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L'Assemblée vote la suppression de la redevance puis les débats s'enrayent

Dimanche 24 Juillet 2022

L'Assemblée vote la suppression de la redevance puis les débats s'enrayent
 
L'Assemblée nationale a voté samedi la suppression de la redevance audiovisuelle et rejeté de justesse une taxe sur les "superprofits" des grands groupes, après des difficultés dans la majorité et une poussée de tension, en attendant la reprise des débats sur le pouvoir d'achat lundi.
 
Après quatre jours de débats houleux sur le projet de loi en faveur du pouvoir d'achat, les députés sont aux prises depuis vendredi, via le projet de budget rectifié, avec le deuxième volet des mesures destinées à contrer les effets de l'inflation.
 
En fin de soirée samedi, les députés LREM ont été mis en minorité: à l'encontre de ce qu'ils souhaitaient, l'Assemblée a décidé pour 2022 d'allouer 120 millions aux départements qui versent le RSA, pour compenser intégralement la hausse de 4% de cette prestation programmée par l'Etat.
 
Un amendement en ce sens a été adopté par la conjonction des votes favorables de la gauche, du RN, des LR mais aussi, et c'est la première fois, des députés du groupe Horizons allié de la majorité.
 
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a tancé ceux "qui n'ont que le mot rétablissement des finances publiques à la bouche" et qui "engagent de telles dépenses publiques".
 
- "Petit psychodrame" -
 
Rappels au règlement et suspensions de séance ont suivi, cependant que la gauche se réjouissait que "la minorité présidentielle ne décide plus de tout toute seule".
 
Après ce "petit psychodrame", selon le communiste Nicolas Sansu, M. Le Maire a calmé les esprits en acceptant un "travail" avec tous les groupes politiques sur un futur soutien financier aux collectivités en difficulté. 
 
"Le ministre a entériné que passer en force n'est pas possible" dans cette Assemblée où les macronistes n'ont qu'une majorité relative, a relevé le président de la commission des Finances Eric Coquerel (LFI). 
 
Alors que quelque 375 amendements restaient encore au menu, terminer l'examen de ce budget rectifié dans la nuit paraissait hors d'atteinte. Reprise finalement lundi de cette première lecture vers 17H00.
 
Un point prochain du texte a été déminé: Bruno Le Maire s'est dit favorable à augmenter de 18 à 30 centimes la remise sur le litre des carburants, dans un compromis avec les députés Les Républicains qui appelaient à aller "plus loin".
 
"La remise pourrait passer de 18 à 30 centimes d'euros en septembre et en octobre, puis passer à 10 en novembre et 10 en décembre", a-t-il détaillé. Et avec la remise de 20 centimes à la pompe annoncée par TotalEnergies, "vous auriez dans certaines stations services en France un carburant à 1,5 euro", seuil défendu par LR.
 
- Exit la taxe sur les "superprofits" -
 
Dans la matinée, la suppression de la redevance qui finance l'audiovisuel public, une promesse d'Emmanuel Macron, était passée sans encombre, bien qu'elle suscite de nombreuses interrogations sur l'indépendance des médias concernés.
LR et RN ont voté pour, l'alliance de gauche Nupes à l'unanimité contre.
 
Des amendements de la majorité et de LR ont été adoptés pour affecter "une fraction" de la TVA, pour un montant d'environ 3,7 milliards d'euros, dans le but de répondre aux inquiétudes sur le financement de ce secteur.
 
Le ministre des Comptes publics Gabriel Attal a exprimé son attachement à "un audiovisuel public fort", en qualifiant "d'obsolète" cette redevance basée sur la possession d'un téléviseur, à l'heure des tablettes et autres smartphones. La redevance est fixée à 138 euros par an en métropole.
 
La ministre de la Culture Rima Abdul Malak a fait valoir que "ce n'est pas la redevance qui garantit l'indépendance" mais l'Arcom (ex-CSA), qui nomme les dirigeants de l'audiovisuel public.
 
La gauche a accusé le gouvernement de s'inspirer de l'extrême droite pour à terme démanteler l'audiovisuel public. "Zemmour et Mme Le Pen l'avaient demandé, M. Macron l'aura fait", a lancé Stéphane Peu (PCF).
 
La présidente du groupe RN a toutefois estimé que "le projet du gouvernement n'a rien à voir avec ce que nous voulons faire", à savoir une "privatisation" en bonne et due forme.
Le camp présidentiel doit fréquemment chercher des appuis au coup par coup face aux assauts parfois conjugués des oppositions.
 
L'appui de LR, espéré pour faire adopter ce projet de budget sans devoir compter sur les voix du RN, s'est matérialisé par le rejet de la taxe sur les "superprofits" à 18 voix près.
 
Quatre députés de la majorité se sont abstenus, parmi lesquels Sacha Houlié et Caroline Janvier, qui avaient défendu le principe de cette taxe. Un de leur collègue d'Horizons a voté pour.
 
Le ministre de l'Economie a quant à lui critiqué le principe d'une taxe - de "l'emphase idéologique", selon lui. 
 
