Par Momar DIENG
Après avoir mis un terme à des tentatives d’investitures qui allaient dans tous les sens, le président de la République et du parti Alliance pour la République (APR) a pris soin de choisir lui-même les hommes et les femmes de Benno Bokk Yaakaar les mieux à même, selon lui, de perpétuer sa majorité parlementaire à l’assemblée nationale, au soir des législatives du 30 juillet prochain.
Disposant d’une «totale latitude» dans ses choix, Macky Sall a mis en selle un certain nombre de responsables politiques dont le plus en vue est Amadou Bâ. Le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan n’a certes pas encore acquis l’envergure politique correspondant à ses fonctions d’Etat, mais le challenge que lui propose le chef de l’Apr pourrait lui en donner droit…
Pour nombre d’observateurs et de militants politiques de tous bords, Macky Sall n’avait pas trop de marge quand à celui qui devait diriger la liste de la coalition BBY pour le département de Dakar. Abdoulaye Diouf Sarr, le ministre des Collectivités locales, passait pour largement favori.
Son profil politique, adossé au fait qu’il a été le seul candidat du pouvoir à être capable d’arracher une mairie d’arrondissement (sur les 19 que compte Dakar), celle de Yoff, au rouleau compresseur de Khalifa Ababacar Sall aux élections locales de 2014. Un fait d’arme qui lui avait permis de se positionner (ou de se faire positionner) comme «le leader» du camp présidentiel dans la capitale. Dans un parti jamais structuré et qui fonctionne à l’informel grand I, ce n’était pas rien.
Mais dans le même temps, d’autres responsables «apéristes» s’activaient bruyamment et souvent de façon brouillonne ailleurs dans la région de Dakar. C’est dans le populeux arrondissement des Parcelles assainies qu’Amadou Bâ avait choisi de poser ses pénates, bousculant Mbaye Ndiaye, ex-maire des lieux, ancien ministre de l’Intérieur et conseiller plus ou moins tombé en disgrâce au palais.
Visiblement, le ministre des Finances avait reçu l’onction de Macky Sall au regard de la détermination et des moyens qui l’accompagnent dans cette descente sur le terrain. Il y mène campagne depuis plusieurs mois.
Des moyens jugés colossaux
Et c’est peut-être parce que les oracles séréro-pulaar lui ont soufflé à l’oreille que son «poulain» était prêt à faire le grand saut que le président Sall décida souverainement de faire du ministre son navire-amiral pour les législatives à Dakar. Mais à quel prix ?
C’est à ce niveau qu’il faudrait situer et identifier les perspectives liées à cet engagement du patron des finances sénégalaises. Pour accepter un tel risque – même s’il est de tradition que les régimes au pouvoir gagnent facilement les élections au niveau départemental grâce à un système majoritaire inique et injuste – Amadou Bâ a dû recevoir promesses et garanties fermes sur les conséquences possibles de son engagement. Dans sa posture, gagner pour gagner n’a de sens que si cela ouvre des horizons nouveaux. Le «deal» entre les deux hommes serait donc ailleurs.
Que pourrait espérer le ministre de l’Economie et des Finances de l’issue victorieuse d’une bataille politique qu’il aura menée à bout ? Occuper un siège de député ? Cela n’aurait pas de sens au regard de ses fonctions actuelles et pourrait être assimilé à une voie de garage. Et il ne semble pas que, même avec un nouveau statut de député, la présidence de l’assemblée nationale soit à l’ordre du jour dans un contexte où le principe de succession n’est pas à l’ordre du jour dans l’agenda présidentiel.
Un grand ministère régalien élargi avec le titre de ministre d’Etat, premier dans l’ordre protocolaire ? Cela relèverait plus d’un prestige supplémentaire que d’une véritable promotion qui le placerait au cœur de la décision politique.
Les ambitions politiques du ministre de l’Economie et des Finances sont un secret de polichinelle. Certains les considèrent même comme démesurées et pressantes pour ne pas dire folles. Il est bourré d’appétit de pouvoir, souligne un cadre dudit ministère
Une obsession qui trouve réalité et mise en œuvre dans la puissance des moyens déployés pour capter les Parcelles assainies, une commune où cohabitent pauvreté, oisiveté, insalubrité, surpeuplement, mixité, etc. Le genre de terreau fertile et accessible que préfèrent certains hommes politiques soucieux de s’imposer dans un laps de temps minimal avec le maximum de gains. C’est ici qu’Amadou Bâ a choisi de s’implanter pour accélérer une carrière politique qui n’existait pas il y a cinq ans.
