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Sénégal - Les magistrats balaient les arguments d’une ouverture de l’UMS à des personnalités extérieures

Dimanche 11 Août 2024

Le président Diomaye Faye avec le patron du Conseil constitutionnel Mamadou Badio Camara
Le président Diomaye Faye avec le patron du Conseil constitutionnel Mamadou Badio Camara

L’Union des magistrats sénégalais a rejeté toute présence de membres non magistrat dans le Conseil supérieur de la magistrature (CSM). C’est la position exprimée par son président, Ousmane Chimère Diouf, en assemblée générale le 10 août à Dakar devant les plus hautes autorités judiciaires du pays. Pour le patron de l’UMS, « la possibilité de voir des personnes ayant une coloration politique ou défendant des intérêts particuliers siéger en conseil relève de l’évidence ». Or, l’engagement politique partisan et la promotion d’intérêts particuliers sont « deux choses interdites aux magistrats ». 

 

En fin mai début juin 2024, les pouvoirs publics ont organisé des assises inclusives portant sur des réformes dans le fonctionnement de la justice. Ainsi, plusieurs propositions ont été faites dont celle visant l’ouverture du CSM à des personnalités extérieures au corps des magistrats. 

 

Le Conseil supérieur de la magistrature est l’organe statutaire en charge de la gestion de la carrière des magistrats, en termes de sanctions et d’avancement en particulier. Il est composé de 19 magistrats et de 2 membres du pouvoir exécutif que sont le président de la République - qui en assure la présidence - et le ministre de la Justice - qui en est le vice-président. 

 

Selon Ousmane Chimère Diouf, outre le « subjectivisme » tapi dans l’argumentaire des « théoriciens » de l’ouverture du CSM à d’autres couches professionnelles, il y a « un amalgame » qui serait entretenu à dessein entre l’administration quotidienne de la justice par des fonctionnaires qui ne sont pas toujours des magistrats et la magistrature en tant que telle. 

 

C’est de « l’agitation médiatique », a dénoncé Diouf qui repose le débat sous une autre forme en faisant la distinction « entre le juridique se disant de choses propres au droit et le judiciaire relatif à l’application de la loi ». 

 

« Tout juriste, quel que soit son niveau, n’est ni juge, ni procureur tant qu’il n’aura pas reçu la formation » qui en fait un juge ou un procureur « après avoir réussi au concours d’entrée au centre de formation judiciaire et franchi l’étape de l’examen de sortie », rappelle-t-il. 

 
L'UMS rattrapée par les turpitudes de son président, Ousmane Chimère Diouf

Ousmane Chimère Diouf, président de l'Union des magistrats sénégalais (UMS)

 

Contrairement aux députés qui sont considérés comme les représentants du peuple à l’assemblée nationale, « le Conseil supérieur de la magistrature ne peut en aucun cas être un reflet de la société », souligne le président du l’UMS. « Le risque de voir des lobbies être à l’origine d’une proposition ou d’un soutien de candidat à un poste n’est pas à écarter », prévient-il.

Sur le registre de l’étonnement, le président de l’Union des magistrats sénégalais souligne la curiosité qu’il y a à considérer que les juges d’une république bâtie sur des lois et des procédures « aussi complexes les unes que les autres », garants des droits et libertés constitutionnels mais aussi de l’intégrité de tous les scrutins, sont incapables « d’assurer (eux-mêmes), dans la transparence, la gestion de leurs carrières ». 

 

Il appelle ses collègues à s’interroger « sur la qualité de ceux qui (…) parlent au nom du peuple sans aucun mandat », mais aussi sur « ceux qui sont supposés siéger au Conseil sans être magistrat, pour représenter qui et pour apporter quelle plus-value ».

 
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1.Posté par Me François JURAIN le 12/08/2024 11:53
Et Monsieur le Président DIOUF a entièrement raison. Pourquoi ouvrir les instances qui régissent une profession, en occurrence celle de magistrats, à des personnes extérieures, fussent-elles du monde judiciaire (avocats, huissiers, etc.) Non, chaque profession a ses règles spécifiques, son travail particulier, et ne comprend pas le rendu de la justice qui veut. En France, la profession d'avocat a été ouverte à d'autres professions, telles que Conseil Juridique, anciens députés, anciens fonctionnaires, sans que cette entrée soit sanctionnée par un diplôme quelconque, et une expérience professionnelle quelconque: le résultat est catastrophique, on a multiplié le nombre "d'avocats", entrainant l’appauvrissement de la profession, et tiré le niveau culturel et juridique par le bas.

Chaque profession a ses règles strictes, et celle de magistrat, qui est noble mais tellement complexe et difficile, ne peut souffrir l'intrusion d'autres corporations, fussent-elles celles, hautement honorifiques de professeur comme cela avait été évoqué. Sans parler, comme le fait justement remarquer Monsieur le Président DIOUF, de l'intrusion de politiques ou de lobbies aux intentions douteuses. La magistrature est une affaire de ...magistrats, ET DOIT LE RESTER. N'oublions jamais que la Justice est une institution, et doit le rester. Ce n'est en rien un hall de gare.

Par contre, les magistrats doivent accepter une part de responsabilité, et leur demander des comptes, dans certaines affaires, ne m'apparait pas anormal. Je pense aux magistrats qui ont délivré des mandats de dépôt à plus d'un millier de personnes qui n'ont jamais compris pourquoi elles rentraient en prison, et qui n'ont jamais su pourquoi elles en sont sorties! Il y a là manifestement un manquement total de la part de ces magistrats félons, qui se sont mis au service d'un homme politique, au lieu d'être au service de la justice et du peuple. La meilleure des preuves, est cette loi d'amnistie, destinée à effacer tous les actes de justice politique, commis dans un passé récent, et il a suffi de quelques-uns pour déshonorer la justice tout entière, qui non seulement n'a pas besoin de ça, mais qui en plus ne mérite pas ça. Il est donc à espérer que l'analyse de Monsieur le Président DIOUF soit lue attentivement, et que ces motifs soient scrupuleusement compris et...suivis. On ne joue pas avec la justice, de quelque manière et sous quelque forme que ce soit. Donc, justice, chasse gardée, oui, mais par des magistrats responsables.
Me François JURAIN

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