Près de cinq mois après le début de son offensive, la Russie a élargi mercredi ses objectifs à d’autres territoires que ceux de l’est de l’Ukraine, Kyiv demandant pour sa part à ses alliés davantage d’armes et de nouvelles sanctions contre Moscou.
Pour surmonter la chute des livraisons russes de gaz, Bruxelles a proposé un plan visant à réduire de 15 % la demande européenne avec une limitation du chauffage de certains bâtiments, le report de la fermeture de centrales nucléaires et des entreprises incitées à réduire leurs besoins. Mais l’Espagne a déjà signifié son opposition.
Sur le plan militaire, le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a affirmé que les objectifs de la Russie ne se limitaient plus uniquement à l’est de l’Ukraine, mais concernaient également d’« autres territoires » et pourraient encore s’étendre. Il a justifié ce changement par une « géographie différente » par rapport à la situation sur le terrain à la fin mars.
Partie à l’assaut le 24 février, la Russie avait dit vouloir se concentrer sur le bassin du Donbass, une région minière en partie contrôlée par des séparatistes prorusses depuis 2014, après n’être notamment pas parvenue à prendre Kyiv, la capitale ukrainienne.
« Ce ne sont plus seulement les républiques populaires de Donetsk et Louhansk (deux territoires séparatistes de l’est de l’Ukraine, NDLR), ce sont aussi les régions de Kherson et de Zaporijjia (dans le sud, NDLR) et une série d’autres territoires et ce processus continue, de façon constante », a déclaré M. Lavrov à l’agence de presse Ria-Novosti et à la chaîne de télévision RT.
M. Lavrov a aussi déclaré que mener des pourparlers avec Kyiv n’aurait « aucun sens dans la situation actuelle », estimant que de précédents contacts avaient « seulement révélé l’absence de volonté, chez la partie ukrainienne, de discuter sérieusement de quoi que ce soit ».
L’Ukraine a répondu à l’annonce russe en réclamant plus d’armes et des sanctions supplémentaires contre Moscou.
« Les Russes veulent du sang, pas des négociations. J’appelle tous les partenaires à renforcer les sanctions contre la Russie et à accélérer les livraisons d’armes à l’Ukraine. » (Dmytro Kouleba, chef de la diplomatie ukrainienne)
La première dame ukrainienne Olena Zelenska, en visite aux États-Unis, a pour sa part prononcé un vibrant plaidoyer devant le Congrès américain : « Je vous demande davantage d’armes […] pour protéger les maisons de chacun et le droit de se réveiller vivant dans ces maisons », a-t-elle lancé.
Avancées russes
L’armée russe a enregistré des gains ces dernières semaines dans le Donbass, faisant notamment sauter le double verrou de Sievierodonetsk et de Lyssytchansk, deux villes de la région de Louhansk, ce qui lui a dégagé la voie pour tenter d’avancer vers les villes de Kramatorsk et de Sloviansk, plus à l’ouest dans la région de Donetsk.
De rudes combats continuent de se dérouler dans cette partie de l’Ukraine, Kyiv pouvant compter sur les récentes livraisons de pièces d’artillerie occidentales plus performantes.
M. Lavrov a d’ailleurs prévenu que si les Occidentaux continuaient de fournir à l’Ukraine des armes capables de frapper à longue distance, comme les lance-roquettes multiples américains Himars, les objectifs géographiques de la Russie évolueraient encore.
Dans le sud, de nouveaux bombardements ont fait au moins deux morts et neuf blessés dans la ville de Nikopol, a déploré son maire Oleksandre Saïouk.
Selon le responsable régional Oleksandre Vilkoul, les Russes ont tiré des salves de missiles Grad à partir des territoires occupés dans le sud de l’Ukraine, dont 30 ont touché la ville.
Parmi les blessés, quatre sont des enfants, le plus jeune ayant trois ans. « Trois immeubles ont été complètement détruits, jusqu’à dix autres endommagés », a-t-il précisé.
À Kharkiv, dans le nord-est, des bombardements ont fait au moins trois morts, ont dit les autorités locales. Parmi les victimes, un adolescent de 13 ans tué près d’un arrêt de bus dont les journalistes de l’AFP ont vu le corps et les proches en état de choc, agenouillés près de lui, au milieu de débris de verre.
Inquiétudes pour le gaz
Dans l’immédiat, l’Europe est suspendue à la décision de Moscou de rouvrir ou non les vannes du gazoduc Nord Stream, qui approvisionne principalement l’Allemagne et ne livre plus qu’à 40 % de ses capacités depuis mi-juin.
