Il y a 32 ans, jour pour jour, le Pr cheikh Anta Diop nous quittait pour sa dernière demeure. Ce savant d’une époque désormais révolue. Ce défenseur de la dignité de l’homme africain n’est pas de ceux dont on peut ranger aux oubliettes. Il fût né un 29 Décembre 1923 à Thièytou, un village situé au cœur du BAOL. Son père MASSAMBA SASSOUM meurt quelques temps après la naissance de son fils que le monde connaitra non pas par sa longévité (il est mort à sa 63ième année) mais de par ses idées combien révolutionnaires. Sa mère MAGATTE DIOP vivra jusqu’en 1984.
Après un parcours scolaire remarquable entre son Baol natal, Saint Louis et Dakar, sanctionné par ses deux baccalauréats en 1945, il débarque à Paris en avril 1946 pour ses études universitaires. Pour ne pas perdre de temps, il s’inscrit dès son arrivée en Physique Chimie, discipline à l’époque très peu pratiquée par les étudiants africains. Et en vrai rat de bibliothèque, il se consacre à la lecture profonde et méticuleuse des auteurs anciens.
Il s’orienta aussi vers les études de lettres et de sciences humaines et s’y engagea avec passion et détermination. En 1949, cheikh Anta procédait au dépôt des exemplaires de sa thèse de doctorat ès lettres et sciences humaines. Mais cette thèse ne sera jamais soutenue. C’est la fameuse thèse que les docteurs de la Sorbonne n’ont pas pu assumer. Parce que tant les idées qu’elle développait étaient tellement transgressives et novatrices à l’époque.
En effet l’idée de l’antériorité historique de l’Afrique et de sa civilisation ayant fleuri dans le berceau égypto-nubien était impensable. Il se remet au travail et se présenta à nouveau à la Sorbonne le 09 janvier 1960. Le candidat DIOP se battait et répondait avec vivacité et aisance aux questions des membres du jury. Mais à la fin des discussions anormalement longues (13H:30 19H:50) le jury jugea son travail insuffisant et lui donna la MENTION HONORABLE. Ce qui était synonyme d’interdiction d’exercer tout enseignement dans les Universités de l’ancienne métropole.
Quelques semaines après sa soutenance, il rentre au pays. Mais à la surprise générale, un veto s’oppose à ce qu’il dispense des cours d’Histoire à l’Université de Dakar. Il fut cloitré à l’IFAN comme assistant alors qu’il aurait dû occuper la Chaire d’Histoire ou de Sociologie. Les dirigeants d’alors ont négligé l’intellectuel en faisant l’impasse sur lui, le considérant comme le leader d’un minuscule parti politique. En 1966, il sera distingué au Festival Mondial des Arts Nègres tenu à Dakar ainsi que l’afro-américain Dr William Du Bois comme ceux qui ont exercé le plus d’influence sur le XXIème siècle et sur la conscientisation des jeunesses africaines.
Cependant aujourd’hui, me semble-t-il, vouloir conférer à ses écrits une autorité « coranique », cela ne nous mènera que vers l’impasse. Et on y est déjà. Malheureusement ! Si on prend par exemple le Pr Diop de 1954, avec la publication de NATIONS Nègres, jusqu’au symposium de l’Université de Dakar en 1982, pour voir comment lui (seul ?) a révolutionné la pensée historique africaine, comparé à la période qui part de 1986 à aujourd’hui, on verra que le déséquilibre est flagrant. Son travail n’évolue plus. C’est à peu près le même discours qui revient. Du genre Cheikh Anta a raison. Champollion Figeac est un menteur. Maspero est un imposteur.
Mais çà ne sera pas rendre service ni au savant noir ni à son œuvre qui, admettons le, est loin de faire l’unanimité. Pour ne pas dire qu’il y a des tares, il ya des faiblesses dans ses travaux. Lui-même disait à la conférence de Niamey (Niger) en 1984 quelque chose qui va de ce sens: «la seule chose que vous devez nous reprocher contre laquelle nous devons prendre garde, c’est de prendre de liberté avec des faits, de vouloir trop démontrer des choses au point de passer rapidement sur l’argumentation. Et çà si nous le faisons, si vous trouver des traces de cela dans tout ce que nous avons écrit, eh bien envoyez-nous une correspondance.»
Sauf que nous de la génération d’après 1986, on n’a pas eu la chance de le rencontrer pour ainsi l’interpeller. Parce que dit-on il était très ouvert au dialogue. Même avec ceux qui étaient contre ses thèses. Contrairement à certains de ces héritiers qui prennent de façon péremptoire son œuvre pour du parfait.
