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Emmanuel Macron, un outsider de plus en plus crédible

Vendredi 13 Janvier 2017

PARIS (Reuters) - Réunions publiques bondées, ralliements quasi quotidiens, sondages en hausse : l'ancien ministre de l'Economie Emmanuel Macron est un outsider de plus en plus crédible pour le second tour de l'élection présidentielle du printemps prochain.
 
Une crédibilité renforcée par le terne premier débat, jeudi soir, entre les candidats de la primaire organisée par le Parti socialiste, estime le politologue Jérôme Sainte-Marie, président de la société de conseil PollingVox.
 
"Je ne pense pas que le spectacle d'hier soit de nature à freiner l'ascension d'Emmanuel Macron", a-t-il dit à Reuters.
 
De sondage en sondage, l'ex-conseiller de François Hollande, qui a refusé de se plier au jeu des primaires, s'est installé dans le statut de "troisième homme" de la présidentielle.
 
En embuscade derrière le candidat de la droite, François Fillon, et la présidente du Front national (FN), Marine Le Pen, il est même parfois donné qualifiable pour le second tour.
La multiplication des attaques dont il est la cible témoigne de ce statut d'outsider en pleine ascension.
Une des dernières en date est venue de la maire socialiste de Paris, Anne Hidalgo, qui le juge responsable, avec François Hollande et l'ex-Premier ministre Manuel Valls, de "l'immense gâchis du quinquennat".
 
A droite, le président des Républicains, Bernard Accoyer, dénonce une "vaste opération de marketing électoral" et une "escroquerie politique" du "fils parricide" du chef de l'Etat.
 
Quant à l'autre outsider de la gauche, Jean-Luc Mélenchon, il estimait dans Le Monde du 5 janvier que le seul "vrai choix" des électeurs du PS était entre lui et l'ex-ministre.
Une façon pour le candidat de "La France insoumise" de reconnaître en Emmanuel Macron un adversaire digne de lui.
 
LA DIGUE DU PS CÉDERA-T-ELLE ?
Le baromètre Elabe pour Les Echos le place en tête des personnalités politiques françaises avec 41% d'avis positifs (+2 points en un mois), devant François Fillon, troisième, qui perd quatre points à 35%, et Marine Le Pen, septième 29% (+2).
 
Les principaux candidats à la primaire de la gauche sont loin derrière. A la sixième place, Arnaud Montebourg (30%, +2) devance son ancien collègue du gouvernement Benoît Hamon, 10e (27%, +7) et l'ex-Premier ministre Manuel Valls, 18e (21%, -10).
 
Le meeting parisien d'Emmanuel Macron, qui a réuni 10.000 à 15.000 personnes le 10 décembre, beaucoup plus que tout autre candidat de droite ou de gauche, a été un tournant. Depuis lors, il fait pratiquement salle comble à chaque réunion publique.
 
Son mouvement, "En Marche !", lancé en avril 2016, revendique aujourd'hui plus de 135.000 adhérents, 3.145 comités locaux et un peu plus de quatre millions d'euros de dons.
 
Il ne se passe pas de jours sans qu'il n'enregistre des ralliements de gauche, du centre ou de la société civile. Il mord même sur l'électorat du FN dans les intentions de vote.
 
Une cinquantaine de parlementaires du PS et un nombre encore plus important de maires, selon son équipe de campagne, ont ainsi fait fi des menaces d'exclusion du parti.
 
Un député PS proche de François Hollande reconnaît que la candidature Macron est "un élément perturbateur fort" et prédit un basculement de nombreux élus PS en sa faveur en cas de victoire d'Arnaud Montebourg ou de Benoît Hamon à la primaire.
 
Un avis partagé par Jérôme Sainte-Marie, selon qui "la faiblesse des candidats du PS dans les sondages agite beaucoup les esprits parmi les élus locaux socialistes" : "Il y a une réelle possibilité qu'à un moment donné la digue cède et qu'il y ait une forme d'hémorragie vers Emmanuel Macron", estime-t-il.
 
RECOMPOSITION AU CENTRE ?
Sans se rallier explicitement, Ségolène Royal, ministre de l'Environnement qui fut elle-même une candidate hors norme bien qu'investie par le PS en 2017, ne rate pas une occasion de dire tout le bien qu'elle pense d'Emmanuel Macron.
 
Une des plus belles prises de la semaine est l'économiste Jean Pisani-Ferry, qui a abandonné la tête de France Stratégie, organisme de réflexion placé auprès du gouvernement, pour coordonner son projet, renforçant ainsi sa crédibilité.
 
Pendant que le président de l'Union des démocrates et indépendants, Jean-Christophe Lagarde, négocie laborieusement les conditions du ralliement de l'UDI à François Fillon, des figures du parti centriste, comme les anciens ministres Jean Arthuis et Serge Lepeltier, ont rejoint "En Marche !".
 
Une quinzaine de membres ou sympathisants du MoDem ont aussi annoncé leur ralliement et appelé leur parti à en faire autant, sans attendre de savoir si leur président, François Bayrou, se présente ou apporte son soutien à un des candidats en lice.

L'ancienne ministre de l'Environnement Corine Lepage, co-fondatrice du MoDem, et le député européen Jean-Marie Cavada, lui aussi passé par ce parti, ont sauté le pas cette semaine.
 
Ce qui fait dire au politologue Thomas Guénolé qu'Emmanuel Macron est plus un facteur de recomposition du centre que de la gauche : "Comme François Bayrou menaçait à la fois Sarkozy et Royal en 2007, Macron menace à la fois Fillon et le futur candidat du PS en 2007", explique-t-il.
 
Est-il au contraire "surtout un problème pour la gauche", comme le soutient François Fillon ? Pour le député LR Thierry Solère, porte-parole du candidat de droite, il convient de ne pas sous-estimer le phénomène Macron.
 
"C’est un homme de gauche mais il est capable de prendre des voix sur la droite. Je ne le prends pas à la légère", dit-il, non sans s'interroger : "Il y a une bulle. Va-t-elle éclater ?"
 
Une interrogation partagée par la directrice générale de l'institut d'études Odoxa, Céline Bracq, qui se dit incapable de savoir à ce stade si Emmanuel Macron restera un "personnage stendhalien ambitieux et séduisant" dont l'aventure "finira mal" ou s'il parviendra à convaincre de sa stature présidentielle : "Il faut attendre encore un peu que ça mûrisse."
 
 
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