Le Soudan du Sud est confronté à une famine mais achète des armes (rapport ONU)

Vendredi 17 Mars 2017

Nations unies (Etats-Unis) - Le gouvernement sud-soudanais dépense une grosse partie de ses revenus tirés du pétrole dans l'achat d'armes alors que le pays est confronté à une famine largement causée par les opérations militaires ordonnées par Juba, selon un rapport de l'ONU.

Ce document consulté vendredi par l'AFP appelle à mettre en place un embargo sur les armes contre le Soudan du Sud, une mesure qui était soutenue par les Etats-Unis mais qui a été rejetée par un vote du Conseil de sécurité en décembre. "Les armes continuent à inonder le Soudan du Sud, en provenance de diverses sources, souvent en coordination avec les pays voisins", indique le rapport rédigé par un panel d'experts.

Ceux-ci ont découvert "des preuves évidentes montrant que les dirigeants du pays à Juba continuent à se procurer des armes" pour l'armée, les services de sécurité, les milices et d'autres "forces associées". Le Soudan du Sud tire 97% de ses revenus des ventes de pétrole. De fin mars à fin octobre 2016, les revenus du pétrole ont représenté environ 243 millions de dollars, selon les calculs des experts.

Au moins la moitié, "et vraisemblablement beaucoup plus" de ses dépenses budgétaires sont destinées à la sécurité, notamment l'achat d'armes, note encore le rapport de 48 pages. Et le gouvernement du président Salva Kiir a continué à passer des contrats d'armements alors même que l'état de famine était déclaré dans l'Etat d'Unité, où au moins 100.000 personnes sont en train de mourir de faim.

"Le gros des preuves réunies suggère que la famine dans l'Etat d'Unité résulte du conflit prolongé dans le pays et, en particulier, du bilan cumulé des opérations militaires effectuées par le gouvernement dans le sud de cet Etat depuis 2014", estiment encore les experts des Nations unies. Le gouvernement bloque l'accès aux travailleurs humanitaires, aggravant la crise alimentaire, tandis que les importants déplacements de population contribuent aussi à la famine.

Une résurgence des combats depuis le mois de juillet a dévasté les cultures dans des zones cruciales, comme la région d'Equatoria. Le rapport a été rédigé avant une réunion spéciale du Conseil de sécurité sur le Soudan du Sud jeudi prochain, qui sera pilotée par le chef de la diplomatie britannique Boris Johnson.

La précédente administration américaine voulait un embargo sur les armes contre le Soudan du Sud mais le nouveau président Donald Trump doit encore faire connaître sa position sur ce conflit, un des pires que connaît l'Afrique. Les frontières avec le Soudan et avec l'Ouganda restent les principaux points d'entrée des armes au Soudan du Sud et certains chargements entrent également par la République démocratique du Congo.

Les experts citent aussi des informations émanant de hauts gradés de l'armée sud-soudanaise et d'agents du renseignement selon lesquelles l'Egypte aurait fourni des équipements militaires, des armes légères, des munitions et des véhicules blindés au Soudan du Sud l'année passée. Les experts onusiens s'intéressent également à deux avions de chasse L-39 Albatros venus d'Ukraine, vendus à l'Ouganda mais qui auraient pu finir au Soudan du Sud, ainsi qu'à un contrat passé par Juba avec une société basée aux Seychelles sur de grandes quantités d'armements.

Par comparaison, les forces d'opposition ont reçu une quantité limitée de munitions. Le Soudan du Sud, indépendant du Soudan depuis 2011, a plongé en décembre 2013 dans une guerre civile qui a fait des dizaines de milliers de morts et plus de trois millions de déplacés.
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