Le procès en diffamation intenté à partir du 8 janvier 2021 au journaliste d’investigation Moussa Aksar par un ressortissant nigérien établi à Bruxelles (Belgique) pourrait-il n’être finalement que le procès en mal gouvernance du pouvoir politique établi à Niamey ? Dans une enquête exhaustive publiée en septembre 2020 dans plusieurs médias et intitulée : « FinCEN FILES – Malversations au ministère nigérien de la Défense : 71,8 milliards de francs CFA captés par des seigneurs du faux », le journaliste dévoilait les obscures pratiques d’un réseau de politiciens, de fonctionnaires, d’hommes d’affaires à travers des sociétés fictives, des comptes offshores. Des pratiques pour lesquelles ils font appel à des intermédiaires et autres hommes de paille et de main, tous accrochés aux basques d’un « Etat profond » dont ils semblent être de zélés serviteurs.
Cette enquête du journaliste Aksar, réalisée en collaboration avec le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et la Cellule Norbert Zongo pour le Journalisme d’Investigation en Afrique de l’Ouest (CENOZO), tirait pourtant une substance essentielle d’un audit accablant de la très officielle Inspection générale des armées du Niger sur des achats/ventes d’armes qui auraient coûté aux finances de ce pays sahélien la somme de 185,9 milliards de francs CFA (environ 283 millions d’euros). Toutes choses qui posent en vérité l’impertinence d’un procès dont le fond et la périphérie interpellent en premier lieu le pouvoir politique nigérien et ses réseaux occultes.
« Ce procès est unique en son genre car c’est en fait des voleurs qui crient aux voleurs. Le fait que des gens aient été cités dans une affaire sur la base d’une inspection d’Etat a permis au journaliste Aksar de pouvoir aller plus loin dans ses investigations. Certains d’entre eux sont aujourd’hui des candidats à la députation pour pouvoir bénéficier d’une impunité à vie », s’insurge Ali Idrissa Nani, coordonnateur exécutif du Réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire (ROTAB) et de l’initiative« Publiez ce que vous payer Niger ».
Le 15 mars 2020, des acteurs de la société civile nigérienne avaient tenté de manifester pour réclamer la vérité et la lumière sur le dossier des armes, mais certains d’entre eux ont été arrêtés et placés en détention pendant 6 à 7 mois, rappelle Ali Idrissa Nani.
Moussa Aksar, journaliste d’investigation persécuté
Moussa Aksar n’est pas en reste, car depuis plusieurs années, il regrette d’être l’objet d’une politique d’acharnement implacable mise en œuvre par les plus hautes autorités nigériennes. Celles-ci, à ce qu’il paraît, ne lui pardonnent pas ses révélations concernant des domaines sensibles de la vie économique et sociale du pays : les trafics de faux médicaments, de drogue, d’êtres humains, d’armes, la corruption dans de nombreux secteurs du domaine public, etc. La détermination du pouvoir nigérien à le combattre pour l’affaiblir se fait sous forme de pressions directes et indirectes ; par exemple sur les potentiels annonceurs discrètement invités à lui fermer le robinet de la publicité pour « L’Evènement du Niger », le bihebdomadaire dont il est le directeur-fondateur. En fin de compte – et en espérant une lueur venue d’ailleurs – Aksar a été objectivement contraint de mettre au chômage une partie de son personnel…
Journaliste d’expérience dont la probité et l’éthique sont connues de tous ses confrères qui le fréquentent depuis plusieurs années, correspondant de l’agence britannique Reuters, collaborateur du site Le Monde Afrique et membre de plusieurs organisations internationales de journalistes comme le GIJN, 3i, ICIJ, Moussa Aksar est également président en exercice de la Cellule Norbert Zongo pour le journalisme d’investigation en Afrique de l’Ouest (CENOZO) dont le siège est à Ouagadougou.
