Excellences, Mesdames, Messieurs les Chefs d’Etat et de gouvernement, chers collègues,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Monsieur le Président de la Commission de l’Union,
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs et chefs de délégations,
Mesdames, Messieurs, En votre nom et au mien propre, je tiens d’abord à remercier le gouvernement et le peuple éthiopiens pour l’accueil convivial et l’hospitalité chaleureuse qu’ils nous réservent, une fois de plus, dans la cité légendaire d’Addis-Abeba, berceau de notre rêve de liberté et d’unité africaines.
Je mesure l’honneur et la responsabilité qui s’attachent à la confiance dont vous venez de m’investir, ensemble avec les membres du Bureau, pour conduire les destinées de notre Organisation pendant un an.
Je vous en remercie et vous assure de notre engagement à travailler de concert avec tous les pays membres dans l’exercice de notre mandat.
Je rends hommage aux Pères fondateurs de l’Organisation.
Six décennies après, leur vision lumineuse continue d’inspirer notre vivre ensemble et d’éclairer notre marche solidaire vers l’idéal d’intégration africaine.
C’est justement dans cet esprit panafricaniste que le Président Léopold Sédar Senghor avait proposé, au sommet de l’OUA de juillet 1964, d’instituer « une autorité politique et morale permanente de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement »pour donner une impulsion de haut niveau à la conduite des affaires continentales.
C’est ainsi qu’est née la charge de Président en exercice de notre Organisation ; charge dont le Président Félix Antoine Tshisekedi Tchilombo, s’est acquitté avec dévouement.
Merci cher Félix, pour les efforts considérables que tu as consacrés au service de notre continent.
Alors que notre Union célèbre son 20ème anniversaire cette année, nous pouvons être fiers des progrès accomplis dans le cadre d’initiatives majeures telles que le NEPAD, le PIDA, le MAEP, la Vision 2063, la réforme institutionnelle, la Grande Muraille Verte, la ZLECAF et plus récemment notre riposte coordonnée contre la pandémie COVID-19.
En même temps, nos défis restent nombreux et pressants; qu’il s’agisse de la paix et de la sécurité, des changements anti constitutionnels de gouvernement, de la protection de l’environnement, de la santé et du développement économique et social.
L’urgence de paix et de sécurité nous rappelle notre responsabilité particulière dans la lutte contre le terrorisme, le règlement pacifique des différends entre pays membres, et la prise en charge des situations de crises internes.
Nous ne pouvons détourner nos regards de toutes ces vies perdues, ces familles endeuillées, ces millions de personnes déplacées ou réfugiées, ces écoles et structures de santé fermées et ces cohésions sociales désintégrées.
Le bon sens commande de faire taire les armes et construire une culture de dialogue et de concertation dans le cadre des mécanismes africains de résolution des conflits.
Les antagonismes dispersent nos efforts et nous retardent sur le chemin du développement.
J’appelle à un examen de conscience pour réaliser la paix des braves afin de mieux nous consacrer aux autres urgences qui nous préoccupent.
Il en est ainsi de la crise sanitaire liée à la pandémie COVID-19, et la nécessité d’assurer au plus vite notre souveraineté pharmaceutique et médicale.
Je remercie vivement le Président Cyril Ramaphosa qui, avec l’appui de la Commission et de Africa CDC, s’est beaucoup investi dans la riposte anti COVID, aussi bien pour l’accès au vaccin que pour sa production en Afrique.
A l’épreuve de la crise, tout un écosystème de produits hygiéniques, pharmaceutiques et médicaux a vu le jour sur le continent.
La production de vaccins est déjà en cours dans certains pays et d’autres vont suivre.
Au-delà de la riposte anti COVID, il serait donc indiqué de maintenir cette nouvelle dynamique en gardant les questions de santé au cœur de notre agenda, afin de soutenir l’émergence d’une industrie pharmaceutique africaine capable de satisfaire nos besoins essentiels, et faire face à des pandémies comme le VIH-Sida, la tuberculose et le paludisme.