Le président russe Vladimir Poutine a laissé entendre que le gazoduc pourrait redémarrer jeudi matin, mais que si la Russie ne recevait pas une turbine manquante, il ne fonctionnerait qu’à 20 % de sa capacité. « Un prétexte », a aussitôt réagi l’Allemagne.
L’opérateur allemand Gascade a assuré prévoir une reprise dès jeudi au niveau d’« avant la maintenance », soit 40 % des capacités. En début de soirée, le président de l’Agence allemande des réseaux, Klaus Müller, a estimé que la livraison pourrait finalement n’être jeudi que d’« environ 30 % » de la capacité de Nord Stream 1.
À Bruxelles, la Commission européenne prépare les esprits à des pénuries de gaz qui risquent de freiner l’activité économique et entraîner des difficultés pour se chauffer pendant l’hiver.
La Russie couvrait 40 % de l’approvisionnement en gaz de l’Europe jusqu’à l’an dernier.
« La Russie utilise le gaz comme une arme. En cas d’interruption totale, l’Europe devra être prête », a lancé la présidente de l’exécutif européen, Ursula von der Leyen.
Mais le plan européen ne fait pas l’unanimité. Le gouvernement espagnol s’est dit opposé à la réduction de la consommation de gaz d’au moins 15 % souhaitée par Bruxelles pour l’ensemble des États membres de l’Union européenne, jugeant que cette mesure n’était pas forcément « juste » ni « efficace ».
Madrid a également regretté que cette mesure n’ait pas fait l’objet d’un débat préalable. Ce plan doit être discuté le 26 juillet à l’occasion d’un Conseil européen.
Concernant un autre dossier sensible, relatif aux céréales, le président russe Vladimir Poutine a douché l’espoir d’une reprise des exportations par la mer Noire des 20 millions de tonnes de céréales ukrainiennes bloquées en raison de la guerre.
« Nous faciliterons l’exportation des céréales ukrainiennes, mais en partant du fait que toutes les restrictions liées aux possibles livraisons à l’exportation des céréales russes soient levées », a-t-il déclaré.
La guerre a entraîné un bond des cours des céréales (blé, maïs), insoutenable pour les pays les plus dépendants pour leurs importations, comme l’Égypte, le Liban et la Tunisie.
Enfin, complétant les six trains de sanctions adoptés depuis le début de la guerre, l’Union européenne a approuvé un embargo sur les exportations d’or de Russie. Elle va également geler les actifs de la banque russe Sberbank et ajouter plusieurs personnalités et entités à sa liste noire. (AFP)
Pour surmonter la chute des livraisons russes de gaz, Bruxelles a proposé un plan visant à réduire de 15 % la demande européenne avec une limitation du chauffage de certains bâtiments, le report de la fermeture de centrales nucléaires et des entreprises incitées à réduire leurs besoins. Mais l’Espagne a déjà signifié son opposition.
Sur le plan militaire, le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a affirmé que les objectifs de la Russie ne se limitaient plus uniquement à l’est de l’Ukraine, mais concernaient également d’« autres territoires » et pourraient encore s’étendre. Il a justifié ce changement par une « géographie différente » par rapport à la situation sur le terrain à la fin mars.
Partie à l’assaut le 24 février, la Russie avait dit vouloir se concentrer sur le bassin du Donbass, une région minière en partie contrôlée par des séparatistes prorusses depuis 2014, après n’être notamment pas parvenue à prendre Kyiv, la capitale ukrainienne.
« Ce ne sont plus seulement les républiques populaires de Donetsk et Louhansk (deux territoires séparatistes de l’est de l’Ukraine, NDLR), ce sont aussi les régions de Kherson et de Zaporijjia (dans le sud, NDLR) et une série d’autres territoires et ce processus continue, de façon constante », a déclaré M. Lavrov à l’agence de presse Ria-Novosti et à la chaîne de télévision RT.
M. Lavrov a aussi déclaré que mener des pourparlers avec Kyiv n’aurait « aucun sens dans la situation actuelle », estimant que de précédents contacts avaient « seulement révélé l’absence de volonté, chez la partie ukrainienne, de discuter sérieusement de quoi que ce soit ».
L’Ukraine a répondu à l’annonce russe en réclamant plus d’armes et des sanctions supplémentaires contre Moscou.
« Les Russes veulent du sang, pas des négociations. J’appelle tous les partenaires à renforcer les sanctions contre la Russie et à accélérer les livraisons d’armes à l’Ukraine. » (Dmytro Kouleba, chef de la diplomatie ukrainienne)
La première dame ukrainienne Olena Zelenska, en visite aux États-Unis, a pour sa part prononcé un vibrant plaidoyer devant le Congrès américain : « Je vous demande davantage d’armes […] pour protéger les maisons de chacun et le droit de se réveiller vivant dans ces maisons », a-t-elle lancé.
