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La menace du syndrome de l’élection présidentielle de 2012 planerait-elle au-dessus de nos têtes ?

Lundi 21 Janvier 2019


La stratégie qu’il a très tôt mise en place pour sa réélection est presque arrivée à son terme. Conformément à sa volonté publiquement exprimée par son dévoué Premier Ministre, le Conseil constitutionnel a définitivement validé cinq candidatures, éliminant au passage vingt-cinq autres et, en particulier, celle de Khalifa Ababacar Sall (KAS) qui était la principale cible. Le président-politicien ne s’est pas arrêté en si bon chemin. Il a tenu à lui faire boire le calice jusqu’à la lie, en le révoquant directement de son poste de maire de Dakar, et indirectement de celui de député. Devant lui, le chemin est désormais ouvert pour un second quinquennat, KAS ne constituant plus une menace pour l’important bassin électoral de Dakar et de sa banlieue. C’est, du moins, sa forte conviction. Il peut donc continuer de dérouler tranquillement son plan. Dans cette perspective, il fait feu de tout bois, y compris du bois sacré de l’Islam, en n’hésitant même pas à inaugurer une mosquée un vendredi saint, avec un folklore indécent.
 
Pendant ce temps, les quatre candidats et les recalés (de l’opposition) préparent la riposte. Certains d’entre ces recalés n’excluent même pas d’empêcher l’organisation de l’élection présidentielle si leurs candidats en sont exclus. Je ferais montre, à leur place, de plus de réalisme. Quand on ne peut pas mobiliser cent mille (100.000) manifestants pour s’opposer au vote de la loi sur le parrainage, empêcher le président-politicien de modifier unilatéralement le Code électoral ou le contraindre à nommer un ministre de l’Intérieur neutre, je ne vois pas comment on peut empêcher l’élection présidentielle sur l’ensemble du territoire national. Nous avons quand même intérêt à nous rappeler, qu’à quelques encablures de l’élection présidentielle du 26 février 2012, les candidats de l’opposition passaient le plus clair de leur temps, par des manifestations diverses, à s’opposer à la troisième candidature du vieux président-politicien. Pendant ce temps, le candidat Macky Sall déroulait sa campagne aux quatre coins du pays. On connaît la suite. Ce syndrome de 2012 ne nous menace-t-il pas aujourd’hui ?
 
Je comprends parfaitement l’amertume et l’indignation de mes compatriotes dont les candidatures ont été invalidées. Je me joindrais volontiers à leurs manifestations si j’étais persuadé que celles-ci pourraient atteindre l’objectif déclaré. Nous nous connaissons bien entre Sénégalais et ne devons pas compter sur de fortes mobilisations pouvant faire reculer le président-politicien. J’appelle donc tous mes compatriotes à plus de réalisme. Les candidats recalés avaient une ambition pour le Sénégal. Malgré leur indignation et leur amertume que nous partageons, leur ambition pour le Sénégal devrait rester intacte et être reportée sur l’un des quatre candidats qui feront face au président-politicien. Je ne suis pas sûr que tous ces quatre soient ceux que nous attendions et le choix ne devrait donc pas être facile.
 
Cependant, il devrait s’imposer à tous ceux et à toutes celles qui ont pour ambition de barrer la route au président-politicien et lui substituer l’un des candidats de l’opposition le plus susceptible de porter cette ambition. Nous ne devons surtout pas perdre de vue que la perfection n’est pas de ce monde, que l’imperfection est inhérente à la nature humaine. Parmi les candidats recalés, il y a de fortes personnalités, des compétences avérées et dont personne ne doute de l’intégrité. Je les verrais volontiers rejoindre l’un des candidats dont ils pensent qu’il pourrait incarner leur ambition, leur vision pour un Sénégal nouveau, et constituer une sorte de ceinture de sécurité autour lui. Nous nous retrouverions ainsi avec quatre pôles de l’opposition qui travailleraient ensemble pour sécuriser le reste du processus électoral.
 
Dans cette perspective, ils veilleraient à ce que le Ministre de l’Intérieur et ses services distribuent les cartes d’électeurs, que les militants aillent les retirer et reconnaissent leurs bureaux de vote. Cette dernière précaution est nécessaire avec la carte électorale qui a été à dessein bouleversée. De même, le jour J, les différents candidats devraient être représentés dans tous les bureaux de vote et leurs électeurs rester sur place jusqu’à ce que les résultats soient affichés. Naturellement, auparavant, chacun des quatre candidats s’engagerait par écrit à soutenir celui d’entre eux qui ferait face au président-politicien au cas où il était contraint à un second tour.
 