Après les législatives et en cas de victoire, Macky Sall constituera un nouveau gouvernement qui devrait être fidèle au verdict des urnes. Et si son ministre de l’Economie sortait vainqueur de la bataille de Dakar, il pourrait – et devrait même, dit-on dans certains cercles politiques - en faire un Premier ministre de combat dans un tandem qui serait alors appelé à déblayer le chemin de l’élection présidentielle de 2019. L’homme est réputé disposer de moyens colossaux dans un environnement sociopolitique où l’argent est au cœur des stratégies de victoire.
Amadou Bâ est d’une nature sympathique, mais il n’a pas le charisme ravageur dont peuvent se targuer certains hommes politiques. Pour beaucoup de citoyens, il est le bras armé d’un régime qui appauvrit les Sénégalais à partir du Plan Sénégal Emergent (PSE), l’exécuteur des politiques publiques qui font que le pays est «macky», un technocrate qui n’a d’yeux que pour les (bons) chiffres de la croissance qui font sa (propre) renommée, un «emprunteur» impénitent qui endette le Sénégal et plusieurs générations de Sénégalais…
Mais l’homme a des atouts dont un, fondamental: il est au cœur du PSE et de la «dynamique» de l’économie sénégalaise que vantent les institutions de Bretton Woods. Or, le Plan Sénégal Emergent est devenu la seule et unique stratégie de développement économique et social appelée à transformer le Sénégal en pays émergent.
Une immersion poussée dans les grands et petits agrégats de l’économie locale et une implication forte dans les processus économiques et financiers internationaux dans lesquels le pays est engagé en fait un «allié» de taille pour le chef de l’Etat. Quasiment un dauphin virtuel au sommet de l’Exécutif. Au fil du temps et des projets-programmes développés, il a pris du galon et cache mal désormais des ambitions un peu trop évidentes. Une façon comme une autre d’atterrir un jour, par effraction, à la tête du pays.
Après avoir mis un terme à des tentatives d’investitures qui allaient dans tous les sens, le président de la République et du parti Alliance pour la République (APR) a pris soin de choisir lui-même les hommes et les femmes de Benno Bokk Yaakaar les mieux à même, selon lui, de perpétuer sa majorité parlementaire à l’assemblée nationale, au soir des législatives du 30 juillet prochain.
Disposant d’une «totale latitude» dans ses choix, Macky Sall a mis en selle un certain nombre de responsables politiques dont le plus en vue est Amadou Bâ. Le ministre de l’Economie, des Finances et du Plan n’a certes pas encore acquis l’envergure politique correspondant à ses fonctions d’Etat, mais le challenge que lui propose le chef de l’Apr pourrait lui en donner droit…
Pour nombre d’observateurs et de militants politiques de tous bords, Macky Sall n’avait pas trop de marge quand à celui qui devait diriger la liste de la coalition BBY pour le département de Dakar. Abdoulaye Diouf Sarr, le ministre des Collectivités locales, passait pour largement favori.
Son profil politique, adossé au fait qu’il a été le seul candidat du pouvoir à être capable d’arracher une mairie d’arrondissement (sur les 19 que compte Dakar), celle de Yoff, au rouleau compresseur de Khalifa Ababacar Sall aux élections locales de 2014. Un fait d’arme qui lui avait permis de se positionner (ou de se faire positionner) comme «le leader» du camp présidentiel dans la capitale. Dans un parti jamais structuré et qui fonctionne à l’informel grand I, ce n’était pas rien.
Mais dans le même temps, d’autres responsables «apéristes» s’activaient bruyamment et souvent de façon brouillonne ailleurs dans la région de Dakar. C’est dans le populeux arrondissement des Parcelles assainies qu’Amadou Bâ avait choisi de poser ses pénates, bousculant Mbaye Ndiaye, ex-maire des lieux, ancien ministre de l’Intérieur et conseiller plus ou moins tombé en disgrâce au palais.
Visiblement, le ministre des Finances avait reçu l’onction de Macky Sall au regard de la détermination et des moyens qui l’accompagnent dans cette descente sur le terrain. Il y mène campagne depuis plusieurs mois.
