Niger - Le pouvoir militaire reçoit le soutien de plusieurs milliers de manifestants dans plusieurs villes

Jeudi 3 Aout 2023


Des milliers de personnes ont manifesté dans le calme jeudi à Niamey et dans plusieurs autres villes du Niger en soutien au coup d’État qui a renversé le président désigné Mohamed Bazoum.
 
À Niamey, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées sur la place de la Concertation, avant de se disperser sans incident à la mi-journée.
 
Ils sont venus à l’appel du M62, une coalition d’organisations de la société civile « souverainistes », le jour de la fête des 63 ans de l’indépendance du Niger de la France, ex-puissance coloniale qui y dispose de quelque 1500 soldats pour aider à combattre les groupes armés djihadistes qui sévissent dans ce pays.
 
« A bas la France », « Vive la Russie, vive Poutine », scandaient notamment les manifestants.
Les accès à l’ambassade française et à d’autres chancelleries proches étaient bloqués par les forces de l’ordre nigériennes, ont constaté des journalistes de l’AFP. Avant la manifestation, Paris avait rappelé « que la sécurité des emprises et des personnels diplomatiques sont des obligations au titre du droit international ».
 
Depuis le coup d’État du 26 juillet dans ce pays producteur de pétrole et d’uranium, les relations avec Paris se sont dégradées. Des incidents dimanche, lors d’une manifestation devant l’ambassade de France ont entraîné l’évacuation de plus de 500 Français.
 
Plusieurs milliers de personnes sont également descendues dans les rues d’Agadez, principale ville du nord du pays, à l’appel de la société civile.
 
« Policiers, gendarmes et gardes nationaux ont été déployés pour sécuriser certains endroits, dont l’Alliance française », a indiqué à l’AFP un journaliste local.
 
Selon des sources locales et des images de la télévision publique, des manifestations similaires ont eu lieu à Tillabéri, ville de l’ouest au cœur d’une région régulièrement touchée par des attaques djihadistes, dans la capitale économique Madadi (sud) et à Filingué, la ville dont est originaire le chef de la junte, le général Abdourahamane Tiani.
 
« C’est seulement la sécurité qui nous intéresse », qu’elle soit assurée par « la Russie, la Chine, la Turquie, s’ils veulent nous aider », a affirmé Issiaka Hamadou, jeune entrepreneur qui manifestait dans la capitale, ajoutant : « Nous, on ne veut juste pas les Français qui nous pillent depuis 1960, ils sont là depuis et rien ne change ! À quoi ils ont servi ? ».
 
Préserver « la démocratie »
 
Aux États-Unis, un des principaux partenaires du Niger avec la France et qui y déploie également un millier de militaires, le président Joe Biden a appelé « à la libération immédiate du président Bazoum et sa famille, et à la préservation de la démocratie conquise de haute lutte au Niger ».
 
M. Bazoum, 63 ans, est retenu avec sa famille depuis le jour du putsch dans sa résidence présidentielle. L’électricité y a été volontairement coupée jeudi, a affirmé son parti.
 
La France a affrété cinq avions depuis mardi pour une opération d’évacuation, terminée jeudi selon le ministre français des Armées Sébastien Lecornu : 1079 ressortissants français et étrangers, dont des Européens, « sont désormais en sécurité », a-t-il dit.
 
Les États-Unis et le Royaume-Uni ont successivement ordonné mercredi et jeudi l’évacuation du personnel non essentiel de leurs ambassades respectives à Niamey.
 
La situation est tendue avec les partenaires occidentaux et africains traditionnels du Niger depuis que l’ex-chef de la garde présidentielle, le général Abdourahamane Tiani, a pris le pouvoir.
 
En ligne avec le blocus économique décidé dimanche, le Nigeria a coupé son approvisionnement en électricité au Niger, qui dépend énergétiquement à 70 % de son voisin.
 
La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), présidée par le Nigeria, a dit se préparer à une opération militaire même si elle a souligné qu’il s’agissait de « la dernière option sur la table ».
 
(…) Les chefs d’état-major de l’organisation sont réunis à Abuja jusqu’à vendredi, deux jours avant l’expiration dimanche d’un ultimatum exigeant un retour de Mohamed Bazoum.
 
En face, le nouveau pouvoir à Niamey a envoyé un émissaire au Mali et au Burkina Faso, deux pays également dirigés par des militaires, confrontés à la violence djihadiste et solidaires de leur voisin.
 
Ils ont affirmé que toute intervention armée serait considérée « comme une déclaration de guerre » à leurs deux pays et entraînerait leur retrait de la Cédéao.
 
À Niamey, le général Tiani a déclaré rejeter « en bloc les sanctions » et refuser « de céder à toute menace », dans un discours télévisé mercredi. « Nous refusons toute ingérence dans les affaires intérieures du Niger ». (AFP)
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