WASHINGTON (Reuters) - L'audience de confirmation de Jeff Sessions, choisi par Donald Trump pour diriger le département de la Justice, a été perturbée mardi au Sénat par des manifestants et dominée par son passé en matière de droits civiques et sur les questions raciales tout en mettant en lumière ses divergences avec le président élu.
Le sénateur républicain très conservateur de l'Alabama est la première personnalité désignée par le président élu pour siéger dans le futur gouvernement à se soumettre à cette procédure de confirmation.
Pressé de questions, il s'est au fil de l'audition démarqué des positions exprimées par Donald Trump lors de la campagne électorale sur la question de la torture (waterboarding), de l'interdiction d'accès au territoire américain pour les musulmans et des poursuites éventuelles contre Hillary Clinton.
Devant ses ex-collègues de la chambre haute, l'"Attorney General" désigné a balayé les allégations selon lesquelles il aurait marqué de la sympathie pour les suprémacistes blancs du Ku Klux Klan. "J'abhorre le Klan, ce qu'il représente et son idéologie de la haine", a-t-il dit dans son propos liminaire.
Le début de l'audience a été perturbé par plusieurs manifestants, dont certains s'étaient déguisés en membres du Klan avec fausse robe blanche à capuche. Un autre a brandi une pancarte appelant à "soutenir les droits civiques et à faire obstacle à Sessions".
Fidèle de Donald Trump dont il partage beaucoup de points de vue sur l'immigration ou le climat, Sessions, qui fut le premier sénateur républicain à lui apporter son soutien pendant les primaires, s'attendait à une audition houleuse devant la commission sénatoriale des Affaires judiciaires.
La sénatrice démocrate Diane Feinstein a déclaré que la commission avait reçu des lettres émanant de 400 organisations de défense des droits civiques s'opposant à sa nomination à la tête du département de la Justice. "Cette tâche nécessite d'être au service du peuple et de la loi, pas du président", a-t-elle dit.
En 1986, alors qu'il était procureur fédéral, Sessions avait vu sa candidature à un poste de juge fédéral rejetée en raison de propos racistes qui lui avaient été prêtés. Cela ne s'était produit qu'une seule fois au cours des cinquante années précédentes.
REFUS DE LA TORTURE
Lors de son audition, Sessions a été interrogé sur la pratique du "waterboarding", méthode d'interrogatoire utilisant la suffocation par l'eau que les agences de renseignement pratiquaient sous la présidence de George W. Bush.
"L'usage du waterboarding et d'autres formes de torture est absolument inapproprié et illégal", a-t-il estimé à propos de cette mesure que Trump qualifiait d'efficace lors de sa campagne, promettant de la remettre en usage et "pire encore", disait-il.
Concernant la question d'une interdiction du territoire américain fondé sur des critères religieux, Sessions a dit ne pas soutenir cette mesure, expliquant que les intentions de Trump étaient d'interdire l'accès aux personnes venant de pays abritant des terroristes mais pas à tous les musulmans.
Enfin, sur les éventuelles poursuites que Trump promettait d'engager contre Hillary Clinton, Sessions a estimé qu'il "n'était pas possible de transformer une rivalité politique en un contentieux pénal". "Ce pays ne punit pas ses adversaires politiques mais s'assure que personne n'est au-dessus des lois", a-t-il dit.
Dans les structures américaines du pouvoir, l'Attorney General est le premier procureur du pays et le conseiller juridique du président. A la tête du département de la Justice, il supervise aussi le système judiciaire qui décide de l'expulsion ou de l'asile des migrants.
Sessions a souligné qu'il intenterait des poursuites "vigoureuses" et "sans délai" contre ceux qui violent les frontières des Etats-Unis.
Il a par ailleurs indiqué, même s'il est en désaccord sur le fond, qu'il respecterait la loi découlant de l'arrêt de la Cour suprême qui reconnaît le droit à l'avortement. De même, il appliquera l'arrêt plus récent reconnaissant le droit au mariage des couples homosexuels.
En 2015, les républicains ont bloqué pendant 166 jours la nomination de l'actuelle Attorney General, Loretta Lynch, choisie par le président démocrate Barack Obama.