« Mobilisation totale des avocats et de la société civile »
La plainte dont il fait l’objet devant la justice nigérienne, si l’action judiciaire va à son terme, pourrait bien être celui du régime au pouvoir à Niamey. Car il sera forcément et fortement question des suites qui n’auront pas été données aux investigations documentées de l’Inspection générale des armées du Niger sur les magouilles ayant entouré l’exécution des contrats d’achats d’armes signés par l’Etat nigérien. Les avocats locaux et internationaux du journaliste ne se priveront pas d’amplifier pour l’opinion publique nationale et mondiale les mécanismes de corruption et de prévarication qui ont fait florès dans les coulisses de ce marché à milliards de francs CFA. Mais pas seulement.
« Il est évident que nous allons mobiliser tous les pools d’avocats que compte la société civile au Niger afin qu’ils viennent défendre Moussa Aksar. Nous serons avec lui au tribunal le temps qu’il faudra. Car ce procès n’est pas celui de Aksar uniquement, il se fait contre tous les lanceurs d’alerte qui dénoncent les détournements de deniers publics au Niger. Nous nous battrons donc pour que justice se fasse. Le droit sera dit même si les juges vont très souvent dans le sens souhaité par l’Etat », promet Ali Idrissa Nani du ROTAB.
« Autorités corrompues »
« Aujourd’hui, le Niger est l’un des pays où la corruption est le plus pratiquée au monde. Vous y voyez des ministres cités et mis en cause dans d’autres affaires continuer tranquillement à assurer leurs fonctions comme si de rien n’était. Ce pays est dernier en matière d’indice de développement humain. La question des ressources ne se pose plus car le Niger est producteur de pétrole, d’uranium, d’or, etc. Le problème fondamental, c’est la corruption et la mal gouvernance. Mahamadou Issoufou (Ndlr : président de la république arrivé au terme de deux mandats consécutifs) est au pouvoir depuis dix ans, cette corruption a pris une très grande ampleur. C’est pourquoi quand il est célébré comme un Président démocrate et exemplaire, ici au Niger cela nous fait rire…Il sait qu’il ne peut réclamer ce titre devant nous alors que nos droits sont tout le temps bafoués. On nous interdit toute manifestation et quand on dénonce un voleur de deniers publics, on est placé derrière les barreaux… », explique Ali Idrissa Nani.
L’audience annoncée du 8 janvier n’a pas eu lieu, le dossier n’ayant pas été enrôlé et le plaignant et ses avocats étant absents. En attendant, Reporters sans frontières (RSF), de même que d’autres grandes organisations professionnelles de journalistes dénoncent une tentative d’intimidation sans fondement contre Moussa Aksar, dont le seul tort est d’avoir mis en lumière une des maladies essentielles qui frappent son pays : la corruption de très hautes autorités publiques et l’impunité structurelle dont elles bénéficient.
Cette enquête du journaliste Aksar, réalisée en collaboration avec le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et la Cellule Norbert Zongo pour le Journalisme d’Investigation en Afrique de l’Ouest (CENOZO), tirait pourtant une substance essentielle d’un audit accablant de la très officielle Inspection générale des armées du Niger sur des achats/ventes d’armes qui auraient coûté aux finances de ce pays sahélien la somme de 185,9 milliards de francs CFA (environ 283 millions d’euros). Toutes choses qui posent en vérité l’impertinence d’un procès dont le fond et la périphérie interpellent en premier lieu le pouvoir politique nigérien et ses réseaux occultes.
« Ce procès est unique en son genre car c’est en fait des voleurs qui crient aux voleurs. Le fait que des gens aient été cités dans une affaire sur la base d’une inspection d’Etat a permis au journaliste Aksar de pouvoir aller plus loin dans ses investigations. Certains d’entre eux sont aujourd’hui des candidats à la députation pour pouvoir bénéficier d’une impunité à vie », s’insurge Ali Idrissa Nani, coordonnateur exécutif du Réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire (ROTAB) et de l’initiative« Publiez ce que vous payer Niger ».
Le 15 mars 2020, des acteurs de la société civile nigérienne avaient tenté de manifester pour réclamer la vérité et la lumière sur le dossier des armes, mais certains d’entre eux ont été arrêtés et placés en détention pendant 6 à 7 mois, rappelle Ali Idrissa Nani.
