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Journalistes et médias sénégalais : RSF encourage un nouveau départ après les heures sombres de 2021-2024

Jeudi 6 Juin 2024

Maison de la presse : en 2023, une veillée nocturne pour la défense des journalistes et la liberté de presse (illustration)
Maison de la presse : en 2023, une veillée nocturne pour la défense des journalistes et la liberté de presse (illustration)

34 attaques subies de la part des policiers et gendarmes, 15 arrestations et interpellations, victimes directes des suspensions d’internet et de plusieurs plateformes de réseau social, cyber-harcèlement, pressions politiques, désinformation organisée… Les journalistes et médias sénégalais ont payé un lourd tribut à l’autoritarisme des autorités et à la violence des organes de répression sur la séquence 2021-2024. Le bilan documenté de ces « heures sombres » est implacable. Il est l’oeuvre de Reporters sans frontières (RSF) qui en a livré les grandes lignes ce 6 juin 2024 avec le lancement du rapport « Le journalisme sénégalais à la croisée des chemins ». Pour RSF, l’heure d’un nouveau départ est arrivée car « le Sénégal doit servir de locomotive » à l’affirmation d’une liberté de presse malmenée dans une région ouest-africaine « qui tend à devenir une zone de non droit en matière d’information ». 

 

Le changement de régime intervenu en avril 2024 n’est pas étranger à cette rebuffade voulue par RSF. Selon Sadibou Marong, directeur du Bureau Afrique Subsaharienne de RSF, « le visage balafré de l’écosystème médiatique sénégalais doit se cicatriser ». La perte de 45 places en trois ans au classement mondial de la liberté de presse doit rester un mauvais souvenir. 

 

Pourtant, note Anne Bocandé, « le Sénégal était un pays proche d’être exemplaire ». Que s’est-il passé pour qu’en l’espace de trois le pays rétrograde de la 49e à la 94e place dans le monde ? « Où va le journalisme sénégalais », se demande la directrice éditoriale de Reporters sans frontières venue prendre part à l’événement ? 

 

A l’intention des nouvelles autorités et des organisations de journalistes, RSF a formulé un paquet de 30 recommandations visant à réformer le paysage médiatique sénégalais. L’objectif est d’arriver à ce que la liberté de presse, la liberté d’expression et la sécurité globale des journalistes et des médias ne soient plus à la merci de politiciens et/ou de groupes de pression. 

 

L’une de ces recommandations est la suppression du Code de la presse de toutes les peines d’emprisonnement liées à des infractions de presse. A cet effet, RSF demande au Président sénégalais de respecter un engagement électoral et « d’assurer qu’aucun journaliste ne sera privé de sa liberté pour avoir exercé son métier ». A cet égard, la libération - sans charge - des directeurs de publication des journaux ‘’Le Quotidien’’ et ‘’Tribune’’ après leurs auditions par la gendarmerie dans le dossier du général Souleymane Kandé serait un signal positif. 

 

En perspective de l’adoption d’une loi de protection des lanceurs d’alerte, RSF préconise que ces nouveaux acteurs soient reconnus « comme sources journalistiques bénéficiaires du régime de protection de la confidentialité ». Un tel traitement aiderait les journalistes à « remplir leur mission d’information en toute indépendance. » 

 

C’est dans son premier discours à la nation du 3 avril 2024 que le Président Bassirou Diomaye Faye avait dit son intention de faire adopter 

une telle loi dans le but d’encourager des personnes en situation de dénoncer, par des canaux spécifiques, des faits et actes jugés contraires à l’intérêt général du pays.

 

Une autre recommandation de RSF porte sur le financement, la gestion transparente et l’identité des propriétaires des médias, au-delà des questions de fiscalité auxquelles sont confrontés certains d’entre eux. A coté, le soutien financier de l’Etat est demandé en faveur des radios communautaires pour leur apport en termes d’information de proximité et pour leur « contribution à la cohésion sociale, à l’intérieur de et entre les communautés ». 

 

Les 30 recommandations que RSF assure avoir transmises au ministre de la Communication Alioune Sall sont « une opportunité » pour les médias et les autorités sénégalaises à promouvoir un « journalisme de qualité ». Reporters sans frontières se déclare prête à accompagner les acteurs à travers son processus de certification multipartite appelé JTI (Journalism Trust Initiative) dont la finalité est de fournir un label qui met « en valeur un journalisme digne de confiance ».

 

Sur ce front, Mamadou Thior, président du Cored (Conseil pour le respect des règles d'éthique et de déontologie dans les médias) a appelé l’Etat à « prendre ses responsabilités » devant l’afflux d’une « presse clandestine ». Avant lui, le journaliste Mamadou Kassé avait rappelé que « la presse est consubstantielle à la démocratie » Mais qu’elle « est aujourd’hui à la croisée des chemins, à un moment où elle peut être menacée dans sa survie. » [IMPACT.SN]

 

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