J’attire également l’attention de notre sommet sur les ravages du cancer, un tueur silencieux qui cause près de 20 millions de décès par an dans le monde, dont plus de 700 000 en Afrique.
S’y ajoute que 40% de nos pays ne disposent d'aucune unité de traitement par radiothérapie.
En réponse à cette situation préoccupante, l’Agence internationale de l’Energie a lancé l’initiative Rays of hope, Rayons de l’espoir, afin de soutenir les capacités des Etats membres, africains en particulier, dans la lutte contre le cancer, grâce aux technologies nucléaires, notamment l'imagerie médicale, la médecine nucléaire et la radiothérapie.
J’encourage vivement nos pays à appuyer la campagne Rays of Hope de l’AIEA qui contribue à la réalisation des ODD et de l’Agenda 2063.
Nos urgences sont aussi économiques.
L’Afrique continue d’accuser du retard dans le domaine du développement malgré ses énormes potentialités :30 millions de km2 ; plus d’un milliard d’habitants ; d’importantes réserves en eau et hydrocarbures;60% des terres arables non exploitées du monde ; 40% des réserves d’or ; 85 à 95% des réserves de métaux du groupe du chrome et du platine ; 85% des réserves de phosphates ; plus de 50% des réserves de cobalt et un tiers des réserves de bauxite.
C’est dire qu’en dépit de ses handicaps, l’Afrique dispose du potentiel nécessaire pour assurer les conditions de son émergence.
Du reste, dans sa grande majorité, notre continent progresse. Les gouvernements sont à la tâche. Il y a une jeunesse créative qui entreprend et réussit. Des millions d’hommes et femmes travaillent, investissent et créent de la richesse.
Toutes ces énergies positives contribuent à la transformation structurelle du continent, en faisant émerger l’Afrique des infrastructures routières, autoroutières, ferroviaires, portuaires et aéroportuaires ; l’Afrique des centrales électriques, de l’agro business, des plateformes industrielles et numériques.
C’est justement dans l’esprit de cette Afrique sur la voie de l’émergence que s’inscrit le thème de notre sommet, sur proposition pertinente du Président Alassane Ouattara : « Renforcer la résilience en matière de nutrition sur le continent africain : accélérer le capital humain et le développement social et économique ».
Ce thème nous rappelle l’urgence de réaliser notre souveraineté alimentaire en produisant plus et mieux dans l’agriculture, l’élevage et la pêche par:- la modernisation de nos outils et méthodes de production, de conservation et de transformation ;
- l’amélioration des intrants, la maitrise de l’eau, le développement des chaines de valeurs et la facilitation de l’accès aux marchés.
L’Afrique émergente doit aussi compter sur ses forces vives : les jeunes et les femmes.
Les jeunes doivent rester au centre de nos politiques publiques, parce qu’ils forment la majorité de notre population, et que nous ne pourrons tirer avantage du dividende démographique que si notre jeunesse reçoit l’éducation et la formation adéquates qui la préparent à la vie active.
La condition féminine nous interpelle, parce que les femmes constituent l’autre moitié du continent.
L’Afrique ne peut se développer quand des millions de femmes et de filles continuent de subir des traitements violents, inégalitaires et discriminatoires.
J’appelle à une plus grande mobilisation des pouvoirs publics, des leaders d’opinion, de la société civile, des familles et des communautés contre toutes les formes de violence faites aux femmes et aux filles, et pour leur autonomisation.
C’est une condition essentielle du progrès de notre continent et de notre bien-être collectif.
Chers collègues, mesdames, messieurs,
Si le destin de notre continent se joue entre nos mains, il reste aussi tributaire d’une gouvernance politique, économique et financière mondiale qui fait peu de place à nos pays.
En votre nom,je poursuivrai notre plaidoyer pour un multilatéralisme plus ouvert, plus transparent et plus inclusif; à commencer par une représentation plus équitable de l’Afrique au Conseil de Sécurité des Nations Unies, conformément au consensus d’Ezulwini.
