La mesure était inéluctable. Elle est tombée le soir du 12 septembre 2024. Vingt cinq mois et 12 jours après sa naissance, la 14e législature de l’Assemblée nationale du Sénégal est morte, enterrée. L’oraison funèbre a été prononcée par le président de la République Bassirou Diomaye Faye dans un discours à la nation dont le contenu et la tonalité n’ont été une surprise pour personne ou presque. Par la même occasion, il a fixé la date de nouvelles législatives : ce sera le 17 novembre prochain.
Elu au premier tour de l’élection présidentielle du 24 mars 2024 avec 54 % des suffrages, BDF s’est retrouvé contraint de devoir cohabiter avec une majorité parlementaire dont il a défait le candidat et avec laquelle des atomes crochus n’ont pas été trouvés. Entre lui et elle, le courant n’est jamais passé.
« Je dissous l’Assemblée nationale pour demander au peuple souverain les moyens institutionnels qui me permettront de donner corps à la transformation systémique que je leur ai promise », a-t-il dit.
Pour justifier la dissolution de l’institution cinq mois après son arrivée au pouvoir, le président de la République a mis en cause le groupe Benno Bokk Yaakaar (BBY) à plusieurs niveaux.
D’abord, il l’accuse d’avoir rendu impossible le 29 juin 2024 la tenue du débat d’orientation budgétaire en prélude à l’examen du budget 2025 « pour le motif simpliste d’une supposée attaque reçue sur le terrain politique. » Pour le chef de l’Etat, « cette violation d’une obligation légale prévue par l’article 56 de la loi organique relative aux lois de finances aura gravement contribué à ternir l’image du Sénégal aux yeux des institutions internationales. »
Le président Faye pointe ensuite le rejet du projet de révision constitutionnelle qui lui aurait permis d’honorer une promesse « faite au peuple » : la suppression du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) et du Conseil économique social et environnemental (CESE). A ses yeux, cette mesure censurée le 29 août 2024 par la (relative) majorité BBY était en adéquation avec un besoin d’assainissement de finances publiques ayant besoin d’être rationalisées dans leur partie dépenses.
Dans un troisième temps, Bassirou Diomaye Faye condamne « l’usurpation » par les députés de BBY « des prérogatives constitutionnelles du Président de la République pour fixer une date pour la Déclaration de politique générale ». Cela s’est fait « en violation flagrante de l’article 84 de la Constitution et de l’article 97 de la loi organique portant règlement intérieur de l’Assemblée nationale ».
« Malheureusement, la majorité parlementaire a décidé de ramer à contrecourant de la volonté du peuple Sénégalais, pourtant clairement exprimée au soir du 24 mars 2024. »
Dans le contexte délétère qui régnait sur l’institution parlementaire, le dépôt d’une motion de censure brandi par BBY et pour laquelle la date du 11 septembre avait été retenue a été la goutte d’eau de trop. C’est dans la journée du 6 septembre qu’il a fait parvenir une note au président de l’Assemblée nationale pour fixer lui-même la date de la Déclaration de politique générale du premier ministre: le 13 septembre 2024.
« En imposant, par la force du Droit, la date du 13 septembre 2024 pour la Déclaration de politique générale, il ne s’est pas agi de duper le Peuple Sénégalais mais simplement d’asseoir fermement l’autorité de la Loi. Et de rappeler, par les actes que ‘’L’ordre politique, sous mon magistère, ne supplantera jamais l’ordre légal.’’ ».