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La Colombie vote à droite, sanctionne la Farc avant la présidentielle

Lundi 12 Mars 2018

Une droite dure qui l'emporte mais sans le raz-de-marée annoncé, une ex-guérilla sévèrement sanctionnée dans les urnes et une avancée inédite du centre et de la gauche: la Colombie a rénové son Parlement avant de désigner son prochain président.

Bien que l'abstention ait dépassé les 50%, un classique dans ce pays, ces premières législatives avec les Farc désarmées ont préparé dimanche le terrain en vue de l'élection du successeur du chef de l'Etat Juan Manuel Santos, dont le premier tour est prévu pour le 27 mai.

La gauche, avec la victoire aux primaires de Gustavo Petro, ancien maire de Bogota et ex-guérillero du M19 dissout, a pour la première fois une chance de parvenir à la tête de l'exécutif.

- Un ex-président protagoniste -

L'ancien chef de l'Etat Alvaro Uribe est le parlementaire qui a engrangé le plus de voix (870.000), son parti de droite s'est imposé au Congrès et son dauphin, Ivan Duque, a remporté la primaire de la droite pour la présidentielle.

Ayant rejeté l'accord de paix avec les Farc et suscité la crainte que la Colombie ne suive la pente du Venezuela voisin, ce sénateur a permis à son parti, le Centre démocratique, d'être le plus représenté au Parlement.

Il n'a certes pas la majorité absolue annoncée dans les sondages, mais se maintient au sénat avec 19 sièges et a étendu sa présence dans la chambre basse avec 32 sièges.

M. Uribe "a obtenu le plus de voix car c'est un leader qui a une grande capacité d'influence", explique l'analyste Alejo Vargas, de l'université Nationale.

Il ralliera sûrement les parlementaires de Changement radical (centre droit) et certains du Parti conservateur, détracteurs du pacte passé avec l'ex-guérilla.

Ensemble, ils totalisent 134 des 280 sièges du nouveau Parlement, contre 109 avant.

- Vote sanction -

L'ex-guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie, devenue un parti politique, la Force alternative révolutionnaire commune, sous le même acronyme de Farc, a eu un début électoral difficile.

L'accord signé en 2016 lui garantit 10 sièges. Mais en participant à ces élections, une première après plus d'un demi-siècle de confrontation armée, elle espérait amplifier cette représentation.

Essai manqué : elle n'a pas atteint les 0,5% (85.094 voix).

Mais "ce n'est pas ressenti comme un échec. Tout projet de loi désormais présenté au Congrès devra compter avec ce groupe, c'est important", a déclaré Imelda Daza, qui était candidate à la vice-présidence en tandem avec le chef de la Farc, Rodrigo Londoño, qui s'est retiré de la présidentielle à la suite de problèmes de santé.

La sanction se traduit aussi par l'appui aux forces de droite les plus opposées à l'accord.

Cela "reflète le peu de soutien et même l'hostilité qu'il y a en Colombie envers les Farc", selon Yann Basset, le directeur de l'Observatoire des processus électoraux, à l'université du Rosario.

- Avancée historique -

Contre tout pronostic, le centre et la gauche ont fait une avancée inédite au Parlement.

"Le centre gauche est la mouvance qui a le plus progressé", souligne M. Basset.

Ces deux tendances qui soutiennent l'accord de paix ont 34 sièges. Avec ceux de l'ex-guérilla, elles pourraient parvenir à 44.

Ils ont été surtout remportés par le Pôle démocratique alternatif et la Liste de la décence (gauche), et par Alliance verte (centre). Le Pôle et l'Alliance n'avaient eu que 19 sièges en 2014, dans un pays traditionnellement gouverné par la droite.

Le centre et la gauche se sont aussi distingués avec respectivement l'ex-candidat à la présidentielle Antanas Mockus (539.999 voix) et le sénateur Jorge Robledo (225.761) qui ont remporté le plus de suffrages après Alvaro Uribe.

Mais les alliances ne sont pas assurées.

En outre, le Pôle et l'Alliance soutiennent la candidature à la présidentielle de Sergio Fajardo, ancien maire centriste de Medellin, la Liste de la décence appuyant Gustavo Petro.

La Farc ne s'est pas prononcée après le retrait de son candidat.

- Santos impopulaire -

Ex-ministre de la Défense, Juan Manuel Santos, qui quittera le pouvoir en août, a réussi ce qui semblait quasi impossible avant son arrivée à la présidence en 2010: conclure un accord de paix avec la rébellion la plus puissante d'Amérique et le désarmement de ses 7.000 combattants.

Mais, alors que le monde lui rendait hommage, y compris avec l'attribution du Nobel de la Paix 2016, sa popularité en Colombie n'atteint pas 20% et sa majorité s'est délitée.

Aux législatives de dimanche, son parti a été battu par la droite la plus critique de l'accord de paix, lui reprochant son "indulgence" envers les ex-rebelles. L'Unité nationale a perdu 19 sièges et ne présentera même pas de candidat à la présidentielle.
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