L’entité socialiste fut pendant longtemps la locomotive de forces politiques intégrées puis phagocytées sous la férule de Léopold Sédar Senghor, concepteur et réalisateur de l’Etat démiurge, dont les finalités mythiques et mystiques du développement et de la construction nationale furent convoquées pour justifier un autoritarisme modéré, surtout après la crise de 1962, bien qu’il concédât quelque liberté à la Cour suprême pour éviter ou tout au moins réfréner les excès sanguinaires de l’autoritarisme débridé alors si fréquent en Afrique, et qui eussent été préjudiciables à son image de poète humaniste et policé.
Cependant, le développement des activités politiques clandestines et les ébranlements sismiques du régime par les violentes vagues de contestation de 1968, obligèrent le Président Senghor à procéder à une décompression autoritaire : retour du poste de Premier ministre en 1970, du multipartisme limité à partir de 1974, renforcé en 1976 et 1978 ; succession politique et générationnelle intra-partisane en 1980, au profit du Premier ministre Abdou Diouf.
Dans un contexte de faillite économique de l’Etat, ruiné par un clientélisme systémique et systématique, les mesures austères d’ajustement structurel imposées sapent la légitimité de l’Etat, en réduisant ses capacités d’intervention, de redistribution et de gestion de services publics vitaux, tels que la santé et l’éducation. Devenu un Etat minimal avec un secteur privé faible pourtant censé le relayer, les conséquences socio-économiques sont dramatiques : chômage, pauvreté, exclusion…
Même si Abdou Diouf a consacré le multipartisme illimité en 1981, le Parti socialiste se maintient par une mainmise sur les règles du jeu électoral jugées iniques par l’opposition, d’où une crise politique et économique qui culmine en 1988 et dégénère dans la violence. La survie du régime socialiste est alors liée à la négociation avec l’opposition et même la cogestion du pouvoir à partir de 1991. Gouverner dans la stabilité en contexte d’ajustement consacre une complicité objective entre Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, d’où une démocratisation de l’architecture juridique et institutionnelle de la compétition politique : unanimité autour du Code électoral de 1992, création du HCRT (Haut conseil de la radiotélévision) en 1991, du Conseil constitutionnel en 1992, de l’ONEL (Observatoire national des élections) en 1997. Ces avancées sont renforcées par l’élévation du Président Diouf au-dessus de la mêlée, en confiant la gestion du Parti à Ousmane Tanor Dieng, après le congrès de 1996 ; elles consacrent l’avènement d’une alternance démocratique en 2000.
Le PS est d’abord neutralisé par l’idéologie de l’« opposition républicaine », voulue contributive et constructive, et tout compte fait incapable d’exercer une pression sur le pouvoir libéral à son avantage. Dès lors, la ligne du parti se durcit en raison des nombreuses dérives : modification unilatérale et instrumentalisation des règles et institutions du jeu démocratique, recrudescence de la violence politique, récurrence des scandales de corruption et de prédation des ressources financières et foncières, soupçons de dévolution monarchique du pouvoir, etc. La défaite à la présidentielle et le boycott des législatives de 2007 entraînent l’organisation des Assises nationales avec le Front Siggil Senegaal en 2008, consolidé en Benno Siggil Senegaal avec les locales de 2009. La confrontation avec le régime libéral au sein du M 23 lors de la présidentielle de 2012, suscite au second tour, l’instauration de la coalition Benno Bokk Yaakaar intégrant le PS et dirigée par l’ex-Premier ministre Macky Sall, élu président de la République, dont le slogan «gagner ensemble et gérer ensemble», pour donc tous être responsables et comptables du même bilan, est un puissant anesthésiant des forces politiques captées et capturées, soumises à une domination incolore et indolore.
Le contrôle de la direction du parti par Ousmane Tanor Dieng, requinqué par une légitimité réitérée lors du congrès de 2014 et la victoire du « Oui » au référendum du 20 mars dernier, empêche l’expression de tout leadership de concurrence au Président Sall, chef de Benno Bokk Yaakaar, et semble condamner les dissidents, Aïssata Tall Sall et Khalifa Sall notamment, à trouver d’autres moyens de porter leurs ambitions politiques.
