Les défenseurs d'Azovstal se rendent

Jeudi 19 Mai 2022

La Russie a annoncé jeudi la reddition de 1730 militaires ukrainiens du site sidérurgique Azovstal à Marioupol, montrant des images d’hommes, certains s’aidant de béquilles, en train d’émerger après une longue bataille devenue mondialement un symbole de la résistance à l’invasion russe.
 
Ils étaient retranchés depuis plusieurs semaines dans le dédale de galeries souterraines creusées à l’époque soviétique sous la gigantesque aciérie.
 
Mercredi, le dirigeant séparatiste prorusse Denis Pouchiline avait précisé que les commandants ne s’étaient pas encore rendus et affirmé qu’il y avait initialement « plus de 2000 personnes » sur le site.
 
Leur sort reste en suspens : l’Ukraine veut organiser un échange de prisonniers de guerre, mais la Russie a fait savoir à maintes reprises qu’elle considérait au moins une partie d’entre eux non pas comme des soldats, mais comme des combattants « néonazis ».
 
Tandis que cette reddition constitue une importante avancée pour la Russie, le président ukrainien Volodymyr Zelensky, portant la chemise traditionnelle brodée, a déclaré jeudi que son peuple demeurait « fort, indestructible, courageux et libre », dans une vidéo marquant le jour de Vychyvanka, la fête des traditions folkloriques ukrainiennes.
 
Le premier procès pour crime de guerre sur le sol ukrainien, celui d’un soldat russe accusé d’avoir abattu un civil ukrainien, a repris quant à lui jeudi à Kyiv après une première séance, la veille, au cours de laquelle Vadim Chichimarine, 21 ans, avait plaidé coupable.  
 
Jeudi, il a demandé pardon à l’épouse de l’homme de 62 ans tué dans le nord-est de l’Ukraine le 28 février, tandis qu’il poussait son vélo tout en téléphonant.  
Le Parquet ukrainien a requis jeudi contre lui la prison à perpétuité, la peine maximale.
Un autre procès pour crimes de guerre s’est ouvert ce même jour dans le nord-est de l’Ukraine : celui de deux militaires russes accusés d’avoir tiré des roquettes sur des infrastructures civiles dans la région de Kharkiv, la deuxième ville du pays.
 
Le Parquet général d’Ukraine a précisé avoir déjà ouvert plus de 12 000 enquêtes pour crimes de guerre, tandis que les institutions internationales mènent leurs propres enquêtes sur les exactions commises depuis le début de l’invasion russe le 24 février.
 
Pénuries alimentaires mondiales en vue
 
Sur le front économique, les grands argentiers du G7 se réunissaient en Allemagne jeudi et vendredi, au chevet de l’économie ukrainienne et pour examiner les conséquences à travers le monde de la guerre déclenchée par Moscou il y a presque trois mois.
 
Inflation notamment liée à l’envolée des prix de l’énergie, menaces de crise alimentaire et spectre du surendettement dans de nombreux pays en développement, l’ordre du jour de la rencontre des ministres des Finances du groupe des Sept (États-Unis, Japon, Canada, France, Italie, Royaume-Uni, Allemagne) est chargé.
 
Première urgence : couvrir le budget ukrainien du trimestre en cours pour maintenir l’effort de guerre.
 
« Je suis assez optimiste quant au fait que nous serons en mesure, avec le G7, de rassembler les fonds qui permettront à l’Ukraine de se défendre au cours des prochains mois », a déclaré à l’ouverture des discussions Christian Lindner, le ministre allemand des Finances, dont le pays préside le G7 cette année.
 
A plus long terme, alors que la guerre continue de ravager une large partie du territoire ukrainien, des réflexions sont déjà en cours sur l’aide à la reconstruction. Des pistes de financement sont évoquées comme celle consistant à utiliser des actifs russes gelés dans le cadre des sanctions occidentales.
 
La guerre livrée par la Russie devrait provoquer une contraction massive de l’économie ukrainienne, évaluée à 30 % par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd) et même à 45 % par la Banque mondiale.
 
A des degrés divers, c’est toute l’économie mondiale qui est affectée par cette offensive et les sanctions contre Moscou qui en ont découlé. « Nous assistons à de graves conséquences économiques, en particulier pour les pays à faibles revenus, en raison de la hausse des taux d’intérêt et des prix mondiaux des produits agricoles », a constaté jeudi le ministre allemand des Finances.  
 
La veille, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres mettait en garde contre le « spectre de pénuries alimentaires mondiales dans les mois à venir », implorant la Russie de libérer les exportations de céréales ukrainiennes et l’Occident d’ouvrir l’accès des engrais russes aux marchés mondiaux.
 
Il avait souligné que la guerre en Ukraine avait amplifié et accéléré les facteurs contribuant déjà à la crise alimentaire mondiale : changement climatique, pandémie provoquée par la COVID-19 et inégalités croissantes entre nations riches et pauvres.
 
« Comme un jeu »
 
Sur le terrain militaire, dans la région de Louhansk (est), quatre personnes ont été tuées et trois blessées à Severodonetsk, une ville soumise à d’intenses bombardements, et toute la région est privée d’électricité, a annoncé la présidence ukrainienne dans son point quotidien.
 
Une équipe de l’AFP sur place a constaté que cette cité industrielle était transformée depuis plusieurs jours en un champ de bataille et engloutie sous le feu de l’artillerie.
 
« On ne sait même pas qui tire, ni d’où », s’exclame un homme de 55 ans qui vit avec d’autres personnes dans un sous-sol : « Comme s’ils jouaient à un jeu ».
 
« Je ne sais pas combien de temps nous pouvons tenir », s’interroge Nella Kachkina, 65 ans, une ancienne employée de la municipalité, aujourd’hui à la retraite.
 
« Nous n’avons plus de médicaments et beaucoup de malades - notamment des femmes - qui ont besoin de soins », se lamente-t-elle.
 
Severodonetsk et Lyssytchansk constituent la dernière poche de résistance ukrainienne dans la région de Louhansk. Les Russes encerclent désormais ces deux localités, seulement séparées par une rivière, et les bombardent sans relâche pour épuiser la résistance et empêcher l’arrivée de renforts. (AFP)
 
 
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