Connectez-vous

Lecture sur quelques amalgames et raccourcis de Serigne Modou Bousso Dieng relatifs au « Adiya ».

Mardi 17 Octobre 2017

«La justice, c’est le droit. Et le droit passe par le social. Cela passe par des *Adiya*». Propos de Serigne Modou Bousso Dieng.
 
La sortie de l’OFNAC afin de tirer au clair l’affaire des 270 millions de francs CFA remis à monsieur Béthio Thioune, le responsable des thiantacounes, a donné l’occasion à Serigne Modou Bousso Dieng de défendre le « Adiya », un trésor financier non négociable d’une certaine classe maraboutique et de fustiger la volonté des responsables de cet organisme étatique de fouiller dans les affaires de la communauté mouride.
 
Par ailleurs, le marabout précise expressément que : « le * Adiya *appartient aux mourides. Donc, on ne laissera personne y jeter le discrédit. Il faut éviter toute polémique pouvant créer une tension sociale ».
 
Le marabout semble s’offusquer sur le fait que l’OFNAC ne s’est jamais prononcé sur les pratiques récurrentes de gaspillage et de distribution des billets d’argent à tout va lors des soirées musicales au Grand Théâtre et lors des combats de lutte.Je suis d’avis avec vous que l’OFNAC ne s’est jamais intéressé sur la volonté sournoise de certaines personnalités de se livrer à leur jeu satanique de guichet automatique afin de montrer leur situation financière et sociale devant une foule hagarde et précarisée. Pourtant, il y a dans bien des cas matière à mener des enquêtes impliquant des autorités administratives et étatiques en train de distribuer beaucoup d’argent.
 
Certes, l’OFNAC qui veut se saisir de ce pain béni que constitue la masse financière des thiantacounes en ouvrant une boîte de pandore susceptible d’abus, n’est pas dans son rôle et a le devoir de mettre la lumière sur les importantes ressources financières mises à la disposition des autorités publiques. Toute autre attitude relève de manœuvres dilatoires afin de cacher sa faiblesse, son incurie et son incapacité à révéler voire dénoncer les nombreux cas de mauvaise gestion et de détournement de deniers publics de certaines personnalités politiques proches du régime de notre président par défaut, monsieur Macky Sall.
 
Toutefois, s’agissant de personnes privées ou de simples citoyens n’ayant pas de liens de travail ou de  participation dans la gestion des affaires publiques, il existe d’autres structures de contrôle plus habilitées voire plus outillés en la matière comme la DIC à enquêter sur ce genre de financement voire de mouvements importants d’argent.
 
Il est vrai que les sources de financement de certains mouvements tels que les Thiantacounes demeurent un tabou infranchissable. Pourtant, nous sommes au cœur de la justice. Dans un État de droit digne de ce nom, à partir du moment où des flux importants d’argent circulent et sont publiés dans les journaux et les sites en ligne d’information,  il est du devoir de la puissance publique de savoir l’origine licite de cette manne financière. Nous n’avons pas le devoir de nous en offusquer puisque de manière récurrente des agents de l’Etat assermentés en collaboration avec les institutions financières jettent un regard perplexe voire suspect sur tout mouvement d’argent dépassant 6 millions de francs CFA.
 
Dites nous pourquoi, les autorités publiques doivent être plus vigilantes à l’encontre du sénégalais lambda et se taire sur des montants financiers à hauteur de plusieurs centaines de millions de nos francs ? Où se trouvent l’équité et le devoir d’égalité des citoyens devant la rigueur de la loi ?
 
Dans le cas d’espèce, il ne s’agit nullement d’une ingérence dans les affaires des familles maraboutiques. Si cette manne financière était gardée comme toujours dans le secret des familles maraboutique voire aristocratiques, l’OFNAC se serait privé de sa communication inutile.
 
