Nouvelles interrogations en France sur un cargo saoudien

Mardi 28 Mai 2019

MARSEILLE (Reuters) - Le cargo saoudien Bahri Tabuk, dont le site d'investigation Disclose affirme qu'il doit charger des munitions françaises à destination de l'Arabie saoudite, est arrivé mardi après-midi à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) dans l'attente de sa cargaison, a-t-on appris auprès de la section CGT locale des dockers.
 
Le secrétaire général des dockers de ce port proche de Marseille, Laurent Pastor, a dit à Reuters qu'ils s'opposeraient à tout chargement d'armes et de munitions à bord du navire.
"Il est impensable de charger des armes pour aller faire la guerre dans n'importe quel pays", a-t-il souligné.
 
L'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis sont engagés depuis mars 2015 dans une guerre au Yémen contre les rebelles chiites houthis, soutenus par l'Iran. Le conflit a fait des dizaines de milliers de morts et provoqué une grave crise humanitaire.
 
Un autre cargo battant pavillon saoudien, le Bahri Yanbu, avait dû reprendre le large le 10 mai sans avoir pu charger une cargaison d'armements prévue au port du Havre (Seine-Maritime) sous la pression de plusieurs ONG dont deux d'entre elles, ACAT et ASER, avaient engagé un recours judiciaire, sans succès.
 
La nature militaire de la cargaison destinée au Bahri Tabuk n'est pour l'heure pas confirmée de source autorisée.
 
De nouveau dans l'embarras, les autorités françaises ont déclaré par la voix de la ministre des Armées que des vérifications étaient en cours.
 
"Comme je n'ai pas la responsabilité ni de l'administration des douanes ni de la circulation maritime, je ne peux vous répondre sur la base d'informations de presse. (...) Et quand bien même ce serait le cas, ce qui n'est pas avéré lorsque je vous parle, est-ce que ce serait étonnant ? Non, car nous avons un partenariat avec l'Arabie saoudite", a dit Florence Parly lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale.
 
La Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) est tenue au secret professionnel.
Selon Laurent Pastor, le chargement initialement prévu pour le Bahri Taruk consiste en des "transformateurs électriques" et doit être chargé mercredi.
 
La sénatrice socialiste des Bouches-du-Rhône Samia Ghali a adressé à Florence Parly une demande de moratoire sur la livraison d'armes à destination de l'Arabie saoudite "tant que les populations civiles au Yémen n'accèdent pas à l'aide humanitaire internationale (...) et qu'un accord politique de paix n'est pas trouvé dans le conflit au Yémen".
 
L'ACAT (Action des chrétiens pour l'abolition de la torture) a annoncé mardi déposer un nouveau référé suspensif, rappelant la France au Traité sur le commerce des armes (TCA) qu'elle a ratifié en 2014.
 
Ce texte stipule que tout pays exportateur doit évaluer "de manière objective et non discriminatoire" si la vente de ses armes peut servir à "commettre une violation grave du droit international des droits de l’Homme ou à en faciliter la commission".
 
L'exécutif français affirme ne pas disposer "de preuves selon lesquelles des victimes au Yémen sont le résultat d'utilisation d'armes françaises". Le chef de la diplomatie, Jean-Yves Le Drian, a appelé mardi matin à mettre un terme à une "sale guerre".
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