TARIFS PEAGES - C’est le braquage à toutes les sorties !

Mardi 8 Novembre 2016

Le président de la république a donc tranché en faveur d’Eiffage Sénégal en ce qui concerne le tarif sur la nouvelle autoroute à péage Diamniadio-Aibd-Sindia. Ce sera 1600 francs Cfa pour un tronçon de 36 km pour une concession étalée jusqu’en 2039. Si Dakar-Mbour (72 km) va revenir à 3000 francs Cfa, sa comparaison avec les 1300 francs Cfa de l’autoroute Casablanca-Rabat (87 km) donne le tournis…
 
Après quelques semaines d’un improbable « bras de fer » entre le Président de la république et le Pds d’Eiffage Sénégal relatif à la tarification à appliquer sur les nouveaux tronçons d’autoroute (encore) construits par Eiffage sur les axes Diamniadio-Aibd et Aibd-Sindia, les usagers potentiels du péage Senac savent maintenant à quelle sauce moulinette ils vont être mangés. C’est le président Macky Sall lui-même qui a tenu à leur annoncer la bonne nouvelle tout en leur demandant d’être « fiers de payer (eux-mêmes) le coût de notre progrès » pour satisfaire les appétits boulimiques de l’entreprise Eiffage Sénégal. Le couperet est sans appel : 1600 francs Cfa.

Avec une belle générosité, le chef de l’Etat a donc volé au secours de ses compatriotes (et des étrangers) usagers en leur faisant économiser la rondelette somme de 800 francs Cfa sur le tronçon global Diamniadio-Aibd-Sindia alors qu’ils devaient « initialement » débourser 2 400 francs Cfa. Il fallait le souligner.
 
Dans l’opinion publique, cette tarification est pourtant considérée comme un vrai scandale qui sauvegarde de manière indue les intérêts bien compris de Senac plus qu’il ne se soucie du pouvoir d’achat des automobilistes. L’annonce du président de la république est d’autant plus non acceptée et déplorée que les contribuables sénégalais mettent en exergue les efforts financiers de l’Etat pour soutenir le projet.
 
« Si nous avons bien écouté le chef de l’Etat, il a bien dit que le tronçon Diamniadio-Aibd, réalisé sur la base d’un partenariat public privé, a coûté 92 milliards de francs Cfa. Avec un financement de public de 69 milliards de francs Cfa contre seulement 23 milliards de francs Cfa du groupe Senac, il est incompréhensible que l’Eta ne soit pas en mesure d’offrir un tarif social aux usagers », râle un acteur de la société civile qui a conservé l’anonymat. « C’est encore un autre coup qui est porté au pouvoir d’achat de ceux qui vont emprunter ce tronçon après celui consommé sur l’axe Patte d’Oie-Diamniadio ».
 
Il y a quelques semaines, le Dr Cheikh Tidiane Dièye, d’Enda Cacid, attirait l’attention des autorités sur les anomalies qui entourent la tarification sur l’autoroute à péage, bien avant l’annonce du président de la république à l’occasion de l’inauguration du tronçon Diamniadio-Aibd-Sindia.
« Il est temps d’arrêter le groupe Senac. Nul ne peut justifier que les Marocains payent 23 Dirhams (soit 1300 francs Cfa) sur les 87 km qui séparent Casablanca et Rabat, et que les Sénégalais soient obligés de payer 1400 francs Cfa entre Dakar et Diamniadio (sur 36 km) », s’était indigné le Dr Dièye, spécialiste en Economie du développement. « Si nous poursuivons cette logique, cela voudrait dire que nous paierons environ 5000 francs Cfa pour aller à Mbour. Aucune logique économique ne peut expliquer une telle pratique, si ce n’est la pure prédation. »
 
Au total, la distorsion entre Casablanca-Rabat et Dakar-Mbour est encore plus insupportable.  Ce sera 1300 francs Cfa pour 87 km côté marocain, contre 3000 francs Cfa pour 72 km côté sénégalais. Un tarif plus que double qui fait bien les affaires d’Eiffage. Après, on pourra toujours rétorquer que comparaison n’est pas raison. Sans doute. Mais qu’ont de plus, en termes de valeur ajoutée, nos autoroutes par rapport à celles du Maroc ?
 
« Lorsqu’un Président en arrive à ça, dans son propre pays, face à une modeste entreprise qui ne doit sa force qu’à la protection de l’Etat français et de ses réseaux de clients, courtisans et d’affairistes qui peuplent l’espace présidentiel, régime après régime, avait indique Cheikh Tidiane Dièye, on peut bien se demander à quelle sauce nous serons mangés par les grandes multinationales. » (Momar DIENG)
 
 
Nombre de lectures : 1262 fois