Sarkozy renvoyé en procès dans l'affaire Bygmalion, sa défense va faire appel

Mardi 7 Février 2017

PARIS (Reuters) - Le premier juge d'instruction chargé de l'enquête "Bygmalion" a ordonné le renvoi en procès de 14 personnes, dont l'ex-président Nicolas Sarkozy, poursuivi pour financement illégal de campagne électorale en 2012, a-t-on appris mardi de source judiciaire.
 
L'ordonnance de renvoi, qui date du 3 février, n'a toutefois pas été signée par Renaud Van Ruymbeke, le deuxième juge saisi de cette enquête, ce qui ouvre la voie à un appel de la part des mis en cause, a précisé cette source.
 
Dans l'ordonnance, Nicolas Sarkozy est accusé d'avoir dépassé le plafond des dépenses électorales en 2012 en engageant des dépenses supérieures au plafond légal, "sans tenir compte de deux alertes adressées par les experts comptables de sa campagne les 7 mars et 26 avril 2012", indique cette source.
 
Ses dépenses se sont élevées à au moins 42,8 millions d'euros, soit bien au-delà du plafond légal fixé à la somme de 16,851 millions d'euros pour le premier tour et 22,509 millions pour le second tour, d'après le juge.
 
Le financement illégal de campagne électorale est passible d'une peine de 3.750 euros d'amende et d'un an de prison.
 
L'avocat de Nicolas Sarkozy a annoncé mardi dans un communiqué qu'il ferait appel de l'ordonnance qui a renvoyé son client en correctionnelle pour financement illégal de campagne électorale en 2012.
 
L'ordonnance du 3 février dernier a été signée par le juge Serge Tournaire, premier saisi de ce dossier, mais pas par Renaud Van Ruymbeke, qui en était co-saisi, ouvrant la voie à un appel de la part des mis en cause, apprenait-on plus tôt de source judiciaire.
 
"Ce désaccord manifeste entre ces deux magistrats, co-saisis d'une même information, fait rarissime pour être souligné, illustre l'inanité de cette décision", écrit mardi l'avocat Thierry Herzog dans un communiqué transmis à Reuters.
 
"Je serai donc conduit à interjeter appel de cette ordonnance, dès qu'elle me sera notifiée", ajoute-t-il.
 
Le parquet de Paris avait requis le renvoi en correctionnelle de Nicolas Sarkozy le 30 août dernier. Mais plusieurs recours avaient été déposés par certains mis en examen, retardant la décision finale des juges.
 
Dans son réquisitoire, le procureur estimait que la responsabilité de l'ex-chef de l'Etat était "pleinement engagée", notamment car il avait donné des instructions en faveur d'une augmentation des dépenses, alors même que le dépassement du plafond des dépenses était acté dès la troisième semaine de campagne.
 
FAUSSES FACTURES ET OMISSIONS DÉCLARATIVES
En mars 2012, après une note d'alerte envoyée au directeur de campagne par les experts-comptables, le candidat et son équipe avaient ainsi décidé d'une augmentation du rythme des meetings, pour le porter à un par jour, notait-il.
 
Au moment de ce réquisitoire, l'avocat de Nicolas Sarkozy, Me Thierry Herzog, avait dénoncé une "manœuvre politique grossière" et un "acharnement" envers son client, et rappelé que le Conseil constitutionnel avait déjà sanctionné son dépassement du plafond des dépenses électorales en 2012.
 
En juillet 2013, après invalidation de ses comptes de campagne, les "Sages" ont en effet estimé que Nicolas Sarkozy devait restituer au Trésor public une avance forfaitaire de 153.000 euros versée pour sa campagne perdue de 2012 et payer 363.615 euros de dépassement du plafond légal.
 
L'enquête dite "Bygmalion" portait à l'origine sur un système présumé de fausses factures destiné à masquer des dépassements de dépenses à l'UMP (dont le parti Les Républicains est l'héritier) durant la campagne présidentielle de 2012.
 
Un système de fraude "relativement simple dans son principe, et d'une ampleur considérable", selon une source judiciaire. Mais l'enquête a révélé un autre système, "plus simple encore", l'omission déclarative, selon l'accusation. Fin 2014, elle a été élargie au délit de financement illégal de campagne électorale.
 
Le dossier Bygmalion vise 18 millions d'euros de présumées fausses factures émises par Bygmalion, mais aussi d'autres dépenses de l'UMP, pour 13,5 millions d'euros.
 
Parmi les 13 autres personnes renvoyées en correctionnelle dans ce dossier figurent des responsables de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2012, dont son ex-directeur de campagne Guillaume Lambert et le député Philippe Briand, et d'anciens cadres de l'UMP et de la société de communication Bygmalion.
 
Ils sont renvoyés pour divers chefs, parmi lesquels faux, usage de faux, abus de confiance, escroquerie, complicité de ces délits, ou encore complicité de financement illégal de campagne électorale, précise la source judiciaire.
 
 
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