Je souhaite également que nous portions davantage nos efforts sur la réforme de la gouvernance économique et financière internationale pour un meilleur accès de nos pays aux sources de financement du développement.
Nos économies sont sous financées, parce que des règles et procédures rigides entravent l’accès de nos pays à des prêts consistants de longue durée, et à des taux supportables, pour le financement de leurs besoins de développement économique et social.
Nos économies sont aussi mal financées, parce qu’elles continuent de payer des taux d’intérêt trop élevés à cause d’un système inéquitable d’évaluation du risque d’investissement en Afrique.
A titre d’exemple, en 2020, alors que le monde entier subissait de plein fouet l’impact de la COVID-19, 18 des 32 pays africains évalués par au moins une des grandes agences d’évaluation ont vu leur notation dégradée ; soit 56%contre une moyenne mondiale de 31%.
D’autre part, des études montrent qu’au moins 20% des paramètres de notation de nos pays dépendent de facteurs plutôt subjectifs, par exemple d’ordre culturel ou linguistique, donc sans relation avec les fondamentaux qui déterminent la stabilité d’une économie.
Tout cela fait que la perception du risque d’investissement en Afrique reste toujours plus élevée que le risque réel ; ce qui renchérit les primes d’assurance, rend le crédit plus cher et pénalise ainsi la compétitivité de nos économies.
Avec le soutien de la Commission, il me parait nécessaire de mettre en place une task force de l’Union pour étudier plus en avant la problématique du financement de nos économies, y compris par la réforme des règles de l’OCDE y afférentes, la création d’une Agence panafricaine de notation et la mise en place d’un Mécanisme de stabilité financière sur lequel la Banque Africaine de Développement travaille déjà.
D’autres efforts pourraient davantage porter sur l’harmonisation de nos législations nationales et l’échange des meilleures pratiques dans l’industrie minière et des hydrocarbures pour une juste rémunération de nos ressources.
Ces chantiers pourraient certes prendre du temps, mais il me semble nécessaire de passer des revendications aux actes en jetant les fondements de leur construction.
Dans l’immédiat, je poursuivrai notre plaidoyer pour la réallocation des DTS. Avec l’émission historique de Droits de Tirages Spéciaux à hauteur de 650 milliards de dollars, l’Afrique a pu disposer de son quota de 33 milliards de dollars pour renforcer sa résilience.
C’est un acquis considérable. Mais au regard de l’impact profond de la crise, l’Afrique a besoin d’un financement additionnel d’au moins 252 milliards de dollars d’ici à 2025 pour contenir le choc et amorcer sa relance économique.
En conséquence je poursuivrai notre plaidoyer pour la réallocation en faveur des pays africains, selon des modalités à convenir, de 67 milliards de dollars, mobilisables sur les quotas de DTS des pays riches qui y consentent, pour atteindre l’objectif de 100 milliardsfixés au Sommet de Paris sur le financement des économies africaines.
Il est important qu’une partie significative des DTS soit réallouée via la BAD, compte tenu de son rôle habituel dans le financement du développement, pour soutenir nos efforts de relance par des investissements de qualité, qui stimulent une croissance inclusive et durable.
En outre, afin d’élargir nos possibilités de financement de grands projets de développement, le moment est venu de modifier l’Accord portant création du Fonds africain pour le Développement (FAD) ; ce qui lui permettra d’accéder aux marchés des capitaux et lever 33 milliards de dollars, comme effet de levier, en complément de ses fonds propres de 25 milliards de dollars.
Plus de ressources pour le FAD lui donne plus de capacités de financement pour nos pays.
En conséquence, j’appelle nos partenaires à engager avec nous le travail de modernisation du FAD, à l’image d’autres Institutions similaires, d’autant plus que son statut est resté quasiment inchangé depuis sa création en 1972.
En votre nom, chers collègues, j’ai aussi la ferme intention de porter haut et fort notre message pour des partenariats rénovés, plus justes et plus équitables.
