La radicalisation du mouvement «anti-corona» inquiète l’Allemagne

Dimanche 30 Aout 2020

 
Plusieurs dirigeants allemands ont dénoncé dimanche une «atteinte à la démocratie». Ils s’exprimaient après une tentative de prise d’assaut du Parlement lors d’une manifestation «anti-corona» qui a marqué une nouvelle étape dans la radicalisation du mouvement.
 
Les images samedi soir montrant plusieurs centaines de protestataires forcer un barrage de police pour monter sur les marches du célèbre bâtiment du Reichstag à Berlin, où siègent les députés, et tenter d’y pénétrer, ont créé une onde de choc en Allemagne.
 
Cet incident a été le point d’orgue d’une manifestation d’«anti-masques» qui a rassemblé près de 40’000 personnes protestant contre les restrictions liées à la pandémie de Covid-19 et s’est soldée par environ 300 interpellations lors d’échauffourées avec la police.
 
«Coeur de la démocratie» visé
 
Le président allemand Frank-Walter Steinmeier s’est élevé contre une «attaque insupportable visant le cœur de notre démocratie». Il a dénoncé «les outrances d’extrême droite» ainsi que les «drapeaux du Reich» allemand aux couleurs noire, blanche et rouge brandis par les manifestants en souvenir de l’Empire ayant disparu en 1919 après la Première guerre mondiale.
 
«Nous n’accepterons jamais cela», a ajouté M. Steinmeier, considéré comme la caution morale du pays. La ministre de la Justice, Christina Lambrecht, a appelé elle à «se défendre contre ces ennemis de notre démocratie», alors qu’un débat est lancé sur l’opportunité de continuer à autoriser ce type de manifestations.
 
«L’image insupportable de néonazis devant le Reichstag (…) ne peut pas se répéter», a-t-elle dit au groupe de presse régionale Funke. Son collègue de l’Intérieur Horst Seehofer a parlé d’un dérapage «inacceptable». «Il faut stopper le virus brun!» titre dimanche «Bild», journal le plus lu d’Allemagne.
 
Stoppés de justesse
 
Les manifestants ont été empêchés de justesse samedi soir de pénétrer dans l’enceinte du bâtiment par les forces de l’ordre, qui ont utilisé des sprays pour disperser la foule et interpellé plusieurs personnes. La police a paru un moment débordée, avec seulement une poignée d’agents tentant de bloquer la foule.
 
Le Reichstag, où se réunissent les députés allemands en session plénière, a une forte charge symbolique en Allemagne. Le bâtiment et sa célèbre coupole avaient été incendiés en 1933 par les nazis, dans un acte perçu comme destiné à mettre à genoux ce qui restait de la démocratie allemande de l’entre-deux-guerres.
 
Rassemblement autorisé par la justice
 
La municipalité de Berlin avait tenté d’interdire le rassemblement de samedi, en arguant de l’impossibilité de faire respecter les distances de sécurité et gestes barrière, vu le nombre de personnes annoncées. Mais la justice, saisie par les organisateurs, a finalement autorisé la manifestation.
 
Les manifestants s’étaient réunis pour dénoncer les mesures imposées en raison de la pandémie, qu’ils perçoivent comme une atteinte à leurs libertés. Plusieurs autres rassemblements similaires, mais moins importants, ont eu lieu en Europe, y compris en Suisse.
 
Extrême droite mobilisée
 
Celui de Berlin est intervenu deux jours après l’annonce par le gouvernement d’Angela Merkel de nouvelles restrictions face à la recrudescence observée des infections.
 
La foule était comme souvent dans ce type de rassemblements hétéroclite composée de militants anti-vaccin, de complotistes, de citoyens authentiquement préoccupés par les restrictions liées à la pandémie mais aussi, et de plus en plus selon les autorités, de sympathisants d’extrême droite.
 
Nouvelle manifestation dimanche
 
Une nouvelle manifestation s’est tenue dimanche à Berlin pour protester contre les mesures prises en Allemagne contre le coronavirus, mais de moindre ampleur. Elle a rassemblé quelque 2000 personnes dans le parc Grosser Tiergarten, dans le centre de la capitale.
 
La manifestation a été dispersée par la police pour non-respect de la distanciation physique. Les manifestants se sont ensuite déplacés vers la porte de Brandebourg. (ATS/NXP)
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