Accusé de faiblesse face à Pékin, le gouvernement britannique a assuré lundi qu’il se défendrait contre toute tentative de déstabilisation, après une affaire d’espionnage qui ravive les tensions entre les deux pays.
Le gouvernement chinois a dénoncé des accusations « dénuées de fondement » après l’arrestation en mars d’un homme soupçonné d’espionnage au Parlement britannique.
Cette brouille intervient alors que Londres a affiché récemment une volonté de dialogue avec le géant asiatique, après des années de relations difficiles.
Mais la pression monte sur le premier ministre conservateur Rishi Sunak, appelé à adopter une ligne plus dure vis-à-vis de la Chine.
S’exprimant lundi après-midi devant le Parlement, le vice-premier ministre Oliver Dowden a promis que le gouvernement « ferait tout pour protéger le Royaume-Uni de toute activité émanant d’un État étranger et visant à miner notre sécurité nationale, notre prospérité et nos valeurs démocratiques ».
S’il n’a pas qualifié Pékin de « menace » comme le réclament certains élus de son propre camp, il a répété la position officielle de l’exécutif britannique selon laquelle « la Chine représente un défi systémique » pour le Royaume-Uni.
La police britannique a annoncé samedi avoir arrêté en mars un homme d’une vingtaine d’années à son domicile d’Édimbourg pour espionnage, sans dévoiler son identité ni donner de précisions sur ses activités. Il a été maintenu depuis en liberté et n’a pas été inculpé.
Selon le Times, il agissait au sein même du parlement, auprès des conservateurs au pouvoir. Il « était directeur d’un groupe politique influent sur Pékin co-fondé par le secrétaire d’État à la sécurité », et « employé comme chercheur » par Alicia Kearns, la présidente de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des communes.
Cet homme a affirmé lundi être « totalement innocent », démentant être un « espion chinois » dans un communiqué publié par ses avocats.
« J’ai passé ma carrière à essayer d’éduquer les autres sur le défi et les menaces que représente le parti communiste chinois », s’est-il défendu, sans dévoiler son identité.
« Dénigrement » selon Pékin
Outre ce chercheur au parlement, la police a arrêté en mars un autre homme, d’une trentaine d’années, pour des soupçons d’infractions à la loi sur les secrets officiels.
« La prétendue affirmation selon laquelle la Chine espionne le Royaume-Uni est totalement dénuée de fondement et la Chine la rejette fermement », a dénoncé Mao Ning, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, lors d’un breffage.
« Nous demandons instamment à la partie britannique de cesser de diffuser de fausses informations et de mettre fin à ses manœuvres politiques antichinoises et à son dénigrement malveillant », a-t-elle ajouté.
L’affaire s’est invitée au G20 en Inde où le premier ministre britannique Rishi Sunak s’est dit préoccupé « au sujet d’interférences chinoises dans la démocratie parlementaire britannique » lors d’une rencontre dimanche avec son homologue chinois Li Qiang.
« Dialoguer » avec Pékin
Après « l’âge d’or » voulu par l’ex-premier ministre David Cameron en 2015, les relations entre Londres et Pékin se sont nettement dégradées ces dernières années.
Les deux pays ont des positions divergentes notamment sur la répression du mouvement pro-démocratie à Hong Kong, ex-colonie britannique, ainsi que sur le sort de la minorité musulmane ouïghoure dans la région du Xinjiang ou sur les accusations de violation des droits humains au Tibet.
Plusieurs parlementaires britanniques ont notamment été sanctionnés par Pékin après avoir critiqué la politique chinoise envers la minorité ouïghoure.
L’un d’entre eux, Iain Duncan Smith, a dénoncé la « faiblesse » du gouvernement.
Mais Downing Street a assuré que ce serait une erreur de « réduire » l’approche du Royaume-Uni à l’égard de la Chine à « un seul mot ».
« Nous devons saisir l’occasion de dialoguer avec la Chine, et ne pas nous contenter de crier depuis la ligne de touche », a déclaré un porte-parole du premier ministre.
Le ministre britannique des Affaires étrangères, James Cleverly, a effectué fin août une visite officielle en Chine, la première d’un chef de la diplomatie britannique depuis 2018.
Quelques semaines plus tôt, la commission du renseignement et de la sécurité de la Chambre des communes avait affirmé que la Chine ciblait le Royaume-Uni, démuni pour y faire face. [AFP]