La Cour suprême des États-Unis a annoncé lundi qu’elle n’entendrait pas l’appel des sociétés pétrolières et gazières qui tentent de bloquer les poursuites visant à tenir l’industrie responsable de milliards de dollars de dommages liés aux changements climatiques.
L’ordonnance permet à la Ville d’Honolulu de poursuivre son procès contre les sociétés pétrolières et gazières. Le responsable de la résilience de la ville, Ben Sullivan, a souligné qu’il s’agissait d’une décision importante qui protégerait « les contribuables et les communautés des coûts et des conséquences immenses de la crise climatique causée par la mauvaise conduite des accusés ».
L’industrie pétrolière et gazière a été confrontée à une série de procès l’accusant d’avoir trompé le public sur la façon dont les combustibles fossiles contribuent au changement climatique. Les gouvernements d’États comme la Californie, le Colorado et le New Jersey réclament des milliards de dollars de dommages et intérêts pour des causes telles que les incendies de forêt, la montée du niveau de la mer et les tempêtes violentes. Ces poursuites interviennent dans le cadre d’une vague d’actions en justice aux États-Unis et dans le monde entier visant à faire pression sur les tribunaux pour que des mesures soient prises contre les changements climatiques.
Les sociétés pétrolières et gazières ont fait appel devant la Cour suprême après que la plus haute cour d’Hawaii a autorisé la poursuite. Les sociétés concernées comprennent Sunoco, Shell, Chevron, Exxon Mobil et BP, dont beaucoup ont leur siège social au Texas.
Les sociétés ont fait valoir que les émissions sont un problème national qui devrait plutôt être réglé devant un tribunal fédéral, où elles ont obtenu le rejet de leurs poursuites.
« Les enjeux de cette affaire ne pourraient pas être plus élevés », ont écrit les avocats dans les documents judiciaires. Les poursuites « représentent une menace sérieuse pour l’une des industries les plus vitales du pays ».
Deux visions politiques
L’American Enterprise Institute, un groupe de réflexion conservateur, a avancé que le refus d’entendre l’affaire d’Honolulu signifie que les entreprises pourraient faire face à davantage de poursuites judiciaires de la part d’activistes essayant de « se faire les régulateurs de l’énergie du pays ».
« J’espère que la Cour entendra la question un jour, dans l’intérêt de la responsabilité constitutionnelle et de l’intérêt public. » (Adam White, membre de l’American Enterprise Institute)
L’administration démocrate Biden s’est prononcée sur la demande des juges et les a exhortés à rejeter l’affaire, affirmant qu’il était juste de la maintenir devant le tribunal d’État à ce stade — bien que l’administration ait reconnu que les entreprises pourraient éventuellement l’emporter.
L’administration républicaine Trump entrante devrait adopter une vision radicalement différente du droit de l’environnement et de la production d’énergie.
Honolulu a fait valoir qu’elle avait présenté un dossier solide en vertu des lois de l’État contre le marketing trompeur et qu’elle devrait être autorisée à jouer sur ce terrain. « Les pratiques commerciales trompeuses relèvent carrément des intérêts fondamentaux et des pouvoirs historiques des États », ont écrit les avocats.
Les réglementations environnementales, quant à elles, n’ont pas toujours été bien accueillies par la Cour à majorité conservatrice. En 2022, les juges ont limité l’autorité de l’Agence de protection de l’environnement à réglementer les émissions de dioxyde de carbone des centrales électriques. En juin, la Cour a mis un terme à la règle du « bon voisinage » de l’agence en matière de lutte contre la pollution de l’air.
Le juge Samuel Alito s’est récusé de l’examen de l’appel. Il n’a pas précisé de raison, mais il possède des actions dans des sociétés concernées par les poursuites, selon sa dernière déclaration financière. [ASSOCIATED PRESS]