Le peuple de Pastef et le Projet : un malentendu (OPINION)

Vendredi 2 Aout 2024

« Oubi Deuk », une formule  enchanteresse comme par magie dans un conte de fée  du président de la République, monsieur Bassirou Diomaye Faye, capable de faire sortir  sous la chaleur accablante de la banlieue dakaroise, une foule compacte, des pères et des mères de famille dans une insouciance déconcertante, victimes des inondations et ce depuis plus d’une décennie en vue de leur permettre in fine de dénicher par ci et là des logements neufs inoccupés en lieu et place des maisons insalubres et son lot d’inconfort, de proximité et de maladies. Une bouée de sauvetage pour ces milliers d’âmes désœuvrées, surtout très inquiètes  et qui ne savent plus par où se donner la tête en cette période de forte canicule et de saison des pluies. La rumeur court plus vite que la vérité

 

Ces pères et ces mères de famille ont cru à une farce de mauvais goût. Il leur a fallu vérifier et remonter l’information voire la rumeur qui circulait depuis pour avoir la certitude que l’injonction provenait du président de la République, monsieur Bassirou Diomaye Faye, avant de procéder à l’occupation de ces maisons en toute illégalité, qui pourtant devraient accueillir d’autres familles également victimes des inondations. La plupart de ces gens-là ont une image voire une vision assez féerique du Projet pour croire que tout, vraiment tout est possible avec l’arrivée au pouvoir du parti de Pastef - Les Patriotes. Rien n’est impossible ni de trop pour ces fervents militants, qui ont non seulement sué sur le terrain des mobilisations et des affrontements avec les forces de l’ordre, mais qui ont été également intoxiqués de lacrymogènes et pourchassés partout des artères de la Capitale pour faire triompher le Projet contre vents et marées. Une occupation illégale somme toute tolérée par l’actuel régime et qui frise l’indécence et l’arbitraire.

 

Pourtant, le Projet se proposait de rayer du jeu politique, de la gestion du pouvoir les tares de la gouvernance vicieuse voire mafieuse de l’ex chef de clan Macky Sall. Une parole du président Bassirou Diomaye Faye dénuée de fondement juridique et ne reposant que sur une volonté puérile vient renforcer une idée malheureuse que nos concitoyens ont de nos autorités publiques. Les détenteurs de pouvoir ne s’astreignent pas de limites à ne pas franchir. Seule la volonté du Chef compte et tient lieu de loi. L’illégalité et l’arbitraire sous toutes leurs formes ont droit de cité à Ndoumbélane et tout un chacun en use et abuse à satiété selon les circonstances et sa position sur l’échiquier politique, sans gêne ni remords. L’exemple doit forcément venir d’en haut, de nos autorités. Cependant, si nos autorités politiques d’hier comme celles de maintenant se permettent de prendre des décisions illégales ou prononcent des paroles irresponsables voire dangereuses pour la paix et la stabilité sociales, il ne serait pas étonnant que les gens du peuple qui n’ont que le Projet à la bouche leur emboîtent le pas pour s’enliser dans une certaine laideur morale. « Oubi Deuk »  est un slogan à la fois absurde, loufoque, toxique, mais qui nous renseigne à merveille sur une tare  congénitale chez une bonne partie de la population sénégalaise : le culte de la facilité et comme le peuple de Pastef se plaît à le marteler en boucle :  Tokk mouy dokh, ne rien faire et que tout marche à merveille, adossée à une certaine aristocratie maraboutique et à d’autres gens de la haute société embourgeoisée.

 

C’est une image voire un portrait assez caricatural que nous dressons par-ci et par-là,mais elle a une portée assez significative sur ce que l’absence de pensée peut avoir comme conséquences négatives sur les actes que nous posons au quotidien: occuper par exemple de manière illégale l’espace public ou un bien d’autrui. La penseuse politique Hannah Arendt aimait rappeler par dessus le marché combien le fait de penser était important et primordial, dans un dialogue avec le juriste Français Roger Errera en 1973 à New York : 

 

« Il n’existe pas de pensée dangereuse pour la simple raison que le simple fait de penser est en lui-même une entreprise très dangereuse, mais ne pas penser est encore plus dangereux ». 

 

Le slogan pompeux « Oubi Deuk » n’est pas une pensée réfléchie, mais une injonction fantaisiste pour calmer les attentes d’une clientèle politique, porte-étendard du Projet, qui attend de pouvoir sortir la tête de l’eau et de bénéficier mieux de savourer des bienfaits du changement systémique proclamé urbi et orbi dont elle scrute les premières lueurs d’espoir.

