NEW YORK (Reuters) - Donald Trump s'est efforcé tout au long de sa campagne électorale de se présenter en homme d'affaires accompli capable d'appliquer à l'échelle des Etats-Unis les recettes qui lui ont permis de faire fructifier la fortune familiale, en faisant notamment valoir ses qualités de négociateur.
Certains spécialistes des questions d'éthique redoutent toutefois que l'immense conglomérat qu'il dirige, la Trump Organization, et sa présidence se heurtent à un nombre sans précédent de conflits d'intérêt dès sa prise de fonction, prévue le 20 janvier 2017.
La législation fédérale américaine n'interdit pas à un président de posséder des entreprises privées tout en exerçant ses fonctions, contrairement aux membres du Congrès qui sont sur ce point soumis à des règles très strictes.
A titre d'exemple, le président Lyndon Johnson a continué d'administrer discrètement ses sociétés alors qu'il assurait en public avoir cessé de le faire, souligne son biographe, Robert Caro.
"Il n'y a aucune restriction légale", note Noah Bookbinder, directeur général de Citizens for Responsibility and Ethics in Washington, une organisation civique indépendante.
Depuis Lyndon Johnson, la plupart des locataires de la Maison blanche ont cependant placé leurs actifs personnels, qu'il s'agisse de bien immobiliers ou d'investissements financiers, dans des fonds fiduciaires sans droit de regard (blind trusts) gérés par des administrateurs indépendants, afin d'éviter les conflits d'intérêts.
Barack Obama a là-dessus fait figure d'exception, essentiellement en raison de la nature de ses investissements, majoritairement constitués de fonds indiciels et de bons du Trésor qui ne présentent pas le risque de provoquer de quelconques conflits d'intérêts.
LARGE ÉVENTAIL D'INVESTISSEMENTS
Son successeur possède en revanche un large éventail d'investissements, dans la franchise, l'hôtellerie et détient également de nombreux parcours de golf. Au cours de sa campagne, il a dû rendre publics des détails de son patrimoine financier dans un document d'une centaine de pages qui a montré qu'il possédait des participations dans plus de 500 entités, portant pour certaines des noms tels que China Trademark LLC ou DT Marks Qatar LLC, sans pour autant en préciser la nature.
Si la présidence américaine s'est très souvent offerte à des hommes fortunés, aucun chef d'Etat n'est arrivé dans le Bureau ovale en possédant une telle nébuleuse d'actifs.
Interrogée sur cette question, la porte-parole de l'homme d'affaires new-yorkais n'a pas précisé comment il entendait gérer ses affaires pendant sa présidence.
Pour tenter de désamorcer les accusations dont il pourrait faire l'objet, Donald Trump a annoncé au cours de sa campagne qu'il allait probablement transférer à ses enfants la gestion au jour le jour de ses investissements, sans pour autant convaincre les spécialistes des questions d'éthique gouvernementale.
"Cela lui permettra vraisemblablement d'avoir plus de temps pour exercer ses fonctions de président, mais cela ne balaye en aucun cas les risques de conflits d'intérêts", estime Kenneth Gross, un avocat de Washington qui a conseillé un grand nombre de personnalités politiques confrontées à ces risques juridiques. "Les intérêts de sa famille, ceux de ses enfants, coexistent avec les siens."
La nature des activités de Donald Trump justifie plus que jamais le recours à un "blind trust", quand bien même il éloignerait sa famille du contrôle de son empire, estime Richard Gross, mais Donald Trump a rejeté cette idée.
INTÉRÊTS ÉTRANGERS
Certains conflits d'intérêts sont évidents, à l'image de l'une de ses dernières constructions, un hôtel de luxe bâti à Washington sur un terrain loué auprès de l'Etat fédéral. En cas de litige, Donald Trump se trouverait des deux côtés de la procédure.
Pour certains de ses autres actifs, le risque est moins apparent mais pas inexistant. Donald Trump est titulaire de nombreux accords de franchise et propriétaire de holdings foncières présentes dans un grand nombre de pays et qui sont susceptibles de bénéficier de subventions et de réductions d'impôts octroyées par des gouvernements étrangers.
Selon le New York Times, certaines de ses sociétés possèdent des centaines de millions de dollars de dette de banques soumises à la régulation américaine, comme Deutsche Bank ou Bank of China.
Quant à son empire hôtelier, il s'étend de la Turquie à l'Uruguay en passant par les Philippines et la Corée du Sud et il possède des parcours de golf aux Emirats arabes unis, en Irlande ou encore en Grande-Bretagne.