En tout état de cause, le retour du Parti socialiste à la tête de l’Etat semble incertain, desservi par la faiblesse de ses réalisations comparativement au règne des libéraux. N’aurait-il pas déjà fait ses preuves et montré ses limites au bout de 50 ans de pouvoir ? Serait-t-il alors devenu un parti de régulation ou de participation à des coalitions dirigées par la grande famille libérale qui semble aujourd’hui majoritaire dans le pays ?
Cependant, le développement des activités politiques clandestines et les ébranlements sismiques du régime par les violentes vagues de contestation de 1968, obligèrent le Président Senghor à procéder à une décompression autoritaire : retour du poste de Premier ministre en 1970, du multipartisme limité à partir de 1974, renforcé en 1976 et 1978 ; succession politique et générationnelle intra-partisane en 1980, au profit du Premier ministre Abdou Diouf.
Dans un contexte de faillite économique de l’Etat, ruiné par un clientélisme systémique et systématique, les mesures austères d’ajustement structurel imposées sapent la légitimité de l’Etat, en réduisant ses capacités d’intervention, de redistribution et de gestion de services publics vitaux, tels que la santé et l’éducation. Devenu un Etat minimal avec un secteur privé faible pourtant censé le relayer, les conséquences socio-économiques sont dramatiques : chômage, pauvreté, exclusion…
Même si Abdou Diouf a consacré le multipartisme illimité en 1981, le Parti socialiste se maintient par une mainmise sur les règles du jeu électoral jugées iniques par l’opposition, d’où une crise politique et économique qui culmine en 1988 et dégénère dans la violence. La survie du régime socialiste est alors liée à la négociation avec l’opposition et même la cogestion du pouvoir à partir de 1991. Gouverner dans la stabilité en contexte d’ajustement consacre une complicité objective entre Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, d’où une démocratisation de l’architecture juridique et institutionnelle de la compétition politique : unanimité autour du Code électoral de 1992, création du HCRT (Haut conseil de la radiotélévision) en 1991, du Conseil constitutionnel en 1992, de l’ONEL (Observatoire national des élections) en 1997. Ces avancées sont renforcées par l’élévation du Président Diouf au-dessus de la mêlée, en confiant la gestion du Parti à Ousmane Tanor Dieng, après le congrès de 1996 ; elles consacrent l’avènement d’une alternance démocratique en 2000.
Le PS est d’abord neutralisé par l’idéologie de l’« opposition républicaine », voulue contributive et constructive, et tout compte fait incapable d’exercer une pression sur le pouvoir libéral à son avantage. Dès lors, la ligne du parti se durcit en raison des nombreuses dérives : modification unilatérale et instrumentalisation des règles et institutions du jeu démocratique, recrudescence de la violence politique, récurrence des scandales de corruption et de prédation des ressources financières et foncières, soupçons de dévolution monarchique du pouvoir, etc. La défaite à la présidentielle et le boycott des législatives de 2007 entraînent l’organisation des Assises nationales avec le Front Siggil Senegaal en 2008, consolidé en Benno Siggil Senegaal avec les locales de 2009. La confrontation avec le régime libéral au sein du M 23 lors de la présidentielle de 2012, suscite au second tour, l’instauration de la coalition Benno Bokk Yaakaar intégrant le PS et dirigée par l’ex-Premier ministre Macky Sall, élu président de la République, dont le slogan «gagner ensemble et gérer ensemble», pour donc tous être responsables et comptables du même bilan, est un puissant anesthésiant des forces politiques captées et capturées, soumises à une domination incolore et indolore.
Le contrôle de la direction du parti par Ousmane Tanor Dieng, requinqué par une légitimité réitérée lors du congrès de 2014 et la victoire du « Oui » au référendum du 20 mars dernier, empêche l’expression de tout leadership de concurrence au Président Sall, chef de Benno Bokk Yaakaar, et semble condamner les dissidents, Aïssata Tall Sall et Khalifa Sall notamment, à trouver d’autres moyens de porter leurs ambitions politiques.
En tout état de cause, le retour du Parti socialiste à la tête de l’Etat semble incertain, desservi par la faiblesse de ses réalisations comparativement au règne des libéraux. N’aurait-il pas déjà fait ses preuves et montré ses limites au bout de 50 ans de pouvoir ? Serait-t-il alors devenu un parti de régulation ou de participation à des coalitions dirigées par la grande famille libérale qui semble aujourd’hui majoritaire dans le pays ?