 

Pourtant, il n’y a rien de nouveau sous le soleil. On reprend de plus belle les mêmes pratiques de recasement du personnel politique, de népotisme. Cependant le Projet prévoyait autre chose ou mieux, le peuple de Pastef ce qu’il croyait déceler du projet comme marqueurs déterminants, est introuvable pour l’heure. Des milliers d’experts sont en train de formaliser un Projet qui dort dans les tiroirs et ce depuis 10 ans. Et pourtant, l’actuel ministre des Transports monsieur El Malick Ndiaye, déclarait que le Parti Pastef - Les Patriotes détenait par dévers lui tous les remèdes des maux de mal gouvernance qui gangrènent la société sénégalaise et qu’il suffisait seulement pour un esprit lucide d’ouvrir le livre « Solutions » de monsieur Ousmane Sonko pour en avoir le cœur net. Là encore, nous sommes en face de gens qui surfent sur un engouement massif des jeunes sur un Projet  qu’ils n’ont jamais vu ni reçu d’explications claires et factuelles et non une litanie de paroles creuses pour leur ôter in fine toute volonté de questionner le Projet. C’est cette même absence de pensée qui les désoriente aujourd’hui et ils en perdent même le sommeil jusqu’à se douter du bien fondé du discours salvateur d’antan de leur leader monsieur Ousmane Sonko, de sa faisabilité. 

  

«  Domeram ». À l' heure de la gestion du pouvoir, beaucoup de gens et pas n’importe qui sortent du bois et font des déclarations fracassantes, indécentes , pitoyables pour ainsi rappeler aux autorités qu’ils étaient au cœur du combat contre le régime de l’ex chef de clan Macky Sall et qu’ils ont droit à des égards et à une attention somme toute particulière. La sortie malencontreuse de imam Dramé en est un exemple édifiant. Pourtant le Projet ou bien ce qui est perçu comme tel par les pastefiens ramait à contre-courant de la gestion patrimoniale, familiale de l’Etat  et que seule la compétence devrait être au cœur du management des affaires publiques. Pourquoi diable Imam Dramé, membre de Pastef - Les Patriotes, se permet d’insulter les gens en public tout simplement parce qu’il n’arrive pas à joindre certaines autorités ? La question qui sous-entend sa sortie malheureuse est celle liée à l’engagement politique. Pourquoi s'engage-t-on dans le champ politique ? Pour recevoir des dividendes ou pour contribuer activement à sensibiliser nos concitoyens sur les questions majeures sur la bonne gouvernance, la démocratie, la solidarité, la justice, le bien commun etc. 

 

Le  Projet nous avait promis que le pouvoir n’est pas et ne saurait être une question de partage entre copains ou compagnons, mais une affaire de gestion éthique et efficiente, confiée à toute personne digne de confiance, compétente et ayant un sens élevé du bien public, intègre et incorruptible et ce après un appel à candidature, aujourd’hui remis aux calendes grecques. Pourquoi cherche t-il obligatoirement à ce que ces autorités donnent suite à ces appels ? Une faveur ou une attention. Peu importe, mais sa sortie dévoile de manière insidieuse comment certaines personnes perçoivent le pouvoir et ses lambris dorés. Un appel du pied ou tout qui s’en approche de près ou de loin ne fait pas partie du bon comportement ni d’une certaine intégrité morale. Le plus cocasse dans cette sortie infâme d’un prédicateur est de se trouver des excuses pitoyables en évoquant le prophète Mohamed (PSL) alors que son exemplarité comportementale telle qu’elle décrite par le Saint Coran et les recueils de Hadiths ne souffre d’aucune ambiguïté. Le politicien Imam Dramé s’est fourvoyé à force de vouloir trop parler, occuper l’espace médiatique et d’user sciemment ou inconsciemment d’un langage ordurier propre à beaucoup de nos hommes ou femmes politiques. Parler en public est un art et trop de paroles nuit à l’action politique.

