Un voile de tristesse enveloppe dimanche la ville de Bethléem qui se prépare à un Noël sombre marqué par la guerre dans la bande de Gaza où l'armée israélienne a intensifié ses opérations au 79e jour d'un conflit qui laisse les civils au bord de la famine selon l'ONU.
Les bombardements se sont poursuivis dimanche, sans répit, du nord au sud de ce territoire sous blocus israélien depuis plus de 16 ans et où 85% de la population a été déplacée par les combats.
Dimanche, le décès d'un soldat israélien tué à Gaza a porté à 154 le nombre de soldats tués depuis le début de l'offensive terrestre le 27 octobre.
"Nous payons un très lourd tribut à la guerre, mais nous n'avons pas d'autre choix que de continuer à combattre", avait déclaré lundi matin le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu lors d'une réunion avec son gouvernement.
Plus tard dans la journée, il a indiqué que l'armée israélienne "intensifiait la guerre dans la bande de Gaza".
Israël a juré de détruire le Hamas après une attaque sans précédent sur Israël le 7 octobre, qui a fait environ 1.140 morts en majorité des civils, selon les derniers chiffres officiels israéliens.
Les combattants palestiniens ont aussi enlevé environ 250 personnes dont 129 restent détenues à Gaza, selon Israël. Les bombardements israéliens dans la bande de Gaza où des milliers de bombes ont été déversées, ont fait 20.424 morts, majoritairement des femmes, adolescents et enfants.
- "Notre peuple se meurt" -
A quelques heures de la veillée de Noël, l'ambiance était à la sobriété à Bethléem, en Cisjordanie occupée, haut-lieu du christianisme.
Un voile de tristesse enveloppe la ville qui se pare habituellement de ses habits de fête. Cette année, pas de sapin gigantesque, pas de crèche flamboyante, peu de joie, a constaté une journaliste de l'AFP.
Les chrétiens palestiniens -- environ 50.000 dont un millier à Gaza -- n'ont pas le coeur aux célébrations, largement annulées par la municipalité, qui s'est dit en deuil.
"Comment faire la fête alors que mon pays est blessé ? Comment faire la fête alors que ma ville est détruite, que ma famille est déplacée et que mes frères et sœurs sont en deuil, que nos martyrs ne sont pas encore enterrés et d'autres sous les décombres ?", s'émeut auprès de l'AFP la sœur Nabila Salah, de l'église catholique de Gaza.
Mi-décembre, une mère et sa fille y ont été tuées par un tireur d'élite israélien, selon le Patriarcat latin de Jérusalem. L'armée israélienne avait annoncé dans la foulée enquêter sur l'affaire.
A son arrivée à Bethléem, le patriarche latin Pizzaballa, large keffieh noir et blanc autour du cou, a prononcé un court discours au milieu de quelques dizaines de chrétiens.
"Notre coeur est avec Gaza, avec toute la population de Gaza, avec une attention particulière pour notre communauté chrétienne qui souffre, mais je sais que nous ne sommes pas les seuls à souffrir", a-t-il dit.
- "Aucun service de santé" -
Sur le front humanitaire, la situation est désastreuse: la plupart des hôpitaux y sont hors service et dans les six prochaines semaines, l'ensemble de la population risque de subir un niveau élevé d'insécurité alimentaire, pouvant aller jusqu'à la famine, selon l'ONU.
"La décimation du système de santé de Gaza est une tragédie", a déploré dimanche le chef de l'Organisation mondiale de la Santé Tedros Adhanom Ghebreyesus.
"Le système de santé dans le sud de Gaza s'effondre constamment et le nord ne dispose d'aucun service de santé, a dit dimanche le porte-parole du ministère de la santé du Hamas, Ashraf Al-Qudra.
Une situation dont est "entièrement responsable l'occupant criminel sioniste", écrit le mouvement islamiste dans un communiqué.
Malgré le vote vendredi par le Conseil de sécurité de l'ONU d'une résolution réclamant l'acheminement "immédiat" et "à grande échelle" de l'aide humanitaire, celle-ci n'a pas connu d'augmentation significative.
De leurs côtés, les médiateurs égyptiens et qataris tentent toujours de négocier une nouvelle trêve, après une pause dans les combats de sept jours fin novembre, qui a permis la libération de 105 otages et de 240 prisonniers palestiniens ainsi que l'entrée à Gaza d'importants convois d'aide humanitaire.
Selon une source au sein du Jihad islamique, le chef de ce mouvement -- un autre mouvement armé palestinien qui combat au côté du Hamas -- est arrivé à la tête d'une délégation au Caire.
- Actes de torture ? -
Plus tôt dans la journée, l'armée israélienne annonçait avoir découvert "un dépôt d'armes adjacent à des écoles, une mosquée et un centre médical", qui renfermait "des ceintures d'explosif adaptées pour des enfants, des dizaines d'obus de mortier, des centaines de grenades et du matériel de renseignement".
Dans le cadre de ses opérations, l'armée israélienne indique arrêter des "individus soupçonnés d'être impliqués dans des activités terroristes". "Les personnes dont il s'avère qu'elles ne participent pas à des activités terroristes sont libérées", assure-t-elle.
Mais des Palestiniens libérés après avoir été arrêtés dans la bande de Gaza ont affirmé à l'AFP avoir été torturés, ce que l'armée dément, disant respecter le droit international.
"Ils nous ont menotté les mains derrière le dos pendant deux jours. Nous n'avons pas eu à boire ou à manger, ni été autorisés à se servir des toilettes, juste des coups, des coups", a affirmé, Nayef Ali, 22 ans.
Le Hamas a appelé dimanche le Comité international de la Croix-Rouge à enquêter sur ces arrestations.
Les violences à la frontière israélo-libanaise se sont aussi poursuivies dimanche, faisant craindre un embrasement régional. Depuis le début de la guerre, le Hezbollah libanais a multiplié les tirs depuis le sud du Liban pour soutenir son allié palestinien et l'armée israélienne riposte par des bombardements.
Des tirs "en provenance du Liban" visant notamment Avivim, un village agricole frontalier ou encore celui de Margaliot, près de Kyriat Shmona, ont eu lieu dimanche après-midi, a annoncé l'armée israélienne qui a répliqué "en direction des sources de lancement". [AFP]