L'alliance de gauche Nupes a déploré ce refus, citant les cas de l'Espagne, la Grande-Bretagne ou l'Italie qui ont adopté des taxes exceptionnelles sur les "superprofits".
 
 
 
 
Débat refusé avec Ousmane Sonko – Mais que craindrait donc Aminata Touré ?
 
A raison, beaucoup d’observateurs (et même des acteurs) de la vie politique ont mis le doigt sur la pauvreté du débat politique de fond qui devrait entourer les élections législatives du 31 juillet 2022. Les propositions visant à transformer l’Assemblée nationale en une institution forte, respectée et surtout utile ne sont pas réellement mises en évidence et en contradiction les unes par rapport aux autres à travers des affrontements entre candidats à la députation. La faute sans doute à mille et une lourdeurs qui maintiennent la démocratie de débats dans des postures plus personnelles que d’ordre programmatique.
 
Faut-il le rappeler, alors que les alternances s’enchainent dans notre pays depuis 2000, il n’y a jamais eu de débat présidentiel d’entre deux tours. Les présidents sortants qui se croient assez solides et jaloux de leurs positions ne prennent aucun risque qui les mettrait en danger face à leurs challengers d’opposition. L’opposant Abdoulaye Wade a en vain  remué ciel et terre pour en découdre avec Abdou Diouf. Devenu Président, il a récidivé en 2012 – toujours sans succès - pour croiser le fer avec un Macky Sall qui était en ballotage plus que favorable pour le second tour. C’est à croire que seuls les perdants présumés auraient intérêt à débattre…
 
C’est à peu près dans cette même configuration qu’aurait dû se situer l’appel au débat lancé par Ousmane Sonko, chef de file de l’opposition mais non candidat aux législatives du 31 juillet, à Aminata Touré, tête de liste nationale de la coalition au pouvoir Benno Bokk Yaakaar (BBY). Loin de la dimension affective et individuelle des joutes présidentielles, ces élections parlementaires n’en restent pas moins les plus dramatiques de ces dernières années en termes d’enjeux eu égard à la puissance des adversités entre le camp présidentiel et l’opposition de la mouvance Yewwi.
 
Violence contre violence
 
Pour accepter le débat avec Ousmane Sonko, Aminata Touré lui a opposé de nombreux « préalables » : le renoncement à la violence, la condamnation du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC), un « soutien sans faille à l’Armée nationale », sa reconnaissance « du caractère multiethnique de la Casamance comme partie intégrante et inséparable du Sénégal », son engagement « à respecter les institutions qu’il attaque régulièrement », et enfin « que Ousmane Sonko se lave de toutes les accusations graves dans le dossier pendant en justice car elle (Aminata Touré) milite depuis de longues années pour la protection morale et physique des femmes vulnérables. »
 
Cette liste de « préalables » non négociables dressée par l’ancienne première ministre suffit à elle seule pour valider une fuite en avant on assumée. Comment exiger d’un adversaire politique qu’il « renonce publiquement à la violence » alors qu’il accuse - justement ou injustement - votre camp d’être la source et le vecteur des dites violences ? Aminata Touré a-t-elle une seule fois condamné les dérapages ethnicistes et les appels à la violence de ses propres amis politiques – Aliou Dembourou Sow et ses machettes, Lat Diop et Hamath Suzanne Camara et leur apologie du meurtre contre Ousmane Sonko ?
 
Si le thème de la violence est opportunément érigé en poncif politicien par le camp présidentiel pour faire écran sur des faiblesses intrinsèques de taille, les autres « préalables » relèvent davantage d’une démarche populiste dont le but ultime est de fermer la porte à tout débat. Par exemple, comment exiger d’un simple justiciable sénégalais qu’il hâte lui-même son procès éventuel (où son non-lieu) dans une affaire dont l’avancée dépend de la volonté du juge d’instruction qui en a la charge ? 
 
Le bilan du président Sall, un boulet
 
La qualité boiteuse des conditionnalités dressées en barrage par l’ancienne ministre de la Justice pour sa protection et celle de son camp ne peut masquer les motivations derrière une fuite en avant mâtinée de prétextes en phase avec l’air du temps chez une partie de l’opinion publique. Mais leurs limites ne peuvent échapper à la critique et aux observateurs de bonne foi.
 
Le bilan du président Macky Sall ne peut certes être ravalé à un zéro pointé, mais dix ans après son arrivée au pouvoir, défendre publiquement ledit bilan – qui plus est dans un débat radiotélévisé qui se prolongerait sur les réseaux sociaux et intéresserait de près la presse étrangère – à quelques jours de scrutins législatifs cruciaux ne serait pas loin du suicide politique prémédité. Ne serait-ce pas là la raison cachée de cette multiplication effrénée de barrières ?
 
Au fond, Aminata Touré – auteure jusqu’ici d’une campagne électorale dynamique - avait une seule bonne raison de «sécher» la confrontation médiatique avec Ousmane Sonko. Elle aurait consisté à dire : « je suis candidate, vous ne l’êtes pas, donc pas de débat possible entre nous. » Et le débat serait clos ! Et elle aurait été inattaquable.
 
 
 
 
 
 
 
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