs de la ville.
« Nous étions dehors avec mes sœurs et des cousins, quand des avions ont frappé tout d’un coup », relate à l’hôpital de Baalbeck, Zeinab al-Moussawi, une habitante du secteur, blessée la veille. « Il y avait des restes humains, mes cousins, tout autour de nous, et la maison a été détruite », dit-elle.
À Maaysara, un photographe de l’AFP a vu une maison presque entièrement détruite, où les secouristes fouillaient les décombres.
Le mouvement libanais a affirmé qu’il s’agissait d’un missile Qader visant le quartier général du Mossad, les services de renseignements extérieurs israéliens, accusé « de l’assassinat des dirigeants » du Hezbollah « et des explosions des bipeurs et des talkies-walkies » ces derniers jours.
« Les roquettes sont effrayantes, stressantes. Je ne pense pas que quiconque au monde aimerait vivre cela », témoigne Hedva Fadlon, une habitante de Tel-Aviv de 61 ans.
« Poursuivre le combat »
Selon le gouvernement israélien, 9360 roquettes et missiles ont jusque là été tirées sur Israël depuis que le Hezbollah a ouvert un front contre le pays en soutien à son allié palestinien du Hamas, au début de la guerre à Gaza.
La Maison-Blanche a qualifié de « vivement inquiétante » cette attaque, avant une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU qui doit être consacrée au Liban.
L’armée israélienne a annoncé mercredi le rappel de deux brigades de réserve qui vont être déployées dans le nord, afin de « poursuivre le combat » contre le Hezbollah.
Mardi, l’ambassadeur israélien à l’ONU, Danny Danon a toutefois assuré qu’Israël n’avait « aucun désir » d’invasion terrestre du pays voisin.
« Israël pousse la région vers une guerre ouverte », ont averti les chefs de la diplomatie d’Égypte, d’Irak et de Jordanie.
Le chef de l’Unrwa, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, Philippe Lazzarini, a dit craindre « une guerre à part entière » et que le Liban devienne comme la bande de Gaza, où la guerre a été déclenchée le 7 octobre 2023 par l’attaque sans précédent du mouvement islamiste Hamas contre Israël.
« Guerre généralisée »
Israël affirme avoir déplacé le « centre de gravité » de la guerre vers le nord du pays, le long de la frontière libanaise, pour permettre le retour de dizaines de milliers d’habitants déplacés par les tirs de roquettes du Hezbollah.
Le puissant mouvement libanais, allié du Hamas, a de son côté juré de continuer à attaquer Israël « jusqu’à la fin de l’agression à Gaza ».
Les tirs transfrontaliers ont gagné en intensité depuis la vague d’explosions meurtrières des appareils de transmission du Hezbollah, attribuée à Israël, les 17 et 18 septembre au Liban, puis une frappe israélienne le 20 septembre sur la banlieue sud de Beyrouth, qui a décapité l’unité d’élite du mouvement.
Le Hezbollah a confirmé mercredi la mort d’un de ses responsables militaires, Ibrahim Mohammed Kobeissi, dans un bombardement israélien la veille sur la banlieue sud de Beyrouth.
Le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a assuré que l’assassinat récent au Liban de plusieurs commandants du Hezbollah par Israël ne mettrait pas « à genoux » le mouvement.
À la tribune de l’ONU, le président américain Joe Biden a mis en garde mardi contre une « guerre généralisée » au Liban et estimé qu’il était « temps de finaliser maintenant » un accord de cessez-le-feu à Gaza. [AVEC AFP]