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CARTE D’IDENTITÉ BIOMÉTRIQUE CEDEAO ET REFONTE PARTIELLE DES LISTES ÉLECTORALES: De la gabegie financière à l’exclusion organisée

Jeudi 17 Novembre 2016

Par Dr Cheikh Tidiane Dièye Plateforme « Avenir, Senegaal bi ñu bëgg »
 
Le lancement en grande pompe, le 4 octobre 2016, des opérations d’instruction de la carte biométrique CEDEAO et de refonte, soi-disant partielle, des listes électorales ne saurait masquer le management déficient de ce processus.
 
L’urgence volontairement organisée a abouti à l’octroi, sans appel d’offres, à la société IRIS du marché de confection des cartes pour la somme colossale de 50 milliards de francs CFA (75 millions d'euros), après que la même société eut été adjudicataire du marché des passeports pour le faramineux montant de plus de 118 milliards FCFA (180 millions d'euros).
 
Pour la Plateforme « Avenir, Senegaal bi ñu bëgg » ce premier acte de mal gouvernance traduit, d’une part, l’opacité d’un marché de gré à gré symptomatique de pratiques aux antipodes des exigences d’éthique et de transparence et, d’autre part, la volonté d’orienter le processus à des fins politiciennes.
 
En effet, le management actuel du processus ne manque pas de susciter des inquiétudes légitimes quant à la volonté réelle des autorités de créer les conditions permettant à tous les citoyens concernés d’obtenir leurs cartes avant les élections législatives de mai 2017.
Il ne fait aucun doute que le dispositif qui est actuellement mis en place n’est pas calibré pour garantir ce résultat. Il suffit pour s’en convaincre de faire le rapprochement entre la carte électorale et le nombre de commissions opérationnelles pour constater qu’il sera impossible d’atteindre le résultat attendu si des mesures correctives fortes ne sont pas immédiatement mises en œuvre.
 
Aux Parcelles, une seule commission pour 250 000 électeurs inscrits
La situation aux Parcelles Assainies illustre parfaitement la situation. Une seule commission y a été mise en place au niveau de la sous-préfecture, qui polarise Cambérène, Patte d’Oie et Grand-Yoff, pour un total de 250 000 électeurs inscrits.

Sur la base de la moyenne actuelle de 150 enregistrements par jour, il faudrait pour finaliser le processus d’enrôlement - qui, dans l’exemple qui est donné, ne prend pas en compte ceux qui doivent s’inscrire pour la première fois - 1666 jours, soit plus de 4 ans et demi (y compris les samedi et dimanche) alors que nous sommes à 6 mois des élections législatives.
 
La DAF du ministère de l’Intérieur a publié le 9 novembre 2016 un communiqué dans les journaux qui confirme la moyenne de 152 enrôlements par jour pour les 11 commissions administratives mises en place à Dakar, Pikine, Guédiawaye et Rufisque, soit un total de 1672 enrôlements par jour.
 
Ce communiqué a conclu par cette affirmation surprenante : « Le point de la situation réalisé au 04 novembre 2016, a permis de constater un rythme moyen de 152 demandes d’enrôlement par jour, ce qui laisse entrevoir sur cette base l’atteinte des objectifs, qui est l’enrôlement d’au moins 4 millions d’électeurs sur 5 mois d’opération ».

Or, il résulte des données de 2014 qu’il y avait 1 571 751 électeurs inscrits. Sur la base d’une moyenne de 1672 enrôlements par jour, il aurait fallu 940 jours, soit plus de deux ans et demi, y compris les samedis et dimanches, pour terminer un processus similaire.
 
En procédant aux enrôlements tous les jours de ces 6 mois nous séparant des législatives, soit 180 jours, il faudrait atteindre une moyenne quotidienne de 8731 enrôlements pour les 1 571 751 électeurs inscrits à Dakar dans le fichier de 2014, sans compter les nouvelles inscriptions. Sur la base d’une moyenne quotidienne de 152 enrôlements par commission, il faudrait installer 57 commissions à Dakar, Guédiawaye, Pikine et Rufisque pour espérer atteindre l’objectif.
 
Des commissions invisibles…
A l’échelle du territoire national, et sur la base du total des électeurs inscrits de 5 312 588 et d’une moyenne de 152 enrôlements par jour, c’est 194 commissions qu’il faudrait installer.
Certes, l’on nous dit que 300 commissions itinérantes ont été créées pour combler d’éventuels déficits ou retards, mais à notre connaissance ces commissions n’ont pas démarré jusqu’à présent, à l’exception de celle « ayant enrôlé les éminents membres des institutions de la République». De surcroît, leur création n’a été, ni placée sous le signe de la transparence, ni basée sur une répartition/distribution géographique, sous le fallacieux prétexte de la « compétence nationale ».
 
Sur un autre plan, ce processus est illustratif d’une certaine gabegie et constitue un échec sur le plan économique, car engendrant non seulement des dépenses publiques exorbitantes, mais aussi des coûts économiques pour le pays, du fait de l’absentéisme de travailleurs obligés de se déplacer à plusieurs reprises pendant les heures de service pour essayer de se faire inscrire, vaille que vaille.
 
En tout état de cause, tout porte à croire que le pouvoir en place cherche à exclure du processus électoral les citoyens qui ne lui seraient pas éventuellement favorables, en s’assurant de l’inscription, sinon exclusive, du moins majoritaire, de ses militants, partisans et clients et en faisant payer, au détour, 10.000 francs la double carte d’identité et d’électeur, alors que, comme chacun le sait, le droit de vote est un droit fondamental et inaliénable.

C’est pourquoi la Plateforme « Avenir, Senegaal bi ñu bëgg » estime que le pouvoir devrait savoir qu’il serait totalement et exclusivement responsable de tout trouble à la paix sociale et à l’ordre public qui risquerait de survenir, s’il ne revenait pas sur la décision de faire payer la carte d’électeur aux citoyens, à quelque date que ce soit, et s’il n’associait pas les représentants des partis politiques et coalitions de partis aux différentes commissions administratives, dont le travail doit permettre la mise en place d’un nouveau fichier électoral.
 
Quant aux citoyens-électeurs, la Plateforme les invite, pour autant qu’ils aient conscience de leurs propres intérêts, à être attentifs aux pratiques et dérives de toutes sortes qui constituent un frein à notre développement économique et social partagé et à s’inscrire en faveur d’une offre politique novatrice adossée à nos valeurs de probité, d’éthique et de générosité, en identifiant pour cela des femmes et des hommes de premier plan, crédibles, porteurs d’enjeux et ancrés dans leurs communautés et leurs milieux socioprofessionnels, pour en faire un vrai recours à la gestion patrimoniale et clientéliste actuelle
 

 
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