Nous autres citoyens savons depuis belle lurette que des sommes astronomiques d’argent circulent au cœur des familles maraboutique et que l’Etat du Sénégal n’a jamais manifesté un quelconque intérêt à connaître le trésor financier de ces familles maraboutiques. L’Etat du Sénégal, depuis l’indépendance a laisséprospérer une économie parallèle au cœur du système féodal maraboutique, qui en définitive annihile tous les efforts de développement économique endogène. Cette économie informelle mobilise énormément de moyens financiers qui sont en dehors du système officiel des banques. Les économistes sénégalais éprouvent toutes les peines pour chiffrer avec précision les avoirs réels des familles maraboutiques.
 
Pourtant, une gestion efficiente de ces avoirs en concertation avec l’Etat et les organismes financiers peut permettre de financer beaucoup de projets structurants profitables à l’ensemble du corps social sénégalais.Au plus, les familles maraboutiques doivent sortir de cette gestion opaque de leurs ressources principalement constituées de « Adiya » en ouvrant des comptes bancaires auprès d’établissements financiers comme la Banque Islamique du Sénégal (BIS) afin de solliciter l’appui de cette dernière pour la réalisation de projets d’envergure sociale ou de modernisation des cités religieuses tout en respectant l’éthique islamique en matière bancaire.
 
En définitive, une rupture s’impose dans la manière dont les familles maraboutiques gèrent les dons voire contributions des fidèles. Elles doivent collaborer avec des comptables et/ ou des fiscalistes afin de s’acquitter chaque année d’un bilan comptable fiable, qui en définitive permet de préciser dans les détails la gestion des comptes et de connaître l’évolution en temps t de leur situation financière.
 
Les familles maraboutiques avec leur importante puissance financière doivent être au cœur du développement économique et social du pays. Elles ne doivent pas se satisfaire de rentes. L’Etat du Sénégal a le devoir impérieux de lancer ce débat en concertation avec les familles maraboutiques principalement celles de Touba afin de mobiliser leurs importantes ressources financières avec des primes voire des subventions alléchantes à la clé comme c’est le cas avec certaines entreprises du secteur privé national et international.
 
C’est ce débat là que vous devez porter en tant que jeune intellectuel marabout et non de s’accrocher sur des privilèges afin de montrer la voie d’une gestion opaque des ressources des familles maraboutiques. Cette gestion opaque des ressources que vous condamnez avec fermeté chez notre président par défaut, monsieur Macky Sall,  vous en faites votre cheval de bataille au sein de la classe maraboutique mouride.
 
Pourtant, dans un État de droit respectueux de la légalité juridique, il doit exister la traçabilité de tous les mouvements financiers dans le pays. La justice et le droit sont les principaux piliers de la République pour asseoir la sécurité et une certaine harmonie des relations sociales.
 
Dans votre approche réductrice du lien social, il y amanifestementla volonté de pérenniser une gestion opaque des collectes d’argent au sein de la communauté mouride loin du regard curieux et perplexe des citoyens sénégalais. Ce débat a le mérite d’être posé parce qu’il permet au demeurant de clarifier une perception biaisée du « Adiya »
 
Par ailleurs, je ne vois pas en quoi dans vos propos le droit passe par le social. Le droit réglemente la vie en société dans un espace bien précis et sous le contrôle de la puissance publique. Ainsi, la règle juridique permet in fine de circonscrire les droits et les devoirs des individus dans un cadre réglementaire afin d’assurer ou de promouvoir des relations sociales apaisées et respectueuses de l’Etat de droit.
 
Au demeurant, dans le même ordre d’idées, les autorités publiques peuvent mettre en application une justice sociale distributive plus efficiente afin de corriger certaines inégalités sociales souvent sources de tensions et de frustrations exacerbées. La mise en place de cette justice sociale distributive est du ressort uniquement de ceux et de celles qui sont chargés de définir et de conduire la politique de la nation.
 