Moussa Aksar, journaliste d’investigation persécuté
Moussa Aksar n’est pas en reste, car depuis plusieurs années, il regrette d’être l’objet d’une politique d’acharnement implacable mise en œuvre par les plus hautes autorités nigériennes. Celles-ci, à ce qu’il paraît, ne lui pardonnent pas ses révélations concernant des domaines sensibles de la vie économique et sociale du pays : les trafics de faux médicaments, de drogue, d’êtres humains, d’armes, la corruption dans de nombreux secteurs du domaine public, etc. La détermination du pouvoir nigérien à le combattre pour l’affaiblir se fait sous forme de pressions directes et indirectes ; par exemple sur les potentiels annonceurs discrètement invités à lui fermer le robinet de la publicité pour « L’Evènement du Niger », le bihebdomadaire dont il est le directeur-fondateur. En fin de compte – et en espérant une lueur venue d’ailleurs – Aksar a été objectivement contraint de mettre au chômage une partie de son personnel…
Journaliste d’expérience dont la probité et l’éthique sont connues de tous ses confrères qui le fréquentent depuis plusieurs années, correspondant de l’agence britannique Reuters, collaborateur du site Le Monde Afrique et membre de plusieurs organisations internationales de journalistes comme le GIJN, 3i, ICIJ, Moussa Aksar est également président en exercice de la Cellule Norbert Zongo pour le journalisme d’investigation en Afrique de l’Ouest (CENOZO) dont le siège est à Ouagadougou.
« Mobilisation totale des avocats et de la société civile »
La plainte dont il fait l’objet devant la justice nigérienne, si l’action judiciaire va à son terme, pourrait bien être celui du régime au pouvoir à Niamey. Car il sera forcément et fortement question des suites qui n’auront pas été données aux investigations documentées de l’Inspection générale des armées du Niger sur les magouilles ayant entouré l’exécution des contrats d’achats d’armes signés par l’Etat nigérien. Les avocats locaux et internationaux du journaliste ne se priveront pas d’amplifier pour l’opinion publique nationale et mondiale les mécanismes de corruption et de prévarication qui ont fait florès dans les coulisses de ce marché à milliards de francs CFA. Mais pas seulement.
« Il est évident que nous allons mobiliser tous les pools d’avocats que compte la société civile au Niger afin qu’ils viennent défendre Moussa Aksar. Nous serons avec lui au tribunal le temps qu’il faudra. Car ce procès n’est pas celui de Aksar uniquement, il se fait contre tous les lanceurs d’alerte qui dénoncent les détournements de deniers publics au Niger. Nous nous battrons donc pour que justice se fasse. Le droit sera dit même si les juges vont très souvent dans le sens souhaité par l’Etat », promet Ali Idrissa Nani du ROTAB.
« Autorités corrompues »
« Aujourd’hui, le Niger est l’un des pays où la corruption est le plus pratiquée au monde. Vous y voyez des ministres cités et mis en cause dans d’autres affaires continuer tranquillement à assurer leurs fonctions comme si de rien n’était. Ce pays est dernier en matière d’indice de développement humain. La question des ressources ne se pose plus car le Niger est producteur de pétrole, d’uranium, d’or, etc. Le problème fondamental, c’est la corruption et la mal gouvernance. Mahamadou Issoufou (Ndlr : président de la république arrivé au terme de deux mandats consécutifs) est au pouvoir depuis dix ans, cette corruption a pris une très grande ampleur. C’est pourquoi quand il est célébré comme un Président démocrate et exemplaire, ici au Niger cela nous fait rire…Il sait qu’il ne peut réclamer ce titre devant nous alors que nos droits sont tout le temps bafoués. On nous interdit toute manifestation et quand on dénonce un voleur de deniers publics, on est placé derrière les barreaux… », explique Ali Idrissa Nani.
L’audience annoncée du 8 janvier n’a pas eu lieu, le dossier n’ayant pas été enrôlé et le plaignant et ses avocats étant absents. En attendant, Reporters sans frontières (RSF), de même que d’autres grandes organisations professionnelles de journalistes dénoncent une tentative d’intimidation sans fondement contre Moussa Aksar, dont le seul tort est d’avoir mis en lumière une des maladies essentielles qui frappent son pays : la corruption de très hautes autorités publiques et l’impunité structurelle dont elles bénéficient.