Plus de 60 ans après ses premières indépendances, l’Afrique est plus que jamais décidée à prendre son destin en mains.
Notre continent ne saurait être la chasse gardée des uns contre les autres.
Nous sommes ouverts à tous les partenariats, sans exclusion, ni exclusivité, pourvu qu’ils soient mutuellement bénéfiques etrespectueux de nos priorités de développement et de nos choix de société.
Dans cet esprit, je salue les excellents résultats du Forum sur la coopération sino-africaine de novembre 2021 et du Sommet Turquie-Afrique de décembre dernier.
J'ai confiance que nos rendez-vous avec l'Union Européenne dans quelques jours, et plus tard avec la Corée, la Russie, le Japon, le monde arabe, et certainement avec les Etats-Unis d'Amérique, s'inscriront dans la même dynamique.
Un autre défi nous interpelle : celui de la transition énergétique dans le contexte de la lutte contre le changement climatique dont l’Afrique est partie prenante.
En marge de la COP 26 de Glasgow, des pays ont unilatéralement pris la décision de mettre fin au financement extérieur d’énergies fossiles, même propres comme le gaz, alors que certains parmi eux continuent d’utiliser des sources aussi polluantes que le charbon et le fuel.
Au moment où, avec les importantes découvertes de ces dernières années, le gaz ouvre pour nos pays de réelles perspectives d’accès universel à l’électricité et de soutien à l’industrialisation, arrêter le financement de la filière gazière porterait gravement atteinte à nos efforts de développement économique et social.
C’est pourquoi, en restant engagés dans la lutte contre le changement climatique selon le principe de la responsabilité commune mais différenciée, il est tout à fait légitime que nos pays réclament une transition énergétique juste et équitable.
Ensemble, mobilisons-nous pour la réussite de la COP 27 que notre frère Abdel Fattah Al Sissi va accueillir.
Chers collègues, mesdames, messieurs,
Les défis que voilà, nous les relèverons en consacrant plus de temps à nos débats sur des questions vitales pour nos pays, avec des méthodes de travail rénovées et rationalisées, dans l’esprit de la réforme institutionnelle que nous avons menée sous la conduite dynamique du Président Paul Kagame.
L’impératif de résultat nous presse de mettre en œuvre nos réformes pour améliorer les performances de l’Union, y compris par le renforcement de ses capacités financières.
Je pense à la répartition du travail entre l’Union, les Communautés économiques régionales et les Mécanismes régionaux, à la réforme des organes judiciaires et quasi judiciaires, à l’opérationnalisation du Fonds pour la paix et de la Force africaine en attente, ainsi qu’à une meilleure articulation des Agences.
L’Afrique que nous voulons, c’est aussi celle qui recouvre l’intégralité de son patrimoine culturel.
La restitution de notre patrimoine spolié restera au cœur de notre agenda, parce qu’il fait partie intégrante de notre identité civilisationnelle ; c’est ce qui nous relie à notre passé et forme le viatique que nous devons léguer aux générations futures.
L’Afrique que nous voulons bâtir ne peut faire l’impasse sur son héritage culturel. Le temps ne saurait effacer notre mémoire collective.
Le poids de l’histoire et les pesanteurs du présent ne sauraient inhiber notre volonté de déconstruire les préjugés et les déterminismes qui entravent la marche de notre continent vers le progrès.
Nous disons oui au « rendez-vous du donner et du recevoir» par le dialogue fécond des cultures et des civilisations ; mais non à l’injonction civilisationnelle qui nous dicterait nos choix et nos comportements.
Dans l’esprit que voilà, je ne ménagerai aucun effort dans la défense des intérêts de notre Continent avec le soutien des membres de notre Bureau et le vôtre.
Ainsi, et ensemble, nous pourrons apporter une nouvelle pierre à l’édifice continental de nos rêves : une Afrique en paix, plus libre, plus unie et plus solidaire ; une Afrique debout et en marche vers plus de progrès et de prospérité.
Vive l’Afrique ! Vive l’Union Africaine !
