L'armée russe expose ses forces aux portes de l'Otan

Jeudi 14 Septembre 2017

La Russie a lancé jeudi aux portes de l'Union européenne de vastes manoeuvres militaires conjointes avec le Bélarus, assurant qu'elles n'étaient dirigées "contre aucun pays" malgré les craintes de certains alliés de l'Otan.

Moscou s'efforce de rassurer sur ces exercices, nommés Zapad-2017 ("Ouest-2017"), et qui doivent impliquer selon elle près de 12.700 soldats pendant une semaine près de la frontière avec la Lituanie et la Pologne, bien plus selon certains pays voisins qui crient à la provocation.

Dans le communiqué annonçant le début des manoeuvres jeudi, le ministère de la Défense a souligné qu'elles présentaient "un caractère purement défensif et (n'étaient) dirigées contre aucun pays en particulier".

L'armée russe organise tous les ans à cette période des exercices d'ampleur dans une région différente de Russie. Cette année, elles ont lieu au Bélarus, pays allié, dans l'enclave russe de Kaliningrad et dans plusieurs régions du nord-ouest de la Russie.

Autrement dit, près de la Pologne et des pays baltes qui, depuis l'annexion de la Crimée en 2014 et l'éclatement du conflit dans l'est de l'Ukraine, ont été plus prompts à dénoncer Moscou comme une menace potentielle à leur souveraineté.

"Le scénario des exercices prouve que la Russie a l'intention de menacer et d'intimider. La concentration excessive de forces armées à nos frontières augmente également le risque d'incidents", a déclaré à l'AFP la présidente lituanienne Dalia Grybauskaite.

Le ministre des Affaires étrangères letton, Edgars Rinkevics, a indiqué pour sa part ne pas y voir de "menace militaire directe" ou de "provocation", mais dit craindre des "tentatives de tester les défenses de l'Otan d'une manière non militaire, comme par exemple notre cyberdéfense".

- Guerre des chiffres -

Certains pays, la Lituanie et l'Estonie en tête, doutent des chiffres avancés par l'état-major russe pour ses exercices militaires et évoquent plus de 100.000 soldats mobilisés du 14 au 20 septembre.

Selon le cabinet spécialisé dans les questions de défense IHS Jane's, "les chiffres réels sont probablement plus élevés" que les chiffres officiels, car les manoeuvres impliquent non seulement des militaires mais aussi des membres des services de renseignement, de la Garde nationale, des services de secours et autres, susceptibles de faire monter le nombre de personnes impliquées autour de "80.000 à 100.000".

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a balayé les critiques jeudi, assurant que la Russie avait fait preuve "du niveau maximum de transparence possible" pour ces exercices, menés "en accord avec le droit international et les normes en vigueur".

La Russie revendique son droit à mener des exercices militaires sur son territoire et dénonce en retour l'expansion de l'Otan à ses frontières, l'Alliance disposant désormais de plus de 4.000 soldats déployés dans les pays baltes et en Pologne.

Dans un entretien à l'agence russe Ria-Novosti publié jeudi, Jens Stoltenberg, s'est montré conciliant: "L'Otan ne veut pas d'une nouvelle Guerre froide, ni d'une nouvelle course aux armements", a assuré le secrétaire général de l'Alliance atlantique, promettant de "continuer à s'efforcer d'améliorer les relations avec la Russie".

Alimentant le climat de tensions, les exercices russes se déroulent en outre au même moment que des exercices en Ukraine impliquant l'armée américaine -- dont des soldats avaient déjà défilé en août pour la première fois à Kiev -- et des manoeuvres en Suède mobilisant près de 19.000 soldats et simulant une attaque fictive venue d'un "opposant plus grand et sophistiqué".

Le scénario des manoeuvres russes implique quant à lui de lutter contre des "groupes extrémistes" ayant infiltré le Bélarus et Kaliningrad depuis trois pays imaginaires mais aisément identifiable comme la Lituanie, la Lettonie et la Pologne.

"Tous les exercices russes travaillent sur le même scénario: le déploiement rapide de troupes", censé démontrer la détermination de l'armée à repousser l'ennemi mais sans envisager une attaque initiée par la Russie, explique l'expert militaire Alexandre Golts.

Au delà des exercices Zapad-2017, l'armée russe et l'Alliance s'accusent mutuellement régulièrement de surenchère et de manoeuvres dangereuses entre leurs navires et leurs avions en Méditerranée et dans la Baltique.

Dès la fin 2014, le président russe Vladimir Poutine avait entériné une nouvelle doctrine militaire qui faisait figurer l'Otan comme menace fondamentale pour son pays.
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