Une nouvelle "nuit bleue" a frappé la Corse, avec une vingtaine d'explosions visant en majorité des résidences secondaires dans la nuit de dimanche à lundi, dix jours après la visite d'Emmanuel Macron qui a proposé à l'île une "autonomie dans la République".
Aucun blessé grave n'a à ce stade été recensé par les autorités qui ont avisé le parquet national antiterroriste qui devrait "acter sa saisine dans la journée".
En Corse-du-Sud, une "dizaine d'attentats" ont été recensés par le parquet d'Ajaccio, touchant des résidences secondaires et un ancien centre des impôts désaffecté à Ajaccio, dont "certains ont été revendiqués par le FLNC", a indiqué le procureur de la République d'Ajaccio, Nicolas Septe, dans un communiqué.
"Sous réserve d'analyses plus approfondies, les dégradations par incendie et explosions auraient été commises par l'utilisation de différents procédés: de l'explosif, des bonbonnes de gaz et du nitrate, parfois ces différents procédés étant associés", ajoute-t-il.
En Haute-Corse, une douzaine de faits ont été recensés, touchant des maisons en construction, une résidence secondaire et un lotissement partiellement occupé.
"Cela ressemble à ce qu'on a pu voir ces derniers mois. (...) Il y a notamment un dispositif avec un extincteur modifié, qui n'a pas explosé. La plupart des explosions sont dues à des bouteilles de gaz, mais les choses restent à déterminer. Ce sont des dispositifs artisanaux.
Les enquêteurs ont dû démultiplier les lieux d'intervention et ont travaillé toute la nuit", a expliqué à l'AFP François Thévenot, procureur de la République par interim de Bastia.
Selon lui, aucun tag ou revendication n'a été pour l'instant retrouvé en Haute-Corse.
- Recrudescence d'explosions -
Cette "nouvelle nuit bleue" évoquée par une source proche du dossier intervient une dizaine de jours après la venue du président de la République qui a proposé à la Corse "une autonomie dans la République", tout en prévenant que ce "moment historique" ne se fera pas "sans" ou "contre" l'Etat français.
La Corse connaît depuis près de deux ans une recrudescence d'incendies criminels et d'explosions visant principalement des résidences secondaires, le plus souvent assortis de tags nationalistes. Ces explosions ont été souvent revendiquées, certaines par le Front de libération nationale corse (FLNC), d'autres par le mouvement GCC (Ghjuventù Clandestina Corsa), un mouvement clandestin de jeunesse corse.
Dans un communiqué de revendication début août, le FLNC appelait ainsi à la création d'une "plateforme de résistance patriotique" face à "une colonisation de peuplement disproportionnée" et un "processus de destruction du peuple corse".
"Aucun accord entre la Corse et la France ne pourra être qualifié d'historique tant qu'il n'entérinera pas la reconnaissance des droits du peuple corse sur sa terre", poursuivait le texte.
Le groupe clandestin visait également "les Corses complices", qui "devront rendre des comptes" pour "avoir vendu leur terre et donc leur âme, aux plus offrants".
Selon une source judiciaire en août, 50 enquêtes "en lien avec des incendies criminels ou faits de destruction de diverses natures" en Corse ont été ouvertes par le parquet national antiterroriste depuis le début de l'année. Il y en avait eu 22 en 2022, trois en 2021 et quatre en 2020.
A la même date, le pôle antiterroriste du tribunal de Paris était chargé de 14 informations judiciaires en lien avec le terrorisme corse, avait-elle précisé.
La dernière "nuit bleue" de ce genre remonte à la nuit du 9 au 10 mars 2019, avec sept habitations endommagées au total, des faits pour lesquels les deux principaux prévenus ont été condamnés à six ans de prison ferme en avril 2022 par le tribunal judiciaire de Paris. Même sans revendication, la procureure avait jugé "la dimension terroriste" des faits "pleinement caractérisée". [AFP]