Je vous remercie.
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Monsieur le Président de la Commission de l’Union,
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs et chefs de délégations,
Mesdames, Messieurs, En votre nom et au mien propre, je tiens d’abord à remercier le gouvernement et le peuple éthiopiens pour l’accueil convivial et l’hospitalité chaleureuse qu’ils nous réservent, une fois de plus, dans la cité légendaire d’Addis-Abeba, berceau de notre rêve de liberté et d’unité africaines.
Je mesure l’honneur et la responsabilité qui s’attachent à la confiance dont vous venez de m’investir, ensemble avec les membres du Bureau, pour conduire les destinées de notre Organisation pendant un an.
Je vous en remercie et vous assure de notre engagement à travailler de concert avec tous les pays membres dans l’exercice de notre mandat.
Je rends hommage aux Pères fondateurs de l’Organisation.
Six décennies après, leur vision lumineuse continue d’inspirer notre vivre ensemble et d’éclairer notre marche solidaire vers l’idéal d’intégration africaine.
C’est justement dans cet esprit panafricaniste que le Président Léopold Sédar Senghor avait proposé, au sommet de l’OUA de juillet 1964, d’instituer « une autorité politique et morale permanente de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement »pour donner une impulsion de haut niveau à la conduite des affaires continentales.
C’est ainsi qu’est née la charge de Président en exercice de notre Organisation ; charge dont le Président Félix Antoine Tshisekedi Tchilombo, s’est acquitté avec dévouement.
Merci cher Félix, pour les efforts considérables que tu as consacrés au service de notre continent.
Alors que notre Union célèbre son 20ème anniversaire cette année, nous pouvons être fiers des progrès accomplis dans le cadre d’initiatives majeures telles que le NEPAD, le PIDA, le MAEP, la Vision 2063, la réforme institutionnelle, la Grande Muraille Verte, la ZLECAF et plus récemment notre riposte coordonnée contre la pandémie COVID-19.
En même temps, nos défis restent nombreux et pressants; qu’il s’agisse de la paix et de la sécurité, des changements anti constitutionnels de gouvernement, de la protection de l’environnement, de la santé et du développement économique et social.
L’urgence de paix et de sécurité nous rappelle notre responsabilité particulière dans la lutte contre le terrorisme, le règlement pacifique des différends entre pays membres, et la prise en charge des situations de crises internes.
Nous ne pouvons détourner nos regards de toutes ces vies perdues, ces familles endeuillées, ces millions de personnes déplacées ou réfugiées, ces écoles et structures de santé fermées et ces cohésions sociales désintégrées.
Le bon sens commande de faire taire les armes et construire une culture de dialogue et de concertation dans le cadre des mécanismes africains de résolution des conflits.
Les antagonismes dispersent nos efforts et nous retardent sur le chemin du développement.
J’appelle à un examen de conscience pour réaliser la paix des braves afin de mieux nous consacrer aux autres urgences qui nous préoccupent.
Il en est ainsi de la crise sanitaire liée à la pandémie COVID-19, et la nécessité d’assurer au plus vite notre souveraineté pharmaceutique et médicale.
Je remercie vivement le Président Cyril Ramaphosa qui, avec l’appui de la Commission et de Africa CDC, s’est beaucoup investi dans la riposte anti COVID, aussi bien pour l’accès au vaccin que pour sa production en Afrique.
A l’épreuve de la crise, tout un écosystème de produits hygiéniques, pharmaceutiques et médicaux a vu le jour sur le continent.
La production de vaccins est déjà en cours dans certains pays et d’autres vont suivre.
Au-delà de la riposte anti COVID, il serait donc indiqué de maintenir cette nouvelle dynamique en gardant les questions de santé au cœur de notre agenda, afin de soutenir l’émergence d’une industrie pharmaceutique africaine capable de satisfaire nos besoins essentiels, et faire face à des pandémies comme le VIH-Sida, la tuberculose et le paludisme.
