Twitter dévisse en Bourse, dure semaine pour les réseaux sociaux

Vendredi 27 Juillet 2018

New York - Le réseau social Twitter s'est effondré en Bourse vendredi, perdant plus de 20%, après avoir fait part d'une baisse du nombre de ses utilisateurs, au lendemain du décrochage spectaculaire de Facebook et au terme d'une semaine noire pour les réseaux sociaux.

L'action de l'oiseau bleu a fini en repli de 20,5% à 34,12 dollars.

Même si l'action Twitter est plus habituée aux yoyos, sa chute rappelle celle qui a suivi jeudi les résultats de Facebook, le premier réseau social au monde perdant également 19% en une seule séance, effaçant en une seule journée près de 120 milliards de dollars de capitalisation boursière en une seule séance, du jamais vu à Wall Street.

Facebook a encore reculé vendredi, finissant en baisse de 0,78% à 174,89 dollars.

Pourtant, Twitter avait publié vendredi un bénéfice historique de 100 millions de dollars, le troisième trimestre d'affilée dans le vert après plus de dix ans de pertes, mais les regards se sont concentrés sur la fréquentation de la plate-forme.

Le nombre d'utilisateurs actifs mensuels, paramètre publié chaque trimestre par le réseau social, a ainsi reculé d'un million, à 335 millions, alors que le marché l'attendait en légère hausse.

Dans les documents publiés vendredi et durant la conférence téléphonique de présentation, les dirigeants du groupe ont lié ce recul aux multiples initiatives de rationalisation et de nettoyage de la plate-forme.

Twitter a fait un grand ménage depuis le début de l'année pour tenter de se débarrasser des utilisateurs qui tenteraient de se servir de ce canal à des fins de propagande ou de prospérer grâce à une économie de faux comptes et de faux abonnés.

Des dizaines de millions de comptes ont été supprimés à cette fin, même si le directeur financier Ned Segal a précisé vendredi qu'il s'agissait d'utilisateurs inactifs, non pris en compte dans la population des utilisateurs mensuels.

- "Des vents contraires" -

Twitter cherche aussi à rationaliser le fonctionnement de sa plate-forme pour les utilisateurs, qui ont parfois du mal à faire un tri efficace dans le flux qui se déverse sur leur fil.

Le groupe de San Francisco (ouest) entend se positionner en site légitime pour s'informer, en complément de sa dimension sociale.

Revenu à la tête de l'entreprise mi-2015 après en avoir quitté la direction opérationnelle en 2008, le cofondateur Jack Dorsey s'est lancé dans une réorientation stratégique avec la rentabilité en priorité.

La stratégie a été validée début 2018, avec la publication du premier bénéfice de Twitter, près de douze ans après sa création.

Avec les mesures prises depuis son retour et plus encore depuis le début de l'année, Jack Dorsey s'attache à faire de Twitter une entreprise respectable, prisée des annonceurs, et se débarrasser de l'image de grand fatras, parfois terrain d'expression de propagande et de haine, qui lui était régulièrement accolée.

"Nous voulons que les gens se sentent libres de s'exprimer, en sécurité", a assuré M. Dorsey vendredi.

Mais la patience n'est pas la première des caractéristiques des marchés boursiers, qui ont surtout retenu vendredi la baisse du nombre d'utilisateurs.

Ils avaient déjà eu la main lourde avec Facebook la veille, après la publication de prévisions jugées pessimistes et d'une progression du nombre d'utilisateurs inférieure aux attentes.

"Le marché s'était emballé et les prix s'ajustent à des attentes plus modérées", selon Daniel Ives, responsable de la stratégie au sein du cabinet GBH Insights.

Pour lui, c'est surtout le résultat de la pression nouvelle mise sur les réseaux sociaux pour offrir davantage de sécurité à leurs utilisateurs, consécutive notamment au scandale Cambridge Analytica et à la mise en place de la directive européenne relative à la protection des données (RGPD).

"Cela a créé des vents contraires", dit-il, qui amenuisent la capacité de ces sociétés à croître.

Cette semaine a aussi souligné, selon l'analyste, le contraste entre les réseaux sociaux et les autres géants américains des nouvelles technologies, Amazon, Apple ou Google, qui bénéficient, eux, au contraire, "de vents portants avec le +cloud+ et le commerce électronique".

Pour autant, "les réseaux sociaux sont encore là et bien là", estime Jennifer Grygiel, professeure à l'université de Syracuse et spécialiste du sujet.

"Ce qui a changé", dit-elle, "c'est que le public et les régulateurs n'acceptent plus le discours de com' et le mythe selon lequel ils seraient trop difficiles à contrôler."
 
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