Les migrations font à nouveau trembler l'Europe

Jeudi 28 Juin 2018

PARIS (Reuters) - Les dirigeants européens travailleront jeudi soir sur la crise politique liée aux flux de migrants qui envenime les relations entre Etats membres et fragilise les exécutifs nationaux à moins d'un an des élections européennes.
Après le choix spectaculaire du nouveau gouvernement italien de refouler des bateaux ayant secouru des migrants, l'alliance historique entre conservateurs allemands semble désormais chanceler, menaçant la coalition gouvernementale d'Angela Merkel.
Ces remous chez ces deux membres fondateurs de l'Union reflètent une montée en puissance des forces politiques extrémistes dans l'Union, alors que plusieurs pays de l'Est refusent déjà depuis plusieurs années d'accueillir des réfugiés.
"De plus en plus de personnes commencent à croire que seule une autorité à poigne, à l'esprit anti-européen et anti-libéral, avec un penchant vers un autoritarisme flagrant, est capable de stopper la vague d'immigration illégale", met en garde le président du Conseil européen dans sa lettre aux chefs d'Etat et de gouvernement diffusée à la veille du Conseil.
Donald Tusk souhaite que le Conseil permette un accord sur trois mesures : valider la création de "plateformes de débarquement" hors d'Europe pour les migrants, des fonds spécifiques dans le prochain budget pour lutter contre l'immigration illégale, collaborer davantage avec des pays tiers, comme la Libye.
Selon un projet de conclusions consulté par Reuters, les dirigeants devraient s'accorder sur un renforcement des frontières extérieures de l'UE, davantage de soutien à la Libye, d'où partent de nombreux migrants, et quelques autres pays et une réflexion sur la création de ces centres "de débarquement".
L'Italie, la Grèce et l'Espagne, où arrivent la majorité des migrants, devraient être davantage soutenues mais aucun accord n'apparaît sur la répartition des demandeurs d'asile.
 
"L'EUROPE FACE À SON DESTIN"
Selon l'Elysée, obtenir l'accord des Vingt-Huit sur la nécessité de continuer à chercher une solution européenne concertée sera encore plus important que la liste des actions qui seront actées ou confirmées par les dirigeants.
"Ce Conseil européen va être déterminant pour notre avenir collectif", a assuré mercredi le ministre français de l'Europe, Jean-Yves Le Drian, devant l'Assemblée nationale.
"L'Europe est en face de son destin. L'Europe peut se déliter. L'Europe est menacée dans son unité et dans ses fondamentaux", a-t-il ajouté.
Emmanuel Macron rencontrera dès son arrivée à Bruxelles les quatre pays du groupe dit de Visegrad (Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovaquie), qui ont refusé de participer à la réunion sur les migrations organisée en urgence dimanche dernier avec finalement 16 pays européens.
Samedi, il leur avait indirectement répondu en dénonçant l'"égoïsme national" et en brandissant la menace de sanctions financières contre les Etats de l'UE qui manqueraient à leur devoir de solidarité en ce qui concerne l'accueil des réfugiés.
Le président français portera au Conseil avec son partenaire espagnol l'idée d'ouvrir dans les pays européens d'arrivée des centres fermés où la situation des migrants serait examinée.
 
RENFORCEMENT DE LA SOLIDARITÉ
Pour aboutir, cette initiative devra s'accompagner d'un renforcement de la solidarité à l'égard de ces pays - pour traiter les demandes, expulser ceux qui n'ont pas obtenu l'asile et accroître les relocalisations, souligne l'Elysée.
Aucune solution définitive n'étant attendue à l'issue du Conseil, la chancelière allemande s'est parallèlement déjà prononcée en faveur d'accords bilatéraux, trilatéraux et multilatéraux.
Au deuxième jour du Conseil, les Européens - hors Royaume-Uni - feront le point vendredi sur les négociations du Brexit et déploreront l'absence de progrès significatifs sur l'épineuse question de la frontière irlandaise.
Les Vingt-Sept travailleront dans la foulée sur les réformes de la zone euro.
Emmanuel Macron et Angela Merkel présenteront la feuille de route sur laquelle ils se sont accordés le 19 juin, dont plusieurs de leurs partenaires rejettent d'importantes dispositions, en particulier la création d'un budget de la zone euro.
L'objectif, précise la présidence française, est d'obtenir que l'ensemble des points d'accord franco-allemands puissent être examinés par les ministres des Finances des 19 membres de la zone euro d'ici décembre.
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