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La candidature de François Fillon en suspens

Mardi 31 Janvier 2017

PARIS (Reuters) - Les jours de François Fillon sont-ils comptés? La question d'une candidature alternative à la présidentielle se pose désormais avec gravité dans les rangs de la droite et du centre où l'on redoute des répliques sans fin de l'enquête judiciaire en cours.
 
Le candidat s'est déclaré mardi soir "confiant", après que son bureau à l'Assemblée nationale eut fait l'objet d'une longue perquisition dans le cadre de l'enquête sur les présumés emplois fictifs occupés par son épouse.
 
"Il y a une opération d'une extrême ampleur de calomnie très professionnelle", a-t-il dit devant le groupe EBG, un cercle de réflexion d'entrepreneurs sur l'innovation digitale.
 
Mais dans son camp, la confiance s'effrite rapidement.
"Au train où vont les choses, je crains qu'il ne faille rapidement déclencher un plan B", lâche dépité un parlementaire Les Républicains.
 
Un autre élu LR décrit un climat "surréaliste" : "Personne n'en parle (de l'affaire-NDLR). Personne ne veut bouger parce que le premier qui bouge est mort", témoigne-t-il.
"C'est tellement grave qu'on n'ose pas en parler. Personne ne veut officiellement poser la question (d'un retrait) parce que la poser c'est déjà y répondre", ajoute ce député.
 
Un troisième parlementaire avouait mardi que consigne avait été donnée par l'état-major du candidat de "se taire".
 
Mardi matin, le directeur de campagne de François Fillon, Patrick Stefanini, a détaillé à la presse les mesures sociales et économiques du candidat, non sans un préambule consacré à l'audition de François et Penelope Fillon lundi et au démenti d'une information de Mediapart sur l'emploi présumé fictif d'une chargée de mission de l'équipe du candidat.
 
"On devient inaudible, vous imaginez une campagne présidentielle au rythme des démentis et des dénégations?", déplore un élu filloniste.
 
"LE TOURNIS"
Selon un sondage Elabe pour BFM TV publié mardi, plus de trois quarts des Français (76%) ne sont pas convaincus par la défense de François Fillon, qui, s'il refuse de se soumettre au "tribunal médiatique", a livré des éléments dont l'imprécision a accentué les spéculations.
 
"François est un type qui vit très seul", avance un ami pour expliquer la confusion qui règne à droite depuis les allégations du Canard enchaîné. Des proches du Sarthois avaient confié la semaine dernière leur surprise - parfois leur dépit - d'avoir appris par la presse l'emploi présumé d'attachée parlementaire de Penelope Fillon, que les enquêteurs tentent d'établir.
 
"François est un type réglo, vous ne pouvez pas lui reprocher d'être passé sur plusieurs cadavres. Il n'avance que lorsque son chemin est sûr", déclare cet ami, dont le trouble est visible.
Mardi après-midi, le Canard enchaîné a diffusé de nouvelles informations qui révisent à la hausse le montant perçu par Penelope Fillon et deux des enfants du couple, à plus d'un million d'euros.
 
Patrick Stefanini dénonce "un acharnement" et prend à témoin "les Français qui s'interrogent et se disent que tout cela n'est pas le fruit du hasard" ou qui "espèrent qu'il n'y a pas un deux poids deux mesures de la justice" à l'égard des candidats à la présidentielle. Une allusion à l'ancien ministre de l'Economie Emmanuel Macron, nouvelle cible des fillonistes qui l'accusent, sur la foi d'un livre, d'avoir utilisé à Bercy des fonds de représentation pour lancer son mouvement "En Marche!"
 
Plusieurs députés ont relayé mardi matin lors de la réunion de groupe les interrogations, les inquiétudes et la colère des électeurs.
 
"Ça a un effet dévastateur sur le terrain. Ce sont les sommes qui choquent. Ça donne le tournis à ceux qui ont le smic ou à peine plus", témoigne un ancien soutien de Nicolas Sarkozy.
 
UNE PROCÉDURE D'EXCEPTION?
"Je n'entends pas trop 'je vais voter FN', j'entends un peu 'je vais voter Macron', mais ils disent surtout qu'ils vont rester chez eux. Il y a un sentiment de sidération, d'écoeurement et de démobilisation terrible", ajoute-t-il.
 
"Je pense que François Fillon doit parler de son programme, même si c'est plus difficilement audible", plaide le député de la Manche Philippe Gosselin, qui soutenait Alain Juppé pour la primaire.
 
"Il y a une fièvre qui aujourd'hui désespère tout le monde, (...) je crois qu'il faut prendre le temps de se poser un peu, sans pour autant évidemment considérer que tout ça n'est que de l'épiphénomène", a-t-il commenté sur BFM TV. "François Fillon est le vainqueur de la primaire, un vainqueur légitime. (...) Le plan B est un plan qu'on n'a pas à envisager à ce stade".
 
Certains y pensent pourtant, et "y travaillent", lâche un député.
Les noms de Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, ex-filloniste ralliée à Alain Juppé pour la primaire, du sénateur-maire de Troyes François Baroin, dont Nicolas Sarkozy avait fait son Premier ministre putatif, ou du président du Sénat Gérard Larcher, lieutenant historique de François Fillon, circulent.
 
"On n'a pas le temps d'organiser une nouvelle primaire. Donc soit on consulte les militants, dans une sorte de primaire fermée, soit on passe par un Conseil national extraordinaire", explique ce même député.
Et d'ajouter : "Le plus grand risque c'est un entre-deux : que Fillon ne soit pas assez déstabilisé pour se retirer mais trop pour être qualifié au second tour de la présidentielle".
 
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