Alors que la crise ouverte avec l’Alliance des Etats du Sahel (AES) s’aggrave de jour en jour, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest reçoit un renfort de taille, celui du Sénégal. Elle a sans doute applaudi aux propos du premier ministre sénégalais prononcés ce 27 décembre 2024 lors du discours de politique générale devant l’assemblée nationale. « Nous soutiendrons activement les chantiers de la Cedeao », a dit Ousmane Sonko. « Nous nous exercerons à être un pays modèle dans le domaine de l’intégration régionale en Afrique… », a-t-il ajouté.
Membres fondateurs de la Cedeao, le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont mis en place la Confédération des Etats de l’alliance du Sahel en se détachant du bloc ouest-africain. Leur départ effectif de la communauté a été fixé par les douze autres chefs d’Etat au 29 janvier 2025. Une séparation sur laquelle Bamako, Niamey et Ouagadougou pourraient revenir avec la période de rétractation de six mois laissée ouverte et qui expire le 29 juillet 2025.
Cette annonce du premier ministre sénégalais clarifie la posture diplomatique de Dakar dont certains chefs d’Etat de la Cedeao craignaient un glissement vers ce nouveau bloc en construction qu’est l’AES. Mais en affirmant le soutien actif du Sénégal à la communauté ouest-africaine, Ousmane Sonko privilégie la poursuite de la politique d’intégration en cours depuis 1975, année de création de la Cedeao. Une manière de dénoncer, sans le dire, la part de désintégration du bloc sous-régional dont se rendraient coupables les Etats de l’AES.
Toutefois, le Sénégal va rester dans le jeu pour « renforcer comme jamais auparavant ses relations avec les pays africains frères », a assuré Ousmane Sonko.
Le président Bassirou Diomaye Faye est encore, avec le Togolais Faure Gnassingbè, l’un des médiateurs dans la crise en cours. A eux deux, ils sont chargés de ramener les trois pays sahéliens dans le giron ouest-africain, mais n’y parviennent pas. La Cedeao leur a demandé de poursuivre leur mission jusqu’à terme, c’est-à-dire en juillet prochain.
Les généraux Assimi Goïta (Mali), Abdourahamane Tiani (Niger) et le capitaine Ibrahim Traoré (Burkina Fas0) ont, ces dernières semaines, durci leurs discours contre la Cedeao. Ils accusent l’organisation communautaire de chercher à les déstabiliser à travers son soutien aux bandes terroristes et criminels qui circulent dans l’espace sahélien. Pour eux, la Cedeao est devenue le bras armé de la France dans cette région. C’est pourquoi ils se sont tournés vers la Russie, devenue en peu de temps leur partenaire politique et stratégique commun.
Pour sa part, Paris n’entretient (presque) plus de relations avec les trois pays de l’Alliance des Etats du Sahel. Les troupes militaires françaises ont plié bagages partout sans disposer pour autant de sites de repli maintenant. La seule base militaire proche dont disposait encore la France était celle du Tchad. Mais Ndjaména a exigé la libération de cette emprise ainsi que le départ des forces militaires en fin novembre 2024. Les opérations de retrait ont débuté le 7 décembre dernier.