Des moyens jugés colossaux
Et c’est peut-être parce que les oracles séréro-pulaar lui ont soufflé à l’oreille que son «poulain» était prêt à faire le grand saut que le président Sall décida souverainement de faire du ministre son navire-amiral pour les législatives à Dakar. Mais à quel prix ?
C’est à ce niveau qu’il faudrait situer et identifier les perspectives liées à cet engagement du patron des finances sénégalaises. Pour accepter un tel risque – même s’il est de tradition que les régimes au pouvoir gagnent facilement les élections au niveau départemental grâce à un système majoritaire inique et injuste – Amadou Bâ a dû recevoir promesses et garanties fermes sur les conséquences possibles de son engagement. Dans sa posture, gagner pour gagner n’a de sens que si cela ouvre des horizons nouveaux. Le «deal» entre les deux hommes serait donc ailleurs.
Que pourrait espérer le ministre de l’Economie et des Finances de l’issue victorieuse d’une bataille politique qu’il aura menée à bout ? Occuper un siège de député ? Cela n’aurait pas de sens au regard de ses fonctions actuelles et pourrait être assimilé à une voie de garage. Et il ne semble pas que, même avec un nouveau statut de député, la présidence de l’assemblée nationale soit à l’ordre du jour dans un contexte où le principe de succession n’est pas à l’ordre du jour dans l’agenda présidentiel.
Un grand ministère régalien élargi avec le titre de ministre d’Etat, premier dans l’ordre protocolaire ? Cela relèverait plus d’un prestige supplémentaire que d’une véritable promotion qui le placerait au cœur de la décision politique.
Les ambitions politiques du ministre de l’Economie et des Finances sont un secret de polichinelle. Certains les considèrent même comme démesurées et pressantes pour ne pas dire folles. Il est bourré d’appétit de pouvoir, souligne un cadre dudit ministère
Une obsession qui trouve réalité et mise en œuvre dans la puissance des moyens déployés pour capter les Parcelles assainies, une commune où cohabitent pauvreté, oisiveté, insalubrité, surpeuplement, mixité, etc. Le genre de terreau fertile et accessible que préfèrent certains hommes politiques soucieux de s’imposer dans un laps de temps minimal avec le maximum de gains. C’est ici qu’Amadou Bâ a choisi de s’implanter pour accélérer une carrière politique qui n’existait pas il y a cinq ans.
Après les législatives et en cas de victoire, Macky Sall constituera un nouveau gouvernement qui devrait être fidèle au verdict des urnes. Et si son ministre de l’Economie sortait vainqueur de la bataille de Dakar, il pourrait – et devrait même, dit-on dans certains cercles politiques - en faire un Premier ministre de combat dans un tandem qui serait alors appelé à déblayer le chemin de l’élection présidentielle de 2019. L’homme est réputé disposer de moyens colossaux dans un environnement sociopolitique où l’argent est au cœur des stratégies de victoire.
Amadou Bâ est d’une nature sympathique, mais il n’a pas le charisme ravageur dont peuvent se targuer certains hommes politiques. Pour beaucoup de citoyens, il est le bras armé d’un régime qui appauvrit les Sénégalais à partir du Plan Sénégal Emergent (PSE), l’exécuteur des politiques publiques qui font que le pays est «macky», un technocrate qui n’a d’yeux que pour les (bons) chiffres de la croissance qui font sa (propre) renommée, un «emprunteur» impénitent qui endette le Sénégal et plusieurs générations de Sénégalais…
Mais l’homme a des atouts dont un, fondamental: il est au cœur du PSE et de la «dynamique» de l’économie sénégalaise que vantent les institutions de Bretton Woods. Or, le Plan Sénégal Emergent est devenu la seule et unique stratégie de développement économique et social appelée à transformer le Sénégal en pays émergent.
Une immersion poussée dans les grands et petits agrégats de l’économie locale et une implication forte dans les processus économiques et financiers internationaux dans lesquels le pays est engagé en fait un «allié» de taille pour le chef de l’Etat. Quasiment un dauphin virtuel au sommet de l’Exécutif. Au fil du temps et des projets-programmes développés, il a pris du galon et cache mal désormais des ambitions un peu trop évidentes. Une façon comme une autre d’atterrir un jour, par effraction, à la tête du pays.