 

« Mbam khoukh ». Assane Gueye plus connu sous le sobriquet de Azoura Fall s’est permis dans une émission de traiter les députés de Benno Bokk Yakkar de ce qualificatif avec force et dédain en le martelant à plusieurs reprises soit pour narguer l’ancien régime, soit parce qu’il est sûr de son forfait et qu’il ne risquait absolument rien en s’attaquant de manière odieuse à des représentants du peuple sénégalais. Aucune désapprobation publique de ces propos désobligeants et qui témoignent d’une volonté sournoise de rabaisser voire de s’attaquer à leur honorabilité parce que tout simplement Azoura Fall appartient au camp des vainqueurs et qu’il a des entrées auprès du premier ministre monsieur Ousmane Sonko. Pourtant, le militant de Pastef - Les Patriotes n’est pas à son premier coup d’essai. Il s’était permis de proférer de manière publique et avec arrogance des insultes au nouveau président de la République du Sénégal, fraîchement élu au premier tour de l’élection présidentielle du 25 Février 2024. L’homme n’a pas été inquiété par le procureur de la République, toujours si prompt à s'autosaisir pour offense au chef de l’Etat. Existe-t-il une offense plus grave que des insultes publiques adressées au président de la République? Non et pourtant l’homme se pavane dans les rues et se permet d’afficher par-ci par-là des selfies avec certaines autorités du pays. Cherchez l’erreur pour des gens qui nous martèlent à longueur de journée leur trouvaille magique Jub Jubal Jubanti comme si le pays de la Teranga était pour l’essentiel composé de gens malhonnêtes et cupides avec une obligation de les remettre sur le droit chemin.

 

Au même moment, le même procureur de la République déclenche l’action publique à l’encontre d’autres personnes membres de l’opposition pour le délit d’offense au chef de l’Etat et à son premier ministre. Or, le Projet se voulait le garant de l’égalité de tous les citoyens sénégalais devant la justice. Manifestement, il ya une rupture d’égalité entre citoyens sénégalais sur un même cas d’offense au président de la République. Pourtant, les saillies incendiaires de Azoura Fall sont de loin plus infâmes que celle de monsieur Ameth Suzanne Camara, qui s’est contenté de dire que le président et son premier ministre mentaient.  En effet, lorsqu’un individu se permet de déverser des insanités, des insultes sur son prochain, c’est uniquement dans le dessein de l’atteindre psychologiquement, de le déshumaniser, de l’humilier. et de lui signifier ouvertement qu’il n’est rien à ses yeux, sinon une chose. Par contre, lorsqu’on dit que telle personne ment ou a menti, c’est toujours par rapport à la réalité, à une analyse objective des faits incriminés et jamais de manière fortuite. En démocratie, dans un État de droit, dire à une autorité qu’elle ne dit pas la vérité ne mérite pas un mandat de dépôt.

 

Cependant , à Ndoumbélane, c’est irrévérencieux de dire publiquement à une autorité qu’elle ne dit pas la vérité, même s’il est de notoriété publique que la personne a régulièrement tendance à affabuler, à raconter des histoires ou à dire des contre vérités. Insulter le président de la République ne saurait être un délit d’opinion, mais un outrage (cas de Azoura Fall, membre de Pastef - Les Patriotes ) comme toutes autres insanités, propos immondes Mbam khoukh adressées à des députés du peuple. La déclaration de politique générale du premier ministre, monsieur Ousmane Sonko devait se faire devant ces mêmes députés que le militant et membre de Pastef - Les Patriotes a traités de porcs. A la place de l'Hémicycle, monsieur Sonko préfère de loin un jury populaire pour s’épargner des cris et du bruit. Tout est dans les symboles, n’est-ce pas Azoura Fall ?

 

À Ndoumbélane, le  procureur de la République a trop de pouvoirs sur la vie de nos concitoyens et il en abuse assez souvent par complaisance en vue de donner des gages de fidélité à son ministre de tutelle. Aujourd’hui, nous sommes presque tous d’avis que le véritable problème de la justice sénégalaise est le trop plein de pouvoirs du ministère public. Pour une justice crédible et respectée par les uns et les autres, il n'y a pas de solutions miracles et nos gouvernants d’hier et ceux d’aujourd’hui le savent mieux que n’importe quel citoyen lambda. Ils ne veulent pas de véritables changements. Ils préfèrent le statu quo afin de contrôler nos faits et gestes pour mieux sévir. Un État policier en marche avec son corollaire. la dictature de la pensée unique. Pourtant, le Projet nous avait promis une rupture systémique et Dame Justice au centre de ce renouveau démocratique et républicain. Le Projet proposait la tenue des Assises de la Justice en vue d’assainir le secteur et de permettre in fine à nos concitoyens de se réconcilier avec cette institution judiciaire et pourtant nos morts de mars 2021 à juin 2023, mieux leurs familles attendent de la justice qu’elle fasse son travail en élucidant tous ces assassinats. Mais, le pouvoir ou le Projet ne veut pas s’attaquer à cette patate chaude qui risque de déstabiliser le nouveau régime. Et, le Jub Jubal Jubunti dans ce capharnaüm ?

massambandiaye2012@gmail.com

 
Nombre de lectures : 593 fois