Par contre, il est sans aucun doute exagéré de dire que le droit passe par le social dans le cadre des affaires maraboutiques. Le droit est du ressort de la puissance publique. Tout au plus, il ne peut s’agir que d’actions vertueuses pouvant conduire au social dans le cadre des communautés maraboutiques.
 
Ces raccourcis sciemment distillés dans vos propos peuvent fausser voire orienter le débat comme si en voulant jeter un regard sur les sources de financement des familles maraboutiques, nous jetons l’anathème sur  le social. Loin de là, nous nous indignons avec raison contre la volonté de puissance de certains faux dévots, la course effrénée à la richesse, les dérives, l’aliénation de milliers de citoyens sénégalais, une compétition indigne dans le champ maraboutique.
 
Le lien social est le ciment de l’unité nationale qui permet par ailleurs de prémunir le danger de l’individualisme moderne, source de compétition féroce entre les membres de la société et de conflits.
 
Le social doit être compris voire entendu comme toute action visant à permettre d’assister des personnes ou des communautés qui vivent dans la précarité ou sont confrontées à de véritables problèmes existentiels tels que manger, se vêtir, se soigner, s’instruire, se loger qui au demeurant, peuvent porter un sacré coup à leur dignité humaine. Le social doit être orienté dans cette direction.
 
C’est cette vocation sociale que toutes les personnes soucieuses de la dignité humaine de leurs semblables doivent privilégier. Ce lien social n’est pas l’apanage d’aucune communauté maraboutique.
 
Les citoyens sénégalais qui sont meurtris dans leur chair de leurs conditions effroyables d’existence méritent que les bonnes volontés et nos riches se penchent sur leur sort.
 
Dire également que le social passe par le « Adiya » , c’est se méprendre de la solidarité sociale. On peut faire le social sans nécessairement passer par le créneau des « Adiya ».Ce dernier, de nos jours, est visiblement détourné de son objectif premier qui était d’assister le marabout dans la gestion quotidienne des daraset  de la vie stricto sensu des membres de la communauté de fidèles.
 
Aujourd’hui , l’essentiel de la collecte des « Adiya » sert uniquement à enrichir et à  entretenir des hommes de la trempe de BéthioThioune et de SerigneModou Kara Mbacke, d’autres encore qui vivent comme des pachas sur le dos de milliers de talibés , qui au demeurant se dépouillent de tous leurs biens afin de satisfaire leurs moindres désirs mondains.
 
C’est cette forme de « Adiya », une nouvelle méthode d’extorsion de fonds qui indigne et qui jette le discrédit sur une certaine classe maraboutique.
 
Dites-moi comment peut-on mobiliser autant d’argent et le confier à un homme de la trempe de Béthio Thioune pour les besoins du Grand Magal de Touba alors qu’au même moment des milliers de Sénégalais vivent dans un dénuement total ? Et la vertu islamique dans tout ça ? 
 
Par contre, lorsqu’il s’agit de levées de fonds visant des travaux d’assainissement et de voiries pour un meilleur cadre de vie de la ville de Touba, nous nous mobilisons pour réaliser les infrastructures pour le bien-être de la communauté. Lorsque les moyens financiers ne sont pas disponibles et que la puissance publique traîne le pas et n’assure pas son rôle dans la gestion des affaires du pays, il est important de s’acquitter de cette tâche noble.
 
Assister également par le biais des « Adiya » des chefs religieux pour assurer l’éducation et la formation de citoyens sénégalais est un acte de générosité, de solidarité et de don de soi afin d’assurer un rôle de régulation sociale.
 
L’action sociale est protéiforme et ne se réduit pas au seul « Adiya » tel que le sous-entend Serigne Modou Bousso Dieng.
 
Nous devons travailler davantage dans un esprit d’ouverture, porteur de plus de progrès voire de cohésion sociale et non dans le déni  voire le sectarisme.
 
massambandiaye2012@gmail.com
 
 
 
Nombre de lectures : 140 fois

Nouveau commentaire :












Inscription à la newsletter