Ces actifs sont eux aussi susceptibles de faire émerger des conflits d'intérêt si leur pays d'accueil cherchait à influencer la politique des Etats-Unis en commerçant avec les entreprises de Donald Trump ou de ses enfants. L'une de ses filles, Ivanka, possède ainsi une marque de prêt-à-porter dont les produits sont fabriqués en Chine, un pays accusé par Donald Trump de manipuler sa devise et dont il menace de revoir le cadre douanier.
AUCUN COMPTE À RENDRE
Au cours de sa campagne, la candidate démocrate, Hillary Clinton, a elle aussi été visée par des critiques qui portaient sur la Clinton Foundation, fondée par son époux, Bill Clinton.
Lorsqu'elle dirigeait la diplomatie américaine, Hillary Clinton a signé un document par lequel elle s'engageait à ce que les donateurs n'interfèrent pas dans la politique étrangère des Etats-Unis et a accordé un droit de regard au département d'Etat sur les donations en provenance de puissances étrangères.
Mais contrairement à cette dernière, Donald Trump n'aura de compte à rendre à personne. Et il a montré au cours de sa campagne qu'il n'hésitait pas à flirter avec certaines limites en organisant des meetings dans ses propres hôtels et à truffer ses discours de références à ses propres entreprises.
Pour certains spécialistes, placer les hôtels Trump ou les parcours de golf du même nom dans un "blind trust" n'apporterait pas grand-chose.
"On ne place pas un parcours de golf dans un 'blind trust', ce serait inutile", estime Robert Kelner, juriste à Washington. "Le principe du 'blind trust' c'est qu'il est aveugle, vous ne savez pas quels actifs il possède."
Certains experts avancent une idée radicale, la seule à leurs yeux susceptible d'ôter tout risque de conflit d'intérêt: que Donald Trump liquide tous ses actifs et place la recette dans un "blind trust".
Faute de cadre juridique, les décisions de Donald Trump ne seront soumises qu'à deux types de sanctions, celles des électeurs et celles qui pourraient résulter d'un renforcement à Washington des règles de l'équilibre des pouvoirs.
Le risque d'émergence de conflits d'intérêts est accentué par l'opacité qui règne autour des actifs que possèdent Donald Trump et ses nombreuses sociétés. Leur valeur elle-même est sujette à débat. Si l'homme d'affaires dit peser plus de 10 milliards de dollars (9,33 milliards d'euros), plusieurs magazines financiers évaluent sa fortune à moins de la moitié de cette somme.
Refusant de se soumettre à l'usage établi, Donald Trump a constamment refusé de publier ses déclarations de revenus et rien ne l'obligera à le faire une fois qu'il sera formellement devenu le 45e président des Etats-Unis.
Certains spécialistes des questions d'éthique redoutent toutefois que l'immense conglomérat qu'il dirige, la Trump Organization, et sa présidence se heurtent à un nombre sans précédent de conflits d'intérêt dès sa prise de fonction, prévue le 20 janvier 2017.
La législation fédérale américaine n'interdit pas à un président de posséder des entreprises privées tout en exerçant ses fonctions, contrairement aux membres du Congrès qui sont sur ce point soumis à des règles très strictes.
A titre d'exemple, le président Lyndon Johnson a continué d'administrer discrètement ses sociétés alors qu'il assurait en public avoir cessé de le faire, souligne son biographe, Robert Caro.
"Il n'y a aucune restriction légale", note Noah Bookbinder, directeur général de Citizens for Responsibility and Ethics in Washington, une organisation civique indépendante.
Depuis Lyndon Johnson, la plupart des locataires de la Maison blanche ont cependant placé leurs actifs personnels, qu'il s'agisse de bien immobiliers ou d'investissements financiers, dans des fonds fiduciaires sans droit de regard (blind trusts) gérés par des administrateurs indépendants, afin d'éviter les conflits d'intérêts.
Barack Obama a là-dessus fait figure d'exception, essentiellement en raison de la nature de ses investissements, majoritairement constitués de fonds indiciels et de bons du Trésor qui ne présentent pas le risque de provoquer de quelconques conflits d'intérêts.
LARGE ÉVENTAIL D'INVESTISSEMENTS
Son successeur possède en revanche un large éventail d'investissements, dans la franchise, l'hôtellerie et détient également de nombreux parcours de golf. Au cours de sa campagne, il a dû rendre publics des détails de son patrimoine financier dans un document d'une centaine de pages qui a montré qu'il possédait des participations dans plus de 500 entités, portant pour certaines des noms tels que China Trademark LLC ou DT Marks Qatar LLC, sans pour autant en préciser la nature.
Si la présidence américaine s'est très souvent offerte à des hommes fortunés, aucun chef d'Etat n'est arrivé dans le Bureau ovale en possédant une telle nébuleuse d'actifs.
Interrogée sur cette question, la porte-parole de l'homme d'affaires new-yorkais n'a pas précisé comment il entendait gérer ses affaires pendant sa présidence.