J’attire également l’attention de notre sommet sur les ravages du cancer, un tueur silencieux qui cause près de 20 millions de décès par an dans le monde, dont plus de 700 000 en Afrique.
S’y ajoute que 40% de nos pays ne disposent d'aucune unité de traitement par radiothérapie.
En réponse à cette situation préoccupante, l’Agence internationale de l’Energie a lancé l’initiative Rays of hope, Rayons de l’espoir, afin de soutenir les capacités des Etats membres, africains en particulier, dans la lutte contre le cancer, grâce aux technologies nucléaires, notamment l'imagerie médicale, la médecine nucléaire et la radiothérapie.
J’encourage vivement nos pays à appuyer la campagne Rays of Hope de l’AIEA qui contribue à la réalisation des ODD et de l’Agenda 2063.
Nos urgences sont aussi économiques.
L’Afrique continue d’accuser du retard dans le domaine du développement malgré ses énormes potentialités :30 millions de km2 ; plus d’un milliard d’habitants ; d’importantes réserves en eau et hydrocarbures;60% des terres arables non exploitées du monde ; 40% des réserves d’or ; 85 à 95% des réserves de métaux du groupe du chrome et du platine ; 85% des réserves de phosphates ; plus de 50% des réserves de cobalt et un tiers des réserves de bauxite.
C’est dire qu’en dépit de ses handicaps, l’Afrique dispose du potentiel nécessaire pour assurer les conditions de son émergence.
Du reste, dans sa grande majorité, notre continent progresse. Les gouvernements sont à la tâche. Il y a une jeunesse créative qui entreprend et réussit. Des millions d’hommes et femmes travaillent, investissent et créent de la richesse.
Toutes ces énergies positives contribuent à la transformation structurelle du continent, en faisant émerger l’Afrique des infrastructures routières, autoroutières, ferroviaires, portuaires et aéroportuaires ; l’Afrique des centrales électriques, de l’agro business, des plateformes industrielles et numériques.
C’est justement dans l’esprit de cette Afrique sur la voie de l’émergence que s’inscrit le thème de notre sommet, sur proposition pertinente du Président Alassane Ouattara : « Renforcer la résilience en matière de nutrition sur le continent africain : accélérer le capital humain et le développement social et économique ».
Ce thème nous rappelle l’urgence de réaliser notre souveraineté alimentaire en produisant plus et mieux dans l’agriculture, l’élevage et la pêche par:- la modernisation de nos outils et méthodes de production, de conservation et de transformation ;
- l’amélioration des intrants, la maitrise de l’eau, le développement des chaines de valeurs et la facilitation de l’accès aux marchés.
L’Afrique émergente doit aussi compter sur ses forces vives : les jeunes et les femmes.
Les jeunes doivent rester au centre de nos politiques publiques, parce qu’ils forment la majorité de notre population, et que nous ne pourrons tirer avantage du dividende démographique que si notre jeunesse reçoit l’éducation et la formation adéquates qui la préparent à la vie active.
La condition féminine nous interpelle, parce que les femmes constituent l’autre moitié du continent.
L’Afrique ne peut se développer quand des millions de femmes et de filles continuent de subir des traitements violents, inégalitaires et discriminatoires.
J’appelle à une plus grande mobilisation des pouvoirs publics, des leaders d’opinion, de la société civile, des familles et des communautés contre toutes les formes de violence faites aux femmes et aux filles, et pour leur autonomisation.
C’est une condition essentielle du progrès de notre continent et de notre bien-être collectif.
Chers collègues, mesdames, messieurs,
Si le destin de notre continent se joue entre nos mains, il reste aussi tributaire d’une gouvernance politique, économique et financière mondiale qui fait peu de place à nos pays.
En votre nom,je poursuivrai notre plaidoyer pour un multilatéralisme plus ouvert, plus transparent et plus inclusif; à commencer par une représentation plus équitable de l’Afrique au Conseil de Sécurité des Nations Unies, conformément au consensus d’Ezulwini.
