Les élections au Burkina Faso ne sont pas «une priorité» contrairement à la «sécurité», dans ce pays miné par les violences djihadistes, a affirmé le capitaine Ibrahim Traoré, à la télévision nationale, près d’un an après son arrivée au pouvoir par un coup d’État.
Le capitaine a également annoncé une «modification partielle» de la Constitution, un texte qui reflète selon lui «l’avis d’une poignée de personnes éclairées», au détriment d’une «masse populaire». Les élections, «ce n’est pas une priorité, ça, je vous le dis clairement, c’est la sécurité qui est la priorité», dans ce pays miné par les violences djihadistes, a répondu Ibrahim Traoré aux journalistes qui l’interviewaient
«Il faut qu’on assure la sécurité»
Les médias évoquaient des élections théoriquement prévues en juillet 2024. Si les élections ne constituent pas «une priorité», Ibrahim Traoré a néanmoins ajouté que «notre pari tient toujours» pour organiser un scrutin, sans préciser de date.
À la tête du Burkina Faso depuis le 30 septembre 2022, il a rappelé avoir déclaré «le premier jour» de sa prise de pouvoir vouloir «faire le minimum de temps possible dans cette lutte».
«Il n’y aura pas d’élection qui va se concentrer uniquement à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso et dans quelques villes autour, il faut que tous les Burkinabè choisissent leur président», a-t-il affirmé, évoquant les deux villes épargnées par les attaques djihadistes fréquentes. À propos d’un changement éventuel de la loi fondamentale burkinabè, Ibrahim Traoré a estimé que «les textes actuels ne nous permettent pas de pouvoir évoluer sereinement».
«On va toucher à un volet» et faire une «modification partielle» de la Constitution, a-t-il dit, déplorant que le texte ne reflète selon lui que «l’avis d’une poignée de personnes éclairées», au détriment d’une «masse populaire». Plusieurs milliers de personnes ont manifesté vendredi à Ouagadougou et dans d’autres villes du pays en soutien au régime militaire, appelant à l’adoption d’une nouvelle Constitution.
Pas de malaise dans l’armée
Interrogé sur la tentative de coup d’État dévoilée mercredi par le gouvernement, avant l’arrestation de quatre officiers – deux autres sont en fuite -, Ibrahim Traoré a évoqué «des individus manipulés», affirmant qu’il n’y avait «pas de malaise» dans l’armée. Lors de sa prise de pouvoir, Ibrahim Traoré avait notamment invoqué la dégradation de la situation sécuritaire pour justifier ce coup d’État.
Depuis 2015, des violences djihadistes récurrentes ont fait au seul Burkina Faso plus de 17’000 morts et plus de deux millions de déplacés internes. «Nous sommes en guerre», a déclaré Ibrahim Traoré. Le président de transition, qui mise sur le recrutement massif de supplétifs civils de l’armée, les Volontaires pour la défense de la Patrie (VDP), a assuré de leur «bonne collaboration» avec les soldats. soir à la Radio télévision burkinabè (RTB).
Représentant des dizaines de milliers de personnes, les VDP, qui paient un lourd tribut lors des attaques djihadistes, «sont peut-être plus nombreux que l’armée», a précisé Ibrahim Traoré. Il a par ailleurs blâmé «certains acteurs» qui n’aident pas à renforcer les équipements de l’armée. «On refuse de nous vendre» du matériel, a-t-il déploré, ajoutant que «la plupart de nos équipements sont russes» et qu’il n’y a «pas beaucoup» d’«équipements français».
«Soit vous êtes avec la patrie, soit vous êtes contre»
Depuis qu’il a obtenu le départ des soldats français de son sol en février, le Burkina Faso s’est cherché de nouveaux alliés. Le pays s’est notamment rapproché de la Russie, qui «n’a jamais colonisé un seul pays», a affirmé Ibrahim Traoré. Le Burkina Faso a fait alliance avec le Mali et le Niger, deux pays dirigés par des régimes militaires, avec qui il a créé l’Alliance des États du Sahel (AES), une coopération de défense.
«Nous soutenons l’armée du Niger», menacé d’une intervention armée par des États ouest-africains depuis un coup d’État, «pour protéger sa population», a indiqué le capitaine Traoré. Après des suspensions sine die et temporaires de médias français et d’une radio burkinabè, le capitaine Traoré a affirmé que «les libertés individuelles ne doivent pas primer sur les libertés collectives». «Soit vous êtes avec la patrie, soit vous êtes contre la patrie», a-t-il ajouté. [AFP]