Le Pr Cheikh Anta Diop meurt dans son sommeil le 07 Février 1986 à Dakar après une vie intellectuelle intense, réussie. Qui a fait de sa confrontation au Sénégal avec le chantre de la négritude, le Président Senghor l’un des épisodes intellectuels et culturels les plus saillants de l’Histoire Contemporaine de l’AFRIQUE.
Serigne Mbaye Dramé
Etudiant /CESTI
serignembayedrame@gmail.com
Après un parcours scolaire remarquable entre son Baol natal, Saint Louis et Dakar, sanctionné par ses deux baccalauréats en 1945, il débarque à Paris en avril 1946 pour ses études universitaires. Pour ne pas perdre de temps, il s’inscrit dès son arrivée en Physique Chimie, discipline à l’époque très peu pratiquée par les étudiants africains. Et en vrai rat de bibliothèque, il se consacre à la lecture profonde et méticuleuse des auteurs anciens.
Il s’orienta aussi vers les études de lettres et de sciences humaines et s’y engagea avec passion et détermination. En 1949, cheikh Anta procédait au dépôt des exemplaires de sa thèse de doctorat ès lettres et sciences humaines. Mais cette thèse ne sera jamais soutenue. C’est la fameuse thèse que les docteurs de la Sorbonne n’ont pas pu assumer. Parce que tant les idées qu’elle développait étaient tellement transgressives et novatrices à l’époque.
En effet l’idée de l’antériorité historique de l’Afrique et de sa civilisation ayant fleuri dans le berceau égypto-nubien était impensable. Il se remet au travail et se présenta à nouveau à la Sorbonne le 09 janvier 1960. Le candidat DIOP se battait et répondait avec vivacité et aisance aux questions des membres du jury. Mais à la fin des discussions anormalement longues (13H:30 19H:50) le jury jugea son travail insuffisant et lui donna la MENTION HONORABLE. Ce qui était synonyme d’interdiction d’exercer tout enseignement dans les Universités de l’ancienne métropole.
Quelques semaines après sa soutenance, il rentre au pays. Mais à la surprise générale, un veto s’oppose à ce qu’il dispense des cours d’Histoire à l’Université de Dakar. Il fut cloitré à l’IFAN comme assistant alors qu’il aurait dû occuper la Chaire d’Histoire ou de Sociologie. Les dirigeants d’alors ont négligé l’intellectuel en faisant l’impasse sur lui, le considérant comme le leader d’un minuscule parti politique. En 1966, il sera distingué au Festival Mondial des Arts Nègres tenu à Dakar ainsi que l’afro-américain Dr William Du Bois comme ceux qui ont exercé le plus d’influence sur le XXIème siècle et sur la conscientisation des jeunesses africaines.
Cependant aujourd’hui, me semble-t-il, vouloir conférer à ses écrits une autorité « coranique », cela ne nous mènera que vers l’impasse. Et on y est déjà. Malheureusement ! Si on prend par exemple le Pr Diop de 1954, avec la publication de NATIONS Nègres, jusqu’au symposium de l’Université de Dakar en 1982, pour voir comment lui (seul ?) a révolutionné la pensée historique africaine, comparé à la période qui part de 1986 à aujourd’hui, on verra que le déséquilibre est flagrant. Son travail n’évolue plus. C’est à peu près le même discours qui revient. Du genre Cheikh Anta a raison. Champollion Figeac est un menteur. Maspero est un imposteur.
Mais çà ne sera pas rendre service ni au savant noir ni à son œuvre qui, admettons le, est loin de faire l’unanimité. Pour ne pas dire qu’il y a des tares, il ya des faiblesses dans ses travaux. Lui-même disait à la conférence de Niamey (Niger) en 1984 quelque chose qui va de ce sens: «la seule chose que vous devez nous reprocher contre laquelle nous devons prendre garde, c’est de prendre de liberté avec des faits, de vouloir trop démontrer des choses au point de passer rapidement sur l’argumentation. Et çà si nous le faisons, si vous trouver des traces de cela dans tout ce que nous avons écrit, eh bien envoyez-nous une correspondance.»
Sauf que nous de la génération d’après 1986, on n’a pas eu la chance de le rencontrer pour ainsi l’interpeller. Parce que dit-on il était très ouvert au dialogue. Même avec ceux qui étaient contre ses thèses. Contrairement à certains de ces héritiers qui prennent de façon péremptoire son œuvre pour du parfait.
Le Pr Cheikh Anta Diop meurt dans son sommeil le 07 Février 1986 à Dakar après une vie intellectuelle intense, réussie. Qui a fait de sa confrontation au Sénégal avec le chantre de la négritude, le Président Senghor l’un des épisodes intellectuels et culturels les plus saillants de l’Histoire Contemporaine de l’AFRIQUE.
Serigne Mbaye Dramé
Etudiant /CESTI
serignembayedrame@gmail.com