Avancées russes
L’armée russe a enregistré des gains ces dernières semaines dans le Donbass, faisant notamment sauter le double verrou de Sievierodonetsk et de Lyssytchansk, deux villes de la région de Louhansk, ce qui lui a dégagé la voie pour tenter d’avancer vers les villes de Kramatorsk et de Sloviansk, plus à l’ouest dans la région de Donetsk.
De rudes combats continuent de se dérouler dans cette partie de l’Ukraine, Kyiv pouvant compter sur les récentes livraisons de pièces d’artillerie occidentales plus performantes.
M. Lavrov a d’ailleurs prévenu que si les Occidentaux continuaient de fournir à l’Ukraine des armes capables de frapper à longue distance, comme les lance-roquettes multiples américains Himars, les objectifs géographiques de la Russie évolueraient encore.
Dans le sud, de nouveaux bombardements ont fait au moins deux morts et neuf blessés dans la ville de Nikopol, a déploré son maire Oleksandre Saïouk.
Selon le responsable régional Oleksandre Vilkoul, les Russes ont tiré des salves de missiles Grad à partir des territoires occupés dans le sud de l’Ukraine, dont 30 ont touché la ville.
Parmi les blessés, quatre sont des enfants, le plus jeune ayant trois ans. « Trois immeubles ont été complètement détruits, jusqu’à dix autres endommagés », a-t-il précisé.
À Kharkiv, dans le nord-est, des bombardements ont fait au moins trois morts, ont dit les autorités locales. Parmi les victimes, un adolescent de 13 ans tué près d’un arrêt de bus dont les journalistes de l’AFP ont vu le corps et les proches en état de choc, agenouillés près de lui, au milieu de débris de verre.
Inquiétudes pour le gaz
Dans l’immédiat, l’Europe est suspendue à la décision de Moscou de rouvrir ou non les vannes du gazoduc Nord Stream, qui approvisionne principalement l’Allemagne et ne livre plus qu’à 40 % de ses capacités depuis mi-juin.
Le président russe Vladimir Poutine a laissé entendre que le gazoduc pourrait redémarrer jeudi matin, mais que si la Russie ne recevait pas une turbine manquante, il ne fonctionnerait qu’à 20 % de sa capacité. « Un prétexte », a aussitôt réagi l’Allemagne.
L’opérateur allemand Gascade a assuré prévoir une reprise dès jeudi au niveau d’« avant la maintenance », soit 40 % des capacités. En début de soirée, le président de l’Agence allemande des réseaux, Klaus Müller, a estimé que la livraison pourrait finalement n’être jeudi que d’« environ 30 % » de la capacité de Nord Stream 1.
À Bruxelles, la Commission européenne prépare les esprits à des pénuries de gaz qui risquent de freiner l’activité économique et entraîner des difficultés pour se chauffer pendant l’hiver.
La Russie couvrait 40 % de l’approvisionnement en gaz de l’Europe jusqu’à l’an dernier.
« La Russie utilise le gaz comme une arme. En cas d’interruption totale, l’Europe devra être prête », a lancé la présidente de l’exécutif européen, Ursula von der Leyen.
Mais le plan européen ne fait pas l’unanimité. Le gouvernement espagnol s’est dit opposé à la réduction de la consommation de gaz d’au moins 15 % souhaitée par Bruxelles pour l’ensemble des États membres de l’Union européenne, jugeant que cette mesure n’était pas forcément « juste » ni « efficace ».
Madrid a également regretté que cette mesure n’ait pas fait l’objet d’un débat préalable. Ce plan doit être discuté le 26 juillet à l’occasion d’un Conseil européen.
Concernant un autre dossier sensible, relatif aux céréales, le président russe Vladimir Poutine a douché l’espoir d’une reprise des exportations par la mer Noire des 20 millions de tonnes de céréales ukrainiennes bloquées en raison de la guerre.
« Nous faciliterons l’exportation des céréales ukrainiennes, mais en partant du fait que toutes les restrictions liées aux possibles livraisons à l’exportation des céréales russes soient levées », a-t-il déclaré.
La guerre a entraîné un bond des cours des céréales (blé, maïs), insoutenable pour les pays les plus dépendants pour leurs importations, comme l’Égypte, le Liban et la Tunisie.
Enfin, complétant les six trains de sanctions adoptés depuis le début de la guerre, l’Union européenne a approuvé un embargo sur les exportations d’or de Russie. Elle va également geler les actifs de la banque russe Sberbank et ajouter plusieurs personnalités et entités à sa liste noire. (AFP)