PROCES CAISSE D’AVANCE VILLE DE DAKAR : La défense verrouille et s’arcboute au qualificatif de «fonds politiques»

Mardi 6 Février 2018

Les prévenus entendus hier par le tribunal correctionnel de Dakar présidé par le juge Malick Lamotte sont unanimes sur le qualificatif qu’il faille accoler à la caisse d’avance de la ville de Dakar: des fonds politiques. Les factures établies pour le compte du Gie Keur Tabbar n’étaient que des artifices comptables exigés par le receveur percepteur municipal pour décaisser 30 millions de francs Cfa par mois.


Au huitième jour du procès dit de la caisse d’avance de la mairie de Dakar, les parties en présence sont entrées hier dans le vif du sujet. Après la déclaration solennelle de Khalifa Ababacar Sall, disculpant ses collaborateurs et assumant toute l’accusation portée contre eux, les débats ont rapidement pris leur envol avec les interrogatoires des prévenus par le président du tribunal Malick Lamotte. D’ailleurs, tous ont nié les faits qui leur sont reprochés dans le volumineux dossier d’accusation du parquet.
 
La grande controverse qui a mobilisé les énergies des parties tourne autour du qualificatif des fonds de la Caisse d’avance. Celle-ci est alimentée par le Receveur percepteur municipal (Rpm) à hauteur de 30 millions de francs Cfa chaque mois mais doit être justifiée par des factures dûment remplies par le comptable de la ville de Dakar, Yaya Bodian, sur ordre de son supérieur hiérarchique Mbaye Touré, directeur administratif et financier (Daf) de la ville.
 
En fin de parcours, les 30 millions sont déposés en numéraires entre les mains propres de l’ordonnateur des dépenses, «l’autorité politique», en l’occurrence Khalifa Ababacar Sall qui en dispose de façon discrétionnaire. « Le fait même que cette somme soit en numéraires est la preuve que nous sommes en face de fonds purement politiques», a indiqué Amadou Moctar Diop, inspecteur des affaires administratives et financières et en charge des procès-verbaux de réception des produits objet de facturation, soit le mil et le riz.
 
Pour accréditer la thèse concernant les fonds politiques, les prévenus ont tous insisté sur le caractère fictif mais nécessaire des factures mensuellement établies au profit du GIE Keur Tabbar censé être le destinataire des fonds. En réalité, ont-ils indiqué, elles étaient indispensables pour que le percepteur municipal verse les 30 millions mensuels destinés aux «dépenses du maire».
 
Recruté depuis 1992 comme cadre supérieur titulaire d’une maîtrise de Sciences économiques suivie de trois diplômes de 3e cycle, Mbaye Touré a été la tour centrale des débats sur la nature des fonds mis à disposition du maire, mais il a également de manière limpide fait l’historique de la caisse d’avance depuis 1983 jusqu’à sa réglementation à partir de 1997.
 
A ses yeux, lui qui a été nommé gestionnaire de la caisse d’avance en 2002 par l’ex maire Pape Diop, cette caisse «n’était qu’un support pour virer des fonds politiques», notamment avec l’arrêté du 31 janvier 2003. Au fil des débats, ses explications ont semblé convaincre beaucoup de monde dans la salle 4 du palais de justice. A un moment, alors que l’agent judiciaire de l’Etat Antoine Felix Diome ne parvenait pas à le déstabiliser dans on interrogatoire, c’est le président Lamotte qui est intervenu pour l’encourager, non sans lâcher à son endroit, par mégarde peut-être, une petite phrase : «Vous expliquez bien…Continuez »
Le procès reprend ce matin.
 
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