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RSF/Liberté de la presse 2024 : Le classement en-trompe-l’oeil d’un Sénégal qui gagne 10 places

Vendredi 3 Mai 2024

Avec dix rangs gagnés en 2024, le Sénégal donne l’impression d’avoir fait un bond significatif dans le classement annuel de la liberté de presse en Afrique Subsaharienne publié aujourd’hui par Reporters sans frontières. Mais ceci découle d’un contexte favorable né du changement de régime car le pays a perdu 13 points sur l’indicateur sécuritaire, une épée de Damoclès sur la tête des journalistes.

Sadibou Marong, directeur du Bureau Afrique Subsaharienne de RSF, à Dakar le 3 mai 2024, pour la présentation du Classement mondial de la liberté de presse
Sadibou Marong, directeur du Bureau Afrique Subsaharienne de RSF, à Dakar le 3 mai 2024, pour la présentation du Classement mondial de la liberté de presse

104e en 2023. 94e en 2024. Le Sénégal a gagné 10 places dans le classement de la liberté de presse dans le monde d’une année à l’autre. Mais cette progression est à relativiser de manière substantielle car le score obtenu par notre pays est « très négatif » et le « rapproche dangereusement » du pallier des 55 points, soulignent Sadibou Marong, directeur Afrique Subsaharienne de Reporters sans frontières (RSF) et Romane Pijulet. chargée d’édition et relations. Ils présentaient ce 3 mai 2024 - Journée mondiale de la liberté de presse - l’état de la liberté de presse dans 180 pays et régions dont l’Afrique. D'ailleurs, un seul pays, la Zambie (95), sépare le Sénégal d'une ''zone rouge'' qui débute avec le Tchad (96) et finit par l'Érythrée (180). 

 

Le cas du Sénégal est jugé « problématique », selon RSF. Le contexte y est généralement favorable à l’exercice du métier de journaliste, surtout avec les changements espérés suite au changement de régime intervenu après le scrutin présidentiel du 24 mars 2024. Toutefois, il reste marqué par des indicateurs de sécurité « très négatifs » qui ont fait reculer le pays sur ce plan, indique Sadibou Marong. 

 

Outre la sécurité, les autres indicateurs pris en compte par le classement de RSF pour 2024 sont : le contexte politique, le cadre légal, l’environnement économique et le contexte socio-culturel.
 



L’année préélectorale 2023 a été particulièrement dure pour les professionnels des médias. Ils ont été en permanence confrontés à une triade répressive composée des forces de défense et de sécurité (FDS), des autorités politiques et de l’appareil judiciaire. Entre arrestations musclées, interpellations, brimades sans cause, mandats de dépôt quasi systématiques, peines de de prison, les journalistes ont payé un tribut élevé pour continuer à exercer leur métier, sur le terrain et dans leurs rédactions.

 

« On se demande encore quelles étaient les motivations des autorités au regard des charges lourdes et et nombreuses retenues contre certains journalistes », note Sadibou Marong. Qui pointe du doigt un « ciblage » de journalistes importants qu’il fallait faire taire par l’instrumentalisation de la justice.

 

2023, une année à oublier pour la presse

 

Les emprisonnements successifs de Pape Alé Niang, ceux de Serigne Saliou Guèye, de Pape Ndiaye et de nombreux autres journalistes, la coupure du signal de la télévision du groupe Walfadjri, les restrictions d’internet et suspensions des données mobiles qui ont impacté sur le dynamisme habituel des médias en ligne, etc. ont créé « une distorsion » dans les services d’information, rappelle le directeur Afrique Subsaharienne de RSF. 

 

« Ce qui est sûr, c’est que l’impunité contre les journalistes et les médias doivent cesser. A ce titre, la sécurité des professionnels reste une question fondamentale », rappelle le responsable de RSF Afrique. C’est pourquoi les nouvelles autorités sénégalaises doivent considérer ce classement comme un challenge en faveur de la liberté de presse. Sous cet angle, elles doivent aller dans le sens de faire voter et promulguer une loi sur l’accès à l’information qui « est une demande de RSF mais qui est surtout une loi d’intérêt public », a plaidé Sadibou Marong.

 

Face aux difficultés et contraintes diverses, Sadibou Marong a rendu hommage à la « résilience des médias sénégalais », en particuliers aux jeunes reporters. Leurs sacrifices au quotidien pour informer les populations méritent d’être mieux soutenus grâce à des conditions de travail améliorées et des traitements salariaux et sociaux plus en phase avec leur dignité professionnelle, a-t-il souligné.

Dans un message posté sur ses plateformes de réseaux sociaux, le Président Bassirou Diomaye Faye a réitéré son « engagement à soutenir une presse libre et diversifiée, pilier indispensable de notre démocratie. » 
[IMPACT.SN] 

 
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