Je souhaite également que nous portions davantage nos efforts sur la réforme de la gouvernance économique et financière internationale pour un meilleur accès de nos pays aux sources de financement du développement.
Nos économies sont sous financées, parce que des règles et procédures rigides entravent l’accès de nos pays à des prêts consistants de longue durée, et à des taux supportables, pour le financement de leurs besoins de développement économique et social.
Nos économies sont aussi mal financées, parce qu’elles continuent de payer des taux d’intérêt trop élevés à cause d’un système inéquitable d’évaluation du risque d’investissement en Afrique.
A titre d’exemple, en 2020, alors que le monde entier subissait de plein fouet l’impact de la COVID-19, 18 des 32 pays africains évalués par au moins une des grandes agences d’évaluation ont vu leur notation dégradée ; soit 56%contre une moyenne mondiale de 31%.
D’autre part, des études montrent qu’au moins 20% des paramètres de notation de nos pays dépendent de facteurs plutôt subjectifs, par exemple d’ordre culturel ou linguistique, donc sans relation avec les fondamentaux qui déterminent la stabilité d’une économie.
Tout cela fait que la perception du risque d’investissement en Afrique reste toujours plus élevée que le risque réel ; ce qui renchérit les primes d’assurance, rend le crédit plus cher et pénalise ainsi la compétitivité de nos économies.
Avec le soutien de la Commission, il me parait nécessaire de mettre en place une task force de l’Union pour étudier plus en avant la problématique du financement de nos économies, y compris par la réforme des règles de l’OCDE y afférentes, la création d’une Agence panafricaine de notation et la mise en place d’un Mécanisme de stabilité financière sur lequel la Banque Africaine de Développement travaille déjà.
D’autres efforts pourraient davantage porter sur l’harmonisation de nos législations nationales et l’échange des meilleures pratiques dans l’industrie minière et des hydrocarbures pour une juste rémunération de nos ressources.
Ces chantiers pourraient certes prendre du temps, mais il me semble nécessaire de passer des revendications aux actes en jetant les fondements de leur construction.
Dans l’immédiat, je poursuivrai notre plaidoyer pour la réallocation des DTS. Avec l’émission historique de Droits de Tirages Spéciaux à hauteur de 650 milliards de dollars, l’Afrique a pu disposer de son quota de 33 milliards de dollars pour renforcer sa résilience.
C’est un acquis considérable. Mais au regard de l’impact profond de la crise, l’Afrique a besoin d’un financement additionnel d’au moins 252 milliards de dollars d’ici à 2025 pour contenir le choc et amorcer sa relance économique.
En conséquence je poursuivrai notre plaidoyer pour la réallocation en faveur des pays africains, selon des modalités à convenir, de 67 milliards de dollars, mobilisables sur les quotas de DTS des pays riches qui y consentent, pour atteindre l’objectif de 100 milliardsfixés au Sommet de Paris sur le financement des économies africaines.
Il est important qu’une partie significative des DTS soit réallouée via la BAD, compte tenu de son rôle habituel dans le financement du développement, pour soutenir nos efforts de relance par des investissements de qualité, qui stimulent une croissance inclusive et durable.
En outre, afin d’élargir nos possibilités de financement de grands projets de développement, le moment est venu de modifier l’Accord portant création du Fonds africain pour le Développement (FAD) ; ce qui lui permettra d’accéder aux marchés des capitaux et lever 33 milliards de dollars, comme effet de levier, en complément de ses fonds propres de 25 milliards de dollars.
Plus de ressources pour le FAD lui donne plus de capacités de financement pour nos pays.
En conséquence, j’appelle nos partenaires à engager avec nous le travail de modernisation du FAD, à l’image d’autres Institutions similaires, d’autant plus que son statut est resté quasiment inchangé depuis sa création en 1972.
En votre nom, chers collègues, j’ai aussi la ferme intention de porter haut et fort notre message pour des partenariats rénovés, plus justes et plus équitables.
