La secrétaire d'Etat chargée de la Citoyenneté, Sonia Backès, a présenté mercredi sa démission du gouvernement à Emmanuel Macron, trois jours après sa défaite aux élections sénatoriales en Nouvelle-Calédonie, dans un contexte de crispations entre l'exécutif et les indépendantistes de l'archipel.
Le chef de l'Etat a accepté la décision de sa secrétaire d'Etat "conformément à la règle républicaine", a indiqué l'Elysée. "Il l'a remerciée pour la qualité de son action au sein du gouvernement contre les séparatismes, contre les dérives sectaires et pour l'amélioration de l'intégration des étrangers", a-t-il ajouté.
Mme Backès, qui se présentait aux sénatoriales en Nouvelle-Calédonie sous l'étiquette du parti présidentiel Renaissance, avait essuyé une défaite surprise lors des élections sénatoriales dimanche dernier.
Il est d'usage sous la Ve République que les membres du gouvernement battus lors d'élections démissionnent. Mais sous la présidence d'Emmanuel Macron, ceux qui ont été battus ont été remplacés lors de remaniements plus larges, à l'instar de Jean-Michel Blanquer.
Originaire de Nouvelle-Calédonie, Mme Backès, qui est à la tête des élus "loyalistes" de l'archipel, était la seule membre du gouvernement candidate aux sénatoriales du week-end dernier.
Sa défaite est intervenue dans un contexte compliqué de discussions sur l'avenir institutionnel de l'archipel entre l'exécutif et les parties concernées.
Présidente de l'assemblée de la province Sud, elle a été battue sèchement au second tour par l'indépendantiste Robert Xowie.
- Crispation -
C'est la première fois qu'un indépendantiste calédonien est élu au Sénat. Avant lui, seul Roch Pidjot (Union calédonienne) avait occupé une fonction parlementaire en étant élu député de 1964 à 1986.
La démission du gouvernement de Mme Backès après sa défaite électorale devrait peser sur le processus calédonien en cours qui connaît une énième crispation, en étant considérée comme une nouvelle victoire par les indépendantistes.
Emmanuel Macron "lui renouvelle toute sa confiance pour l'action qu'elle mène au sein de la majorité et se réjouit de son réinvestissement dans le dossier calédonien", a assuré l'Elysée.
Mi-septembre, de retour en Nouvelle-Calédonie après une semaine de discussions à Paris, le principal parti indépendantiste, l'Union calédonienne, a annoncé la suspension de ses rencontres avec l'Etat, fustigeant le projet du gouvernement.
Une douche froide pour l'exécutif, qui avait affiché pourtant sa satisfaction à l'issue de ce round de discussions.
Le fait de mettre autour d'une même table à Paris indépendantistes et "loyalistes", et cela pour la première fois depuis 2019, avait été perçu par Emmanuel Macron et son gouvernement comme un signe d'espoir d'un accord politique en vue d'une révision constitutionnelle en 2024.
Le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, doit se rendre en Nouvelle-Calédonie fin octobre. Mais aucune date n'a été arrêtée formellement.
"Je veux remercier très sincèrement mon amie Sonia Backès pour son travail, son courage et son implication au ministère de l'Intérieur auprès de moi. Elle a fait honneur à sa fonction, luttant particulièrement contre les dérives sectaires et aidant ainsi de nombreux Français", a écrit M. Darmanin sur le réseau social X (anciennement Twitter).
La secrétaire d'Etat démissionnaire était entrée en juillet 2022 au gouvernement où elle avait succédé à Marlène Schiappa. L'Elysée n'a pas précisé mercredi qui lui succèderait.
Sa nomination au gouvernement auprès de M. Darmanin, également chargé des Outremer, et donc du dossier calédonien, avait fait grincer des dents les indépendantistes qui avaient dénoncé "une confusion des genres".
Ses premiers pas, place Beauvau, avaient été marqués par une polémique. Son conseiller spécial, Brieuc Frogier, avait été contraint de démissionner très vite pour avoir été un temps représentant d'Eric Zemmour en Nouvelle-Calédonie durant la campagne présidentielle.
Au cours de son bail au secrétariat d'Etat à la Citoyenneté, Mme Backès a dû gérer le scandale de la gestion du Fonds Marianne mis en place par sa prédécesseure. Scandale qui a valu à Mme Schiappa de quitter le gouvernement, où elle occupait le poste de secrétaire d'Etat à l'Economie solidaire.
En charge de la lutte contre les dérives sectaires, Sonia Backès avait expliqué à maintes reprises combien ce sujet lui tenait à coeur, compte tenu de son histoire familiale. Sa mère, avait-elle raconté, avait été "embrigadée par l'Eglise de Scientologie". [AFP]