J’irais plus loin d’ailleurs si je ne craignais pas que mon ami Alioune Tine me traite encore de naïf. Le Sénégal et les Sénégalais étant devenus ce qu’ils sont, il ne serait pas superflu qu’ils jurent sur le Coran de respecter leur engagement. Faute de le faire sur le Coran, ils jureraient au moins devant un jury d’honneur. Ce n’est pas de la naïveté, ce n’est pas superflu, c’est du réalisme. Dans ce pays, nous nous faisons de moins en moins confiance et n’avons pas tout à fait tort avec les nombreuses vidéos qui circulent dans les différents réseaux sociaux.
 
Personne ne comprendrait en tout cas, que les candidats recalés s’abstiennent et jettent par-dessus bord leur ambition, leur vision pour un Sénégal nouveau. On pourrait douter de la sincérité de cette ambition qui ne serait alors que personnelle. On comprendrait aussi difficilement que deux d’entre eux  se lancent dans l’aventure avec en bandoulière l’objectif d’empêcher le déroulement de l’élection présidentielle. C’est irréaliste, ils n’en ont pas les moyens. Persister dans cette position, c’est faciliter la réélection du président-politicien. C’est aussi la faciliter, en se laissant emporter par ce vent qui veut jeter le discrédit sur un certain candidat.
 
Dans le camp du président-politicien, tout est mis en œuvre pour arriver à cette fin. On l’écoute au téléphone, on se procure ses conversations et ses SMS. Et si on en faisait autant avec les pilleurs de deniers publics de la majorité ! Que de crimes découvrirait-on ! Peut-on se permettre de reprocher à tel ou tel compatriote de soutenir tel ou tel autre candidat, quand on court derrière la candidature du président-politicien ? Ce président-politicien que l’on peut considérer comme un traitre et qui l’est effectivement, lui qui a trahi tous ses engagements, y compris des plus solennels ? Ce président-politicien qui n’a rien à envier aux criminels, puisqu’il l’est lui-même ? Oui, c’est un criminel, puisqu’il commet des crimes et en couvre de très nombreux autres. Son seul décret qui a validé le contrat en faveur de Petro-Tim vaut à la fois crime et trahison.
 
Il en est de même de celui qui a validé le contrat d’exploitation du gaz et du pétrole en faveur de Total que le Ministre Thierno Alassane Sall d’alors avait refusé de signer, le géant français étant classé 5ème et « ayant fait des offres qui sont de loin les pires qu’on ait jamais enregistrés depuis 1985 au moins ». Des crimes, il en a commis bien d’autres depuis le 2 avril 2012. J’invite ses thuriféraires qui en doutent à se reporter à n’importe quel dictionnaire pour savoir que je n’exagère point en traitant leur mentor de criminel. Rien que le choix délibéré qu’il a tôt fait de détruire sans état d’âme la vie politique, sociale et pratiquement humaine de l’ancien député et maire de Dakar vaut un crime. Oui, c’est un crime de condamner l’ancien Maire de Dakar à 5 ans d’emprisonnement ferme et à 5 milliards de francs CFA d’amende, et de laisser les Directeurs généraux du COUD et de la Société nationale de la Poste (pour ne citer que ceux-là) humer l’air de la liberté et continuer impunément leurs forfaits. Alors, les gens qui courent derrière le président-politicien candidat à sa propre succession peuvent-ils reprocher à quelque Sénégalais que ce soit de soutenir l’un des quatre candidats de l’opposition de son choix ? Quand même !
 
Je réitère donc mon appel aux quatre candidats de l’opposition définitivement retenus par notre fameux Conseil Constitutionnel, à tous les autres dont la candidature a été invalidée comme à tous mes compatriotes qui en ont assez de la gouvernance hideuse du président-politicien, à se mobiliser et à se lancer d’ores et déjà à la conquête des électeurs et des électrices. Peu de jours nous séparent du 24 février 2019. Ne laissons surtout pas le terrain au président-politicien et à son camp ! Mettons-nous plutôt tous au travail et méfions-nous du syndrome de 2012 dont la menace plane au-dessus de nos têtes !
 
Dakar le 21 janvier 2019
Mody Niang
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