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Les Américains sous le feu des critiques en Irak après des raids meurtriers contre des pro-Iran

Lundi 30 Décembre 2019

Bagdad menace de "revoir" ses relations avec Washington et des manifestants brûlent des drapeaux des Etats-Unis: la mort d'au moins 25 combattants pro-Iran dans des raids de représailles américains suscitent lundi l'indignation en Irak.
 
Ces raids "poussent l'Irak à revoir ses relations et son cadre de travail sur les plans sécuritaire, politique et légal pour protéger sa souveraineté", a menacé le gouvernement irakien.
 
Vendredi, 36 roquettes avaient frappé une base américaine dans le centre du pays, tuant un sous-traitant américain et blessant des soldats américains.
 
En représailles, les Etats-Unis --qui avaient promis une réponse "ferme" face à la multiplication d'attaques qu'ils attribuent à des factions pro-Iran-- ont mené dimanche des raids aériens contre des bases des brigades du Hezbollah, une faction pro-Iran du Hachd al-Chaabi.
 
Ces frappes, près de la Syrie, ont fait "25 morts et 51 blessés", combattants et commandants, selon le Hachd, une coalition de paramilitaires formée pour lutter contre le groupe Etat islamique (EI) et désormais intégrée aux forces irakiennes.
 
"Les forces américaines ont agi en fonction de leurs priorités politiques et non de celles des Irakiens", a dénoncé le gouvernement irakien.
 
Les raids des Etats-Unis font passer pour le moment au second plan la révolte inédite contre le pouvoir à Bagdad et son parrain iranien.
 
Dans la quasi-totalité des villes du sud du pays, des manifestants ont conspué Washington, brûlant ou piétinant des drapeaux américains.
 
Les brigades du Hezbollah ont annoncé des obsèques publiques mardi à Bagdad, près de la Zone verte où siège l'ambassade américaine, et celles-ci pourraient se transformer en démonstration de force.
 
Pour Téhéran --grand ennemi de Washington mais, comme lui, allié de l'Irak-- ces frappes montrent le "soutien au terrorisme" des Etats-Unis.
 
- "Dégager l'ennemi américain" -
 
Aux Etats-Unis, le chef du Pentagone Mark Esper a évoqué un "succès" et dit avoir discuté avec le président américain Donald Trump "des autres options sur la table". Le secrétaire d'Etat adjoint américain chargé du Moyen-Orient, David Schenker, a lui assuré que cette réponse "proportionnée" visait la "désescalade".
 
Mais en Irak, les frappes américaines suscitent l'indignation. Des dizaines de députés ont signé un appel pour que soit réexaminé l'accord de coopération américano-irakien encadrant la présence de 5.200 soldats américains dans le pays.
 
Les brigades du Hezbollah ont appelé à "dégager l'ennemi américain" tandis qu'une autre faction pro-Iran, Assaïb Ahl al-Haq, a jugé que la présence militaire américaine était devenue "une source de menace" qu'il fallait "tout faire pour expulser". Et même les partis d'opposition, réputés proches de Washington, ont dénoncé les frappes américaines.
 
En soirée, le Premier ministre démissionnaire Adel Abdel Mahdi a reconnu en avoir été informé peu avant qu'ils n'aient lieu par M. Esper.
 
"Nous avons essayé de prévenir des commandants", a-t-il poursuivi, visiblement en vain, étant donné l'important bilan humain et les dégâts matériels.
 
Les attaques contre des intérêts américains ou des bases des pro-Iran font aussi redouter ce contre quoi les dirigeants irakiens mettent en garde depuis des mois: que leurs deux alliés américain et iranien utilisent l'Irak comme champ de bataille.
 
"Les autorités doivent empêcher que l'Irak ne devienne un espace où régler ses comptes", a prévenu le bureau du grand ayatollah Ali Sistani, figure tutélaire de la politique irakienne.
 
De son côté, Moscou a mis en garde contre une escalade qui "pourrait fortement déstabiliser" un Moyen-Orient en pleine tourmente.
 
En deux mois, 11 attaques à la roquette ont visé des intérêts américains en Irak, pays en pleine révolte où Washington a perdu de son influence.
 
Pour plusieurs d'entre elles, des sources américaines avaient pointé du doigt les brigades du Hezbollah, estimant que les pro-Iran sont désormais une menace plus importante que les cellules clandestines de l'EI.
 
- Révolte contre Bagdad et Téhéran -
 
Cette escalade survient alors qu'une grande partie de l'Irak est le théâtre d'une révolte depuis début octobre, les manifestants appelant à mettre à bas un système politique installé par les Américains dans la foulée de leur invasion en 2003 et désormais noyauté par les Iraniens.
 
Ce mouvement marqué par près de 460 morts et 25.000 blessés a entraîné une crise politique, dans laquelle l'Iran joue un rôle central.
 
Depuis la démission du gouvernement il y a un mois, Téhéran et ses alliés en Irak poussent pour placer un de leurs hommes à la tête du futur cabinet. En face, le président Barham Saleh menace de démissionner à son tour.
 
Les manifestants restent mobilisés à Bagdad et paralysent toujours administrations et écoles dans la quasi-totalité des villes du Sud. (AFP)
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