Plus de 60 ans après ses premières indépendances, l’Afrique est plus que jamais décidée à prendre son destin en mains.
Notre continent ne saurait être la chasse gardée des uns contre les autres.
Nous sommes ouverts à tous les partenariats, sans exclusion, ni exclusivité, pourvu qu’ils soient mutuellement bénéfiques etrespectueux de nos priorités de développement et de nos choix de société.
Dans cet esprit, je salue les excellents résultats du Forum sur la coopération sino-africaine de novembre 2021 et du Sommet Turquie-Afrique de décembre dernier.
J'ai confiance que nos rendez-vous avec l'Union Européenne dans quelques jours, et plus tard avec la Corée, la Russie, le Japon, le monde arabe, et certainement avec les Etats-Unis d'Amérique, s'inscriront dans la même dynamique.
Un autre défi nous interpelle : celui de la transition énergétique dans le contexte de la lutte contre le changement climatique dont l’Afrique est partie prenante.
En marge de la COP 26 de Glasgow, des pays ont unilatéralement pris la décision de mettre fin au financement extérieur d’énergies fossiles, même propres comme le gaz, alors que certains parmi eux continuent d’utiliser des sources aussi polluantes que le charbon et le fuel.
Au moment où, avec les importantes découvertes de ces dernières années, le gaz ouvre pour nos pays de réelles perspectives d’accès universel à l’électricité et de soutien à l’industrialisation, arrêter le financement de la filière gazière porterait gravement atteinte à nos efforts de développement économique et social.
C’est pourquoi, en restant engagés dans la lutte contre le changement climatique selon le principe de la responsabilité commune mais différenciée, il est tout à fait légitime que nos pays réclament une transition énergétique juste et équitable.
Ensemble, mobilisons-nous pour la réussite de la COP 27 que notre frère Abdel Fattah Al Sissi va accueillir.
Chers collègues, mesdames, messieurs,
Les défis que voilà, nous les relèverons en consacrant plus de temps à nos débats sur des questions vitales pour nos pays, avec des méthodes de travail rénovées et rationalisées, dans l’esprit de la réforme institutionnelle que nous avons menée sous la conduite dynamique du Président Paul Kagame.
L’impératif de résultat nous presse de mettre en œuvre nos réformes pour améliorer les performances de l’Union, y compris par le renforcement de ses capacités financières.
Je pense à la répartition du travail entre l’Union, les Communautés économiques régionales et les Mécanismes régionaux, à la réforme des organes judiciaires et quasi judiciaires, à l’opérationnalisation du Fonds pour la paix et de la Force africaine en attente, ainsi qu’à une meilleure articulation des Agences.
L’Afrique que nous voulons, c’est aussi celle qui recouvre l’intégralité de son patrimoine culturel.
La restitution de notre patrimoine spolié restera au cœur de notre agenda, parce qu’il fait partie intégrante de notre identité civilisationnelle ; c’est ce qui nous relie à notre passé et forme le viatique que nous devons léguer aux générations futures.
L’Afrique que nous voulons bâtir ne peut faire l’impasse sur son héritage culturel. Le temps ne saurait effacer notre mémoire collective.
Le poids de l’histoire et les pesanteurs du présent ne sauraient inhiber notre volonté de déconstruire les préjugés et les déterminismes qui entravent la marche de notre continent vers le progrès.
Nous disons oui au « rendez-vous du donner et du recevoir» par le dialogue fécond des cultures et des civilisations ; mais non à l’injonction civilisationnelle qui nous dicterait nos choix et nos comportements.
Dans l’esprit que voilà, je ne ménagerai aucun effort dans la défense des intérêts de notre Continent avec le soutien des membres de notre Bureau et le vôtre.
Ainsi, et ensemble, nous pourrons apporter une nouvelle pierre à l’édifice continental de nos rêves : une Afrique en paix, plus libre, plus unie et plus solidaire ; une Afrique debout et en marche vers plus de progrès et de prospérité.
Vive l’Afrique ! Vive l’Union Africaine !
Je vous remercie.