Pour tenter de désamorcer les accusations dont il pourrait faire l'objet, Donald Trump a annoncé au cours de sa campagne qu'il allait probablement transférer à ses enfants la gestion au jour le jour de ses investissements, sans pour autant convaincre les spécialistes des questions d'éthique gouvernementale.
"Cela lui permettra vraisemblablement d'avoir plus de temps pour exercer ses fonctions de président, mais cela ne balaye en aucun cas les risques de conflits d'intérêts", estime Kenneth Gross, un avocat de Washington qui a conseillé un grand nombre de personnalités politiques confrontées à ces risques juridiques. "Les intérêts de sa famille, ceux de ses enfants, coexistent avec les siens."
La nature des activités de Donald Trump justifie plus que jamais le recours à un "blind trust", quand bien même il éloignerait sa famille du contrôle de son empire, estime Richard Gross, mais Donald Trump a rejeté cette idée.
INTÉRÊTS ÉTRANGERS
Certains conflits d'intérêts sont évidents, à l'image de l'une de ses dernières constructions, un hôtel de luxe bâti à Washington sur un terrain loué auprès de l'Etat fédéral. En cas de litige, Donald Trump se trouverait des deux côtés de la procédure.
Pour certains de ses autres actifs, le risque est moins apparent mais pas inexistant. Donald Trump est titulaire de nombreux accords de franchise et propriétaire de holdings foncières présentes dans un grand nombre de pays et qui sont susceptibles de bénéficier de subventions et de réductions d'impôts octroyées par des gouvernements étrangers.
Selon le New York Times, certaines de ses sociétés possèdent des centaines de millions de dollars de dette de banques soumises à la régulation américaine, comme Deutsche Bank ou Bank of China.
Quant à son empire hôtelier, il s'étend de la Turquie à l'Uruguay en passant par les Philippines et la Corée du Sud et il possède des parcours de golf aux Emirats arabes unis, en Irlande ou encore en Grande-Bretagne.
Ces actifs sont eux aussi susceptibles de faire émerger des conflits d'intérêt si leur pays d'accueil cherchait à influencer la politique des Etats-Unis en commerçant avec les entreprises de Donald Trump ou de ses enfants. L'une de ses filles, Ivanka, possède ainsi une marque de prêt-à-porter dont les produits sont fabriqués en Chine, un pays accusé par Donald Trump de manipuler sa devise et dont il menace de revoir le cadre douanier.
AUCUN COMPTE À RENDRE
Au cours de sa campagne, la candidate démocrate, Hillary Clinton, a elle aussi été visée par des critiques qui portaient sur la Clinton Foundation, fondée par son époux, Bill Clinton.
Lorsqu'elle dirigeait la diplomatie américaine, Hillary Clinton a signé un document par lequel elle s'engageait à ce que les donateurs n'interfèrent pas dans la politique étrangère des Etats-Unis et a accordé un droit de regard au département d'Etat sur les donations en provenance de puissances étrangères.
Mais contrairement à cette dernière, Donald Trump n'aura de compte à rendre à personne. Et il a montré au cours de sa campagne qu'il n'hésitait pas à flirter avec certaines limites en organisant des meetings dans ses propres hôtels et à truffer ses discours de références à ses propres entreprises.
Pour certains spécialistes, placer les hôtels Trump ou les parcours de golf du même nom dans un "blind trust" n'apporterait pas grand-chose.
"On ne place pas un parcours de golf dans un 'blind trust', ce serait inutile", estime Robert Kelner, juriste à Washington. "Le principe du 'blind trust' c'est qu'il est aveugle, vous ne savez pas quels actifs il possède."
Certains experts avancent une idée radicale, la seule à leurs yeux susceptible d'ôter tout risque de conflit d'intérêt: que Donald Trump liquide tous ses actifs et place la recette dans un "blind trust".
Faute de cadre juridique, les décisions de Donald Trump ne seront soumises qu'à deux types de sanctions, celles des électeurs et celles qui pourraient résulter d'un renforcement à Washington des règles de l'équilibre des pouvoirs.
Le risque d'émergence de conflits d'intérêts est accentué par l'opacité qui règne autour des actifs que possèdent Donald Trump et ses nombreuses sociétés. Leur valeur elle-même est sujette à débat. Si l'homme d'affaires dit peser plus de 10 milliards de dollars (9,33 milliards d'euros), plusieurs magazines financiers évaluent sa fortune à moins de la moitié de cette somme.
Refusant de se soumettre à l'usage établi, Donald Trump a constamment refusé de publier ses déclarations de revenus et rien ne l'obligera à le faire une fois qu'il sera formellement devenu le 45e président des Etats-Unis.