Marine Le Pen
Que vient faire la cheffe du Rassemblement national au Sénégal ? Pour son premier voyage à l’étranger depuis l’élection présidentielle française d’avril 2021, la cheffe du Rassemblement national (RN) a choisi Dakar. Elle y sera mardi, mercredi et jeudi en compagnie de plusieurs hauts responsables du mouvement d’extrême-droite, indique le « quotidien libéral » français « l’Opinion » dans son édition du jour. Un voyage considéré comme « l’aboutissement » d’un processus de « discussions et d’échanges de qualité » qu’elle entretient « avec un certain nombre de leaders politiques sénégalais », explique Nicolas Lesage, son conseiller politique et ex-directeur de cabinet.
Entretiens avec quelles autorités sénégalaises ?
Des « échanges bilatéraux » sont annoncés « avec des responsables politiques sénégalais de l’exécutif et du législatif », de même qu’un plaidoyer en faveur d’un siège permanent du Sénégal au Conseil de sécurité des Nations unies, une perspective que Marine Le Pen avait d’ailleurs brandie lors de sa campagne électorale présidentielle. Mais aucun nom de dirigeant sénégalais du pouvoir ou de l’opposition n’est avancé pour rencontrer la cheffe du RN. En effet, la réputation de raciste qui colle aux responsables nationaux et locaux du parti d’extrême-droite, ainsi que leurs positions ridicules et politiciennes contre les immigrés africains de France ne facilitent pas la tenue d’entretiens entre Le Pen et des autorités sénégalaises. Il est donc peu probable qu'elle décroche des entretiens "officiels" à Dakar.
Dans la foulée de son échec présidentiel d’avril dernier, elle a pu capitaliser sur le « désir de changement » des Français pour faire entrer 91 députés RN lors des législatives de juin 2021, le plus gros contingent de parlementaires que le mouvement créé par son père Jean Marie Le Pen n’a jamais obtenu en France.
Marine Le Pen, présidente du groupe parlementaire RN et membre de la Commission des Affaires étrangères de l’assemblée nationale, rendra visite aux Eléments français du Sénégal (EFS), Dakar étant l’une des quatre bases militaires françaises en Afrique francophone (avec le Gabon, la Côte d’Ivoire et Djibouti, en plus des « emprises » au Niger, au Burkina Faso et au Tchad). Selon « l’Opinion », elle s’intéressera aussi à des projets agricoles et des sociétés agro-alimentaires sénégalais « à l’heure où les risques de famine ne sont pas à écarter dans plusieurs régions d’Afrique. » D’où les deux thématiques qui marqueront la visite : l’agriculture et l’autosuffisance alimentaire, d’une part, la sécurité et la stabilité de la zone sahélienne, souligne Nicolas Lesage.
Candidate en préparation pour 2027
Probablement future candidate à la présidentielle de 2027, Marine Le Pen entend se construire ses propres réseaux sur le continent africain, en particulier dans ce qui est appelé le « pré-carré français » en Afrique francophone. Les difficultés politiques actuelles de la diplomatie française au Mali et au Burkina Faso, la réalité de ce qui est nommé « sentiment anti-français » dans de larges franges des jeunesses et élites africaines, de même que la persistance de la pauvreté et du sous-développement apparaissent comme des facteurs participant au rejet de l’ancienne métropole. Pour Le Pen, qui a élargi ses consultations à de nombreux spécialistes des relations franco-africaines, une nouvelle « vision géopolitique » de la France est nécessaire pour arrêter la spirale anti-française.
A ce propos, Marine Le Pen, dans une tribune publiée dans le même numéro de L’Opinion, accuse l’Union européenne d’une « tentation » visant à « imposer à ses partenaires africains des conditionnalités sociétales, ignorant leurs identités singulières plutôt que de trouver le moyen de leur permettre de s’adapter aux critères climatiques et de durabilité qui transforment le commerce mondial. »
A Dakar, la cheffe du Rassemblement national rencontrera également ses compatriotes. Ceux-ci n’ont pas été nombreux à voter pour elle lors du second tour de la présidentielle d’avril 2021. Marine Le Pen avait recueilli moins de 17% des suffrages contre plus de 83% à Emmanuel Macron. Au premier tour, avec 6%, elle était arrivée largement derrière Jean-Luc Mélenchon (38%) et Emmanuel Macron (33%).