Cinq mois jour pour jour après son départ du pouvoir le 2 avril 2024, Macky Sall sort du bois de son exil de Marrakech pour annoncer la fin de mission de la coalition Benno Bokk Yaakaar. L’hétéroclite attelage qui a été le socle de son pouvoir pendant douze ans à la tête du pays ne peut plus répondre aux défis du changement de régime, selon lui. Avec des alliés dont il va devoir recompter le nombre et évaluer la consistance, l’ex chef d’Etat préconise une projection dans une nouvelle séquence politique pour assurer leur survie dans le Landerneau sénégalais
« Benno fut une belle aventure… » C’est en ces termes que Macky Sall a annoncé le rangement aux oubliettes de la coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY) qu’il avait mise en place avec ses alliés au lendemain de sa victoire à l’élection présidentielle de février 2012. Il en était jusqu’ici le président. Dans une note adressée à ses « chers camarades », l’ancien président de la République appelle les alliés qui lui sont restés fidèles à « inventer un cadre plus approprié, adapté et ajusté à nos impératifs de l’heure ».
Cette mutation s’impose, écrit-il, car « le 24 mars 2024, le Sénégal a ouvert un nouveau chapitre politique en réalisant la 3e Alternance de son histoire ».
L’opposant Bassirou Diomaye Faye a été élu au premier tour de l’élection présidentielle avec plus de 54 % des voix contre environ 35 % pour Amadou Ba, candidat de la coalition BBY choisi par Macky Sall lui-même.
« Avec ce changement, s’ouvre maintenant devant nous une nouvelle page politique », indique l’ancien chef d’Etat. Aujourd’hui, il serait inopportun de « continuer comme si de rien n’était » en gardant la structure « dans sa forme actuelle ». Macky Sall préconise donc une projection « dans le temps nouveau de l’action politique » après avoir tiré les leçons de la présidentielle perdue du 24 mars 2024.
Installé à Marrakech (Maroc) avec sa famille depuis son départ du palais le 2 avril 2024, Macky Sall a été nommé par le président français Emmanuel Macron « Envoyé spécial » du Pacte de Paris pour les Peuples et la Planète (4P). Les 4P est un organisme public français qui soutient les pays jugés vulnérables aux contraintes de la transition climatique.
En mode profil bas depuis avril, l’ex chef d’Etat sénégalais reconnait subir des pressions de la part de beaucoup de ses alliés favorables à une réorganisation politique en profondeur « pour mieux engager les défis du moment ». Une requête à laquelle il a d’autant plus prêté l’oreille que Benno « vit depuis plus de 12 ans au service du pays ».
« Jamais alliance politique n’aura tenu autant au Sénégal », se réjouit-il. « Jamais, elle n’aura gagné autant de batailles politiques, remporté autant de victoires et ce, à toutes les élections, quelles que puissent être leur nature, leur importance et les circonstances dans lesquelles elles se tenaient ». A ce titre, il appelle ses camarades à « être fiers » d’une coalition qui « sera inscrite au fronton des plus grandes oeuvres politiques du Sénégal ».
L’annonce de la fin de parcours de Benno Bokk Yaakaar a été synchronisée avec le premier grand échec politique du nouveau régime sénégalais. Le projet de loi visant à dissoudre le Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) et le Conseil économique social et environnemental (CESE) a été rejeté le 2 septembre 2024 par l’Assemblée nationale grâce aux voix des 83 députés du groupe BBY.
La coalition Benno Bokk Yaakaar comprenait plus d’une centaines de partis, mouvements et associations. Mais ses principales composantes, outre l’Alliance pour la République (APR) de Macky Sall, étaient l’Alliance des forces de progrès (AFP) de Moustapha Niasse, le Parti socialiste (PS), des franges du Parti de l’indépendance et du travail (PIT) et de la Ligue démocratique (LD), etc.
Ces formations politiques et toutes les autres seront-elles disponibles pour la nouvelle aventure prônée par l